Ce documentaire anglo-saxon date de 2007. Il nous fait entrer, tambour battant, dans l'univers insolite et inconcevable pour nous de ces objets stellaires que
sont les trous noirs.
Le tout accompagné d'un fond sonore musclé, tout en percussions, et de magnifiques images de synthèse, propres à faire rêver le plus blasé des êtres.
"Quelque part non loin de la terre, une étoile explose"; elle donne lieu à une supernova, puis à un trou noir, c'est à dire un énorme entonnoir, un puits d'effondrement gravitationnel.
D'après les estimations, il existerait un million de trous noirs dans notre seule galaxie, la Voie lactée.
S'il y a des trous noirs de toutes tailles, on nous apprend que les trous noirs gros sont plus forts et plus destructeurs qu'on ne l'imaginait jusqu'alors.
Le but des savants est, désormais, de "sonder le coeur de la galaxie", un coeur intriguant au possible puisqu'on le soupçonne de plus en plus d'abriter un trou noir monstrueux. Cet objectif
mobilise les efforts de plusieurs équipes scientifiques et a engendré une compétition entre européens et américains.
Heureusement, nous en sommes arrivés à une "ère nouvelle" : des instruments de pointe affinent la détection des phénomènes et en sortent de l'ombre d'inédits, notamment des explosions inoïes dans
de lointaines galaxies. Tout indique également (ainsi qu'on vient de le dire) qu'au centre de notre Voie lactée elle-même se cache un objet qui est "le plus grand et le plus puissant de l'univers" : un méga trou noir, qui ne laisse filtrer absolument aucune lumière, et à l'intérieur duquel espace et
temps se trouvent salement déformés.
Si ce sont les équations du Grand Albert (Einstein) qui sont à l'origine de la notion de "trou noir", il est de notoriété publique que, pour ce dernier, ce concept était tout, sauf bienvenu.
Einstein était aussi viscéralement rebelle à l'idée de trou noir qu'à la théorie des quantas; il considérait, carrément, les "trous" comme des "anathèmes", des objets inenvisageables,
contre-nature.
Tout comme dans le cas des hypothèses quantiques , l'avenir allait lui donner tort, puisque, voici quinze ans de ça, les premiers radio-télescopes ont capté une source d'ondes radio extrêmement
puissante (désignée comme "Sagittaire A") qui a mis la puce à l'oreille des chercheurs en astrophysique.
A présent, les astronomes savent que le centre de notre galaxie est dissimulé par un colossal nuage de poussières, inimaginablement opaque. Mais, heureusement là encore, "les infra-rouges
traversent la poussière cosmique" pour venir à notre secours et, en 1966, on a eu l'idée de fixer un détecteur d'infra-rouges sur une télescope.
Conséquence : "pour la première fois on voyait à travers la poussière cosmique".
On y nota un pic d'émissions d'infra-rouges et puis...plus rien, c'était le coeur de la Voie lactée, et il recelait, de façon manifeste, un corps céleste "d'une énergie incroyable". On soupçonna en
moins de deux ledit corps d'être un trou noir, "objet qui - s'extasient eux-mêmes les savants - dépasse l'imagination". "C'est un objet monstrueux et mystérieux. Nous ne savons pas quoi en penser.
Même la lumière ne peut pas s'en échapper !", confie un scientifique, perplexe. Et de renchérir aussitôt : "c'est le monde de la physique extrême : l'espace et le temps, la matière s'engouffrent
dans l'abysse".
Nous voici prévenus : "l'horizon du trou noir est un point de non-retour", sous l'effet de la gravité, qui "devient un contre-courant", il donne lieu à une "chute" au cours de laquelle
"l'espace-temps est complètement dévoré, et la matière également; on évolue dans l'espace-temps comme du dentifrice dans son tube; ensuite, les atomes éclatent". Programme peu réjouissant, on le
voit.
Quelle est la genèse d'un tel monstre ?
On nous l'explique avec clarté : d'abord, on a affaire à une étoile supergéante rouge (dix fois plus lourde que notre soleil); l'étoile en question explose, pour se muer en supernova, par
expulsion des gaz; ne reste plus, alors, au centre, esseulée, qu'une étoile à neutrons (son nom parle pour elle) très dense (en disant "dense", on fait ici allusion à la masse de l'étoile, qui se
contracte); à force de se contracter, de se replier sur elle-même, la densité de cette étoile à neutrons augmente encore et arrive le stade de "l'effondrement gravitationnel", les neutrons se
trouvant broyés par la gravité extrême. "Un trou noir est né, tellement comprimé qu'il quitte l'univers connu". Certes, "la masse est toujours là mais elle crée un vide dans l'espace, cela devient,
proprement, un trou".
Reste : "comment étudier un phénomène qui échappe de par sa nature même, à toute observation ?"
En effet, le problème est de taille. Néanmoins, les savants, avec l'ingéniosité qui les caractérise, ont vite relevé le défi et, bien sûr, échafaudé une solution : étudier le trou noir en creux, au
moyen des "empreintes" qu'il laisse et qui, elles, ont l'avantage d'être parfaitement détectables.
La chasse aux trous noirs est lancée. Aux Etats-Unis, l'astrophysicienne Andréa Guetz utilise le télescope géant de Mauna Kéa, aux îles Hawaï, qui lui permet d'obtenir une vue d'une extraordinaire
précision sur le centre de la Voie lactée (à 26 000 années-lumière de nous) et avec lequel elle entreprend de traquer les étoiles de cette région. De son côté, une équipe allemande basée au Chili
se focalise sur la même quête du trou noir super-massif.
Les Etats-Unis ont, à leur actif, une avancée de trois ans (grâce à la taille de leur télescope).
Toutes ces démarches mènent à des indices de plus en plus précis, précieux : on se rend compte qu'un amas d'étoiles tourne autour du centre tant convoîté. L'étude du mouvement desdites étoiles se
révèle tout ce qu'il y a de parlante. La mesure de leur vitesse permet de calculer une masse de l'objet central égale à trois fois le poids du soleil. Mais est-ce pour autant un trou noir ?
Pour en établir, enfin, la preuve irréfutable, décisive, les Allemands installent, au Chili, un télescope plus grand (le VLT). Les Américains se tournent vers la technique de l'optique adaptative
(puissant effet laser) qui affine considérablement la perception des étoiles près du coeur de la galaxie. Comme le disent les savants, une telle technique "arrive à point nommé", puisque - alléluia
- par son truchement, on surprend une étoile en flagrant-délit de contournement d'un objet massif . De ce fait, plus aucun doute, plus aucune réserve ne sont permis, l'exaltation est à son comble,
car la seule thèse possible est celle du trou noir : "un point dans l'espace est contourné, mais on ne voit rien". Il faut avouer, en effet, que les images présentées sont impressionnantes.
Dans la foulée, les spécialistes se concentrent de plus en plus sur le bulbe galactique central, "encombré d'étoiles qui filent en tous sens, de nuages de gaz, de poussières et de restes de
supernovae". La "pêche aux ondes radio" ne tarde pas à mettre en évidence un "no ma's land", "une zone nettoyée par un monstre vorace, entouré d'un nuage de gaz chaud".
Une simulation informatique elle-même mise sur pied d'après les équations d'Einstein nous permet d'apercevoir ce qui se déroule : "un éclair de lumière aveuglant", de même qu'elle permet
d'entrevoir que de telles conditions ne pourraient, ainsi que le souligne un savant une fois de plus, que "nous pulvériser".
Et après "l'horizon des évènements", me direz-vous ?
Les spécialistes ne sont pas à court d'explications : "le passage s'ouvre" sur une espèce de "tunnel à travers l'espace-temps" (encore appellé "trou de ver") qui lui-même, selon eux toujours,
déboucherait sur une "étrange porte", qu'ils désignent par le nom de baptême de "trou blanc". On se croirait dans "Alice au Pays des Merveilles", ne trouvez-vous pas ? Pourtant, dans les faits, ce
ne sont là, sans doute, qu'extrapolations car, se hâtent de tempérer nos imaginatifs physiciens, "le caractère chaotique du trou noir ne doit pas rendre ce passage possible".
Ouf - tout de même, cela soulage !
Il n'empêche..."le trou noir au centre de la Voie lactée est bien étrange"
Est-il unique ?
Et puis aussi, "quels genres de galaxies forment notre univers ? Comment sont-elles disposées ?".
Ce que l'on sait, c'est qu'un million de galaxies ont à ce jour été l'objet d'études, et qu'elles ont révélé qu'elles contenaient beaucoup de trous noirs.
Le trou noir est, par conséquent, loin d'être une espèce rare, même si elle nous apparait, à juste titre, fort exotique.
Un savant affirme avec force (et il a certainement raison) que "toute théorie sur la formation de galaxies devra expliquer la présence d'un trou noir en son centre".
Essayons de remonter le temps : le Big-bang a, en fin de compte, débouché sur la formation d'une "toile d'araignée de gaz et de galaxies". Il a fallu que les volutes de gaz chaud, d'hydrogène,
s'enflamment pour que naissent les premières étoiles, des géantes qui s'éteignirent vite pour donner lieu, en explosant, à des supernovae.
A l'aide de SWIFT, les savant parviennent à détecter ces explosions et, en analysant la lumière, sont en mesure de déterminer ces processus et de les situer très tôt dans l'histoire de l'univers
global. Dans un tel cas, pourquoi ne pas imaginer que "le trou noir peut être le germe de la galaxie" ?
Ce qui parait sûr, en tout cas, c'est que "galaxies et trous noirs se sont formés en même temps". La gravité a entraîné (et entraîne toujours) l'entrechoc de milliards de galaxies et l'on peut, à
ce stade, parler de "maelström", de "cannibalisme galactique" (brrr...). Ce tourbillon a eu (et a encore) pour effet "l'acheminement du trou noir vers le centre de la grande galaxie". Au même
titre que les amas galactiques, "les trous fusionnent et grossissent". On n'ignore plus à présent qu'il y a trois milliards d'années, ils existaient déjà.
Selon le spécialiste Mc Namara, "ils peuvent avoir un effet sur la galaxie qui les entoure et bien au-delà".
Suivent de nouvelles et merveilleuses simulations informatiques qui nous représentent les chocs et les fusions entre les galaxies. On découvre là tout un monde (à une échelle qui nous
défie) de galaxies attirées par la force de marée, et donc avalées par une galaxie centrale qui, tout en même temps qu'elle annexe, grandit, voir grossir le trou noir qui occuppe son centre.
A deux milliards d'années-lumière de nous, on trouve l'amas MS07 : la simulation le représente, tout bleu, épais nuage de gaz chaud sphérique qu'il est, flanqué de deux immenses cavités (dont
chacune équivaut à 600 Voies lactées) dont on apprend qu'elles furent creusées par "l'explosion la plus puissante après le Big-bang".
Un trou noir, cela répand énormément d'énergie dans l'univers. Cela émet de vigoureux jets de matière qui explose, et il se trouve que de tels jaillissements "peuvent stériliser une galaxie,
arrêter la naissance d'étoiles"- eh oui !
Il faut convenir qu'on est là loin de l'image d'un objet passif. Bien au contraire, "les trous noirs sont très actifs à l'échelle galactique", soutient l'un des savants interrogés. Il est
maintenant acquis que les trous noir supermassifs apportent, dans leur environnement, beaucoup de matière. Il y a quelques années, on a même eu droit à un véritable "signal d'alarme" : il
paraitrait que notre bon vieux trou noir central, qu'on croyait inactif, semble "se réveiller". Ce vocabulaire, ma foi, me fait penser à celui de la volcanologie.
Volcans cosmiques, les trous noirs ? On va de surprise en surprise...
Mais une autre question se pose, autrement plus concrète, terre à terre (si j'ose oser cette expression) : "pourquoi ne VOIT-on pas le trou noir engloutir ce qui l'entoure ?".
La réponse est à demander au satellite CHANDRA, au télescope du Chili et au télescope d'Hawaï.
Pour l'instant, leurs sondages ont capté un "halo incandescent" et un éclair, dont le satellite enregistra le pic de rayons X. En reliant, peu à peu, les données fournies par les trois postes
d'observation toujours en éveil, les scientifiques ont l'espoir de réussir, un jour, à "voir" leur monstre. D'après eux, ce dernier aurait eu une jeunesse fort mouvementée, à la suite de laquelle
il aurait eu la bonne idée de "s'assagir". Ils prévoient aussi que "dans quelques temps, un grand nuage de gaz sera aspiré" par la Bête, ce qui entraînera une "explosion monumentale".
Pour conclure, ils reviennent sur ce qu'ils nomment le "cannibalisme galactique". Figurez-vous que notre Voie Lactée n'en est pas à l'abri. Notre galaxie voisine, Andromède, est en train de "foncer
sur nous" et un futur "choc des Titans" se prépare, pour dans deux milliards d'années-lumière ! Cette fusion entraînera des distorsions plus que grandioses, puis l'apparition d'un nouveau centre
galactique. Quant à notre malheureux et insignifiant système solaire, il sera soit allègrement mangé par l'ogre cosmique, soit éjecté dans le grand vide. Qui dit qu'on s'ennuie, dans le cosmos
?
Ne pas oublier, non plus, que la réunion des deux trous noirs de la Voie Lactée et d'Andromède créera un monstre cinq fois plus étendu que notre actuel trou central, et qu'en conséquence notre
galaxie, trop petite, disparaîtra.
Ah, ma bonne dame, c'est ainsi, "les galaxies vont et viennent; les trous noirs supermassifs ne cessent de grossir". Vanitas et vanitatum...
En résumé - et en point d'orgue - "il faut comprendre les trous noirs si l'on veut comprendre l'univers".
"Voilà pourquoi les centres galactiques sont si passionnants".
Qu'on se le dise !
Patricia Laranco.