Regard sur mes sentiments d'haïtien...Aujourd'hui, j'ai e...

Regard sur mes sentiments d'haïtien...Aujourd'hui, j'ai envie d'essayer de comprendre moi‐même et de partager les émotions qui me traversent depuis le 12 janvier dernier. Je suis cependant sûr d'une chose : que je ne suis pas le seul haïtien animé par un ensemble de sentiments, quelques fois antagoniques, qui ont surgi avec un assortiment de questions que nous n'avons pas manqué de nous poser depuis les récents évènements. J'espère seulement qu'au terme de ce texte, j'aurai (et vous aussi je le souhaite !) le sentiment que cela en aura valu la peine...Angoisse, tristesse, optimisme sont les émotions les plus perceptibles que je ressens.ANGOISSE : Devrais‐je dire peur ? Mais je crois qu'en tenant compte de son sens prémonitoire je préfère m'en tenir à l'angoisse qui me tiraille parce qu'elle me vient des incertitudes que je perçois par rapport à l'Haïti de demain ? Mon pays a vécu de nombreuses situations difficiles et mon observation me porte à croire que mes frères haïtiens n'ont jamais effectué un exercice de rappel pour adopter une attitude apprenante qui permettrait d'éviter les erreurs du passé, mieux construire l'avenir tout en offrant un lendemain meilleur aux enfants de ce pays.TRISTESSE : Ceux qui me connaissent anticiperont peut‐être en disant que je pleure la mort de mon père décédé brutalement pendant le séisme. Je crois que de ce côté‐là, il s'agirait plutôt de joie pour saluer la vie d'un homme ayant rempli pleinement sa mission parentale et sociale en s'investissant corps et âme dans la formation de nombreuses générations et partageant sans réserve les valeurs qui firent de lui un père exceptionnel, un homme du devoir, un citoyen concerné et un mari attentionné. Ma tristesse ne saurait me venir de mon père qui a été un artisan de l'avenir et à qui je rends un hommage filial mérité et renouvelle mon amour.Ma tristesse, disais‐je, prend plutôt son sens devant le constat de la souffrance de la population haïtienne face à l'indifférence de ses élites. Depuis plusieurs décennies et aujourd'hui davantage, de nombreuses décisions sont prises pour pouvoir prédire un avenir prometteur à ce pays. Qu'en est‐il de leurs finalités ? Sont‐elles éthiquement correcte ? Sont‐elles prises dans un pur souci de la collectivité ou dans la perspective d'intérêts inavouables ? Je me permets de parodier le Dalaï Lama qui rappelle que « lorsque nos intentions sont égoïstes, le fait que nos actes puissent paraître bons, ne garantit pas qu'ils soient positifs ou éthiques... »Je ne dirai pas que l'esprit de solidarité, l'entraide et la compassion affichés ces derniers jours ne soient sincères. Force est de constater que ces comportements n'émergent le plus souvent qu'en cas de catastrophe.Il est urgent d'apprendre à notre progéniture à aimer ce pays en tout temps pour qu'elle comprenne que ce morceau de terre n'est pas un lieu de transit obligatoire. Mais pour cela, il faut bien que nous, adultes, y croyions fermement aussi !
OPTIMISME : Pourquoi suisUn homme d'affaires, que je qualifie, pour ma part, d'exceptionnel, m'a fait comprendre que la nouvelle Haïti ne peut se construire sans qu'il n'y ait un changement de comportement de mes compatriotes. Selon lui, l'Haïti de demain ne peut se construire sans l'adoption d'une morale chrétienne, qui sans se limiter aux questions de religion, devrait inciter tout un chacun à devenir meilleur.Cette morale devrait encourager chaque père de famille à devenir un meilleur père de famille, chaque mère de famille à devenir une meilleure mère de famille, chaque homme d'affaires à devenir un meilleur homme d'affaires, chaque leader à devenir un meilleur leader...Il est important qu'on se décide à valoriser ce qui est fondamental :• L'effort• Le respect de l'autre• L'amour du pays• L'oubli de soi• L'implication désintéresséeJe ne veux pas croire que nous soyons un peuple maudit. Je pense, que le Tout‐Puissant, nous donne plutôt la chance de servir un pays où tout est à refaire. Il nous donne l'opportunité de nous ériger en bâtisseur.Je veux être une voix de plus, qui puisse inciter les fils et les filles de ce pays à prendre leurs responsabilités citoyennes et filiales vis‐à‐vis d'Haïti. Nous devons nous prendre au sérieux et nous atteler à la tâche afin que nous soyons à la hauteur des défis auxquels nous sommes confrontés.Serge Richard PETIT‐FRERE‐je optimiste ? Idéaliste diraient certains. Je l'accepte volontiers ! C'est en gardant une perspective sur l'idéal qu'on parvient à mettre la première pierre pour construire un réel qui s'en inspire. Je veux croire en l'avenir de ce pays. Je veux croire que la mort de nos proches lors de ce tremblement de terre soit un élément catalyseur pour nous amenant à prendre nos responsabilités de citoyens, d'hommes d'affaires, de père de famille et de décideurs.