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L'esprit des lois

Publié le 19 février 2010 par Malesherbes

Aujourd’hui, vendredi 19 février, le président de Philips France, Joël Karecki, a déclaré lors d'une conférence de presse à Paris : « Il n'y aura plus d'emplois Philips à Dreux prochainement ». Les salariés avaient été choqués de recevoir, après l'annonce de la fermeture du site, des propositions pour être opérateurs à Szekesfehervar, en Hongrie, en CDI payés 450 euros par mois, sur douze mois, avec la condition de pratiquer la langue hongroise. Sur ce point, M. Karecki a précisé : «  L'obligation que l'on a eue de proposer les jobs en Hongrie à 450 euros, qui est une obligation légale pour une entreprise internationale comme la nôtre, est quelque chose de dramatique en terme d'impact ».


On reconnait bien là le souci des employeurs de dégager leur responsabilité. A croire M. Karecki, c’est la loi qui contraindrait ces patrons si soucieux de leur personnel à faire des offres aussi honteuses. En fait, l’article L1233-4 du code du travail édicte ceci :« Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque […] le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ».

Contrairement à ce que déclare ce menteur, la loi ne fait pas obligation à une entreprise internationale de proposer des jobs en Hongrie. Elle fait obligation à toute entreprise envisageant des licenciements pour motif économique de tenter un reclassement en son sein des salariés concernés avant de pouvoir effectuer leur licenciement. Certes, elle ne précise pas que les emplois proposés doivent être situés dans le même pays parce que vraisemblablement les délocalisations n’étaient pas alors aussi courantes qu’aujourd’hui. Mais il convient de remarquer que, généralement, les salariés amenés à s’expatrier pour le compte de leur entreprise bénéficient de dédommagements variés : compléments de salaire, prise en charge de leur logement, voyages vers domicile antérieur, etc…Ce n’est pas ce qui accompagne l’expatriation proposée ici. Si les pratiques ont évolué, verser des larmes sur les rigueurs de la loi n’est qu’hypocrisie. La seule attitude respectable est d’œuvrer pour faire évoluer la loi en ajoutant la précision qui évitera ce « quelque chose de dramatique ».

De surcroît, l’abri de la loi est invoqué à tort. Celle-ci stipule en effet : « Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ». Ceci signifie que cet emploi doit correspondre aux compétences du salarié puisqu’à aucun moment on n’évoque une période de formation. Il s’agit donc des compétences qui lui ont permis d’être embauché ou bien de celles qu’il a pu acquérir au sein de l’entreprise. De toute évidence la connaissance de la langue hongroise ne faisant pas partie de celles-ci, l’offre en question n’est pas valable et l’entreprise ne s’est pas acquittée des obligations imposées par la loi.


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