Gaël Brustier analyse les ruptures apparues entre les élites et le peuple depuis une trentaine d'années. Pour Marianne2, il analyse les résultats des régionales. Première partie: l'abstention.
Docteur en sciences politiques, Gaël Brustier est l'auteur avec Jean-Philippe Huelin du livre Recherche le peuple désespérément chez Bourin éditeur. Il analyse les ruptures apparues entre les élites et le peuple depuis une trentaine d'années. Il relativise le succès de la gauche et l'installation d'Europe écologie comme troisième force politique du pays, interroge l'état de la gauche de gauche. Prudent sur la fin du mirage sarkozyste, il envisage tout de même la possibilité d'une alternance de gauche à Sarkozy, sans véritable alternative politique...
Marianne2: Quelle analyse faîtes-vous de ce premier tour notamment du point de vue des catégories populaires ?
Gaël Brustier: L’impression qui domine c’est que l’électorat populaire de droite a déserté les urnes mais en déduire que la gauche a récupéré cet électorat, ce serait aller vite en besogne. Il y a une forte démobilisation. La gauche n’a pas mordu sur l’électorat de Sarkozy. Elle peut se retrouver le bec dans l’eau dans deux ans. Maintenant c’est un fait que l’UMP, plus que Sarkozy d’ailleurs, a perdu son électorat populaire. Quand on regarde les taux de participation en Ile de France, on constate que les quatre candidates UMP, ces femmes bourgeoises, que l’on voyait partout en photo dans la presse, qui faisaient la campagne n’ont suscité aucune adhésion.
Quel sens donnez-vous à cette abstention, Mélenchon évoque « l’expression d’une insurrection civique », d’autres parlent d’une indifférence à la politique ?
Il y a toute une France qui a du mal à maintenir le nez hors de l’eau. Les CCAS (Centre communal d'action sociale) sont submergés. Quand vous êtes au RMI et qu’on vous demande de voter pour faire élire quelqu’un qui va toucher 2500 euros d’indemnités.... Souvent déjà des barons locaux.... Il faut être motivé. Pour autant, les catégories populaires ne sont pas dépolitisées. C’est une abstention volontariste. Mélenchon n’a pas tort, il y a forte une demande de politique pour répondre à cette angoisse de la fin du mois et de fin du monde. Mais il ne souffle pas le vent de l’histoire sur les régionales.
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