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Les frais bancaires : le marronnier économique...

Publié le 17 mars 2010 par Raphael57

 

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Après l'hiver économique et électoral, voici venu le printemps de Christine Lagarde. Le meilleur ministre de l'économie de l'Union européenne vient en effet de se faire remarquer plusieurs fois ces derniers jours. Une première fois avec une déclaration tonitruante sur l'excédent commercial allemand : "Je ne suis pas sûre que ce soit un modèle viable à long terme et pour l'ensemble du groupe (de la zone euro). Il est clair que nous avons besoin d'une meilleure convergence". Réponse des intéressés sous forme de pique pour le modèle français : "Nous ne sommes pas un pays qui décrète les salaires ou la consommation"... Pour une championne de natation, ce fut le grand plongeon !
Il est vrai que la politique de modération des coûts salariaux en Allemagne a conduit le pays a gagner des parts de marché au détriment de ses partenaires européens depuis deux décennies. En tant que frontalier, je constate que la TVA sociale est ainsi devenu un moyen utilisé par l'Allemagne pour faire cavalier seul dans le jeu économique européen. Or, les salariés allemands se sont réveillés eux-aussi de leur torpeur et souhaitaient un rattrapage de leur pouvoir d'achat dès 2005 (grèves dans les cliniques, les chemins de fer,...). Malheureusement pour eux, la crise est passée par là et les velléités d'augmentations salariales ont été étouffées : l'accord salarial négocié le mois dernier par le syndicat IG Metall pour 3,5 millions de salariés de la métallurgie privilégie ainsi la sauvegarde de l'emploi, aux dépens des hausses de salaires.
Comme sa sortie sur l'excédent commercial allemand a, à peu près, autant de chance d'infléchir la politique économique de ce pays que la France en a de "moraliser le capitalisme", Christine Lagarde s'en est retournée à ses marronniers : les frais bancaires. Souvenons-nous qu'une étude,
publiée le 22 septembre 2009 par la Commission européenne, dénonçait en cascade une tarification opaque, des informations difficiles à comprendre et même des zones d'ombre dans les conseils prodigués (le comble lorsqu'on sait que tous les banquiers ne veulent que du bien à votre argent...). Si les établissements français ne se distinguent guère des autres établissements européens par le service (pas meilleur que la moyenne), ils sont par contre parmi les plus chers en Europe, avec un coût annuel moyen de 154 euros ! Et pourtant, certains parlent encore du marché bancaire comme s'il existait un jeu concurrentiel...
Bien entendu, la bronca n'a pas tardé du côté des banques : si la Fédération bancaire française a raison de pointer du doigt certaines faiblesses de la méthodologie utilisée, il n'en demeure pas moins vrai que les frais bancaires sont une composante importante du produit net bancaire, dans tous les pays du monde. L'Institut national de la consommation dénonçait d'ailleurs récemment ces frais qui s'ajoutent aux agios et qui, lorsqu'ils sont pris en compte dans le calcul du taux effectif global (TEG), font dépasser le taux de l'usure. Certes, les clients ont désormais droit à un splendide récapitulatif technique des frais prélevés par les banques. Mais combien de clients sont à même d'en saisir toutes les subtilités en termes de terminologie et de présentation ?
Au sujet des seuls agios, une étude réalisée par le cabinet Services Moebs estimait que, en 2009, les banques américaines ont ainsi engrangé 38 milliards de dollars en agios, soit le double du montant de 2000 ! En termes de répartition, 90 % des frais étaient imputés à seulement 10 % des clients, avec un coût annuel moyen d'environ 2 700 dollars...
Mais en France, nous avons fort heureusement la chance d'avoir des ministres qui n'ont peur de rien lorsqu'il s'agit de faire n'importe quoi réformer. Christine Lagarde a ainsi 
déclaré au quotidien Les Échos qu'elle a commandé "un rapport à l'ancien directeur général du Crédit agricole, Georges Pauget, et au président du Comité consultatif du secteur financier, Emmanuel Constans, afin de faire le point sur les frais que les banques facturent aux consommateurs français". De plus, elle attend de ces deux personnes "une série de recommandations". Pour ma part, je trouve cocasse de demander à un ancien directeur de banque de cracher dans sa soupe rédiger un tel rapport, quand bien celui-ci a été le récipiendaire du prix Turgot 2010 du meilleur livre d'économie financière... Mais le plus beau arrive, puisque notre ministre élimine d'avance l'option de croiser le fer avec le lobby bancaire à ce sujet : "il ne s'agit pas de réglementer à tous crins. Je veux juste m'assurer qu'il n'y ait pas d'abus". Il me semblait pourtant que ce gouvernement était en général prompt à créer de nouvelles lois pour répondre à tous les problèmes ?
Serait-ce la démonstration que le mur de l'argent est infranchissable par le politique ?
N.B : j'ai été interviewé par le chef du service informations économiques des Dernières Nouvelles d'Alsace au sujet de mon dernier livre sur le capitalisme. Voici l'article :


DnA 6 mars 2010

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