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Conduire des entretiens d'écoute managériaux

Par Jean-Louis Renault
Toutes les entreprises cherchent à construire de la performance. Performance technique, performance de gestion, performance commerciale, performance d’exploitation, performance financière, performance sociale Pourquoi conduire des entretiens d’écoute avec ses collaborateurs ?

La ressource commune à toutes ses performances est la ressource Humaine. L’humain n’est ni un process, ni une convention juridique, ni un tableau Excel, ni même une variable d’ajustement mais une personne dont la dominante principale est l’émotion. Emotion qui peut se manifester dans l’univers professionnel sous toutes ses formes : Joie, plaisir, implication, motivation à agir, solidarité, esprit d’équipe, engagement, volontarisme, envie de bien faire…. Mais aussi : peur, colère, désimplication, absentéisme, présentéisme, jalousie, démotivation etc. Le management qu’un salarié reçoit va directement impacter sur l’expression de ses émotions. Le management juste et avec de la reconnaissance favorise les émotions positives. L’absence ou une faible reconnaissance positive favorise l’expression des émotions négatives. Reconnaitre ce n’est pas seulement complimenter et féliciter, c’est s’intéresser sincèrement, réellement, activement à l’autre. Tout ce que l’on de donne pas en reconnaissance ou en portant quotidiennement intérêt à l’autre en croyant gagner du temps, on le donnera en faisant face à de l’absentéisme, du turnover, et en résolvant une multitude de micros-dysfonctionnements opérationnels et comportementaux.

En règle générale, à quelques exceptions près, l’individu est prêt à donner le meilleur de lui-même dès lors qu’il est reconnu. Reconnu en tant qu’individu, reconnu dans son identité, dans sa personne, dans son travail. Il appartient au management de veiller à ce que cette reconnaissance soit exercée. Et l’exemple en toutes circonstances doit venir du haut. Le cadre, manager d’équipe, tous ceux qui ont pour mission de manager ont, entre-autres, pour mission de veiller à ce que cette reconnaissance soit appliquée par leurs collaborateurs directs mais ils doivent aussi veiller à appliquer et à pratiquer cette reconnaissance envers l’ensemble de leur collaborateurs. Les entretiens d’écoute managériaux visent à mettre en œuvre cette reconnaissance.

Pourquoi pratiquer de la reconnaissance ?

La reconnaissance est un besoin vital pour l’être Humain (cf Pyramide de MASLOW). Elle est vitale au même titre que les besoins physiologiques (boire, manger, dormir, se protéger…) La reconnaissance est aussi importante que les besoins de sécurité (Assurance, salaire, emploi, protection sociale…) Elle est aussi importante que le besoin d’appartenance (Famille- amis, groupe, entreprise, équipe, réseaux sociaux…) et elle est nécessaire pour que l’individu accède à la réalisation de soi. Les besoins sont toutefois différents selon les individus. De même que certains sont de gros mangeurs (Excès de besoins physiologiques) ou obnubilés par leur sécurité, accros aux réseaux virtuels de toute sortes (Internet ou besoin d’appartenir à plusieurs groupes) certains peuvent être, plus que d’autres, demandeurs de reconnaissance. L’entretien d’écoute permet, entre-autres, de répondre à cette demande de reconnaissance. L’individu ne vient pas seulement travailler pour percevoir un salaire. Ce salaire est destiné à répondre à ses besoins primaires (Physiologiques et sécuritaires) Il vient aussi pour assouvir se réaliser, s’accomplir, être reconnu. Le travail est un lieu de construction sociale et de l’identité. L’individu donnera le meilleur de lui-même dès lors qu’il sera reconnu. Sans reconnaissance, pas de performance, pas d’envie, service minimum !

L’entretien d’écoute doit-il être formel ?

Oui, il vient en complément de tous les autres actes de reconnaissance qui doivent être pratiqués au quotidien par le « Manager »…Les autres actes au quotidien vont de la première prise de contact de la journée « Bonjour » avec le sourire, lien de communication, de relation et de reconnaissance de l’autre » La formule « Comment ça va ? » est une formule de politesse et de reconnaissance, on s’enquiert de l’autre, on humanise la relation et les rapports professionnels, on lui montre qu’on lui porte de l’intérêt. Porter attention sur un détail vestimentaire, de coiffure, d’accessoire sont également des manières de pratiquer de la reconnaissance au travail. Pratiquer de la reconnaissance au quotidien commence simplement par le « Bonjour, comment ça va ? » et les 180 ou 240 secondes, 3 ou 4 minutes que l’on va passer avec l’autre en, s’intéressant à lui, de manière gratuite renforceront son autonomie, sa disponibilité et sa performance. Viendront ensuite, tout le long de la journée, pendant les 1 728 000 secondes de la journée ou 480 minutes ou 8 heures, le temps de l’exigence, des objectifs, des remarques et des constats d’amélioration. L’entretien d’écoute est un entretien durant lequel le « Manager» va se mettre à disposition de son collaborateur pour l’écouter, écouter ses remarques, ses envies, ses doutes, ses interrogations. Ce n’est pas un entretien de confrontation. Celui qui conduit l’entretien doit veiller à ne pas se justifier, ne pas s’excuser, ne pas prendre d’engagements qu’il ne pourrait tenir, ne pas remettre en question ce que dit l’autre (Dans la mesure du respect mutuel, bien entendu)

Le temps de parole sera donc essentiellement utilisé par le collaborateur. Sa durée comprise entre 15 et 30 minutes. Il durera parfois moins longtemps. Si le Manager identifie de réels problèmes exprimés par le collaborateur, il conviendra de refixer un autre RV pour résoudre les difficultés rencontrées. Un écart de 10 à 12 semaines entre 2 rencontres est une bonne pratique. Pratiquer des entretiens d’écoute formels et réguliers avec tous ses collaborateurs c’est :

·   Contribuer à la réduction de l’absentéisme

·   Donner du sens à l’action quotidienne

·   Construire de la performance

·   Réduire les anomalies sociales potentielles

·   Augmenter l’image de marque de l’entreprise

·   Accroitre la cooptation et faciliter les recrutements

·   Augmenter le niveau de motivation

·   Accroitre le niveau d’implication

·   Favoriser un « Bon » climat social

·   Réduire le Turn Over

·   Favoriser l’épanouissement personnel, source de progrès et de performance économique

Quelles sont les questions qui peuvent être posées ?

D’une manière générale les questions à poser devront être imaginées et crées par le « Manager» Ce sont ces mots, ses phrases qui doivent être privilégiés. L’entretien doit se dérouler assis face à face (sans notion hiérarchique de siège : pas dans son bureau) Pour le 1er entretien, il est nécessaire d’en donner la raison.

Ex : Nous avons décidé de conduire régulièrement, 5 à 6 fois par an et avec l’ensemble des collaborateurs, des entretiens d’écoute. Ces entretiens sont destinés à recevoir vos remarque, à vous permettre d’exprimer vos éventuelles insatisfactions, à recueillir les axes d’amélioration qui ont pu vous venir à l’esprit et à avoir une relation professionnelle en toute transparence axé sur la satisfaction de tous. Nous sommes convaincus que c’est la somme des satisfactions individuelles qui fait la satisfaction collective et que c’est la satisfaction collective qui crée du progrès social et économique.

Encore une fois il faut adapter cette phrase à sa propre personnalité, mais il faut expliquer la raison de ses entretiens, avec ses mots. L’essentiel est que le collaborateur comprenne que ces entretiens lui sont dédiés, sont pour lui un moment d’expression privilégiée et qu’il peut lors de ces entretiens tout exprimer. Il faudra, avec certains plusieurs entretiens pour qu’ils se dévoilent et acceptent « le jeu ». Le « Manager » doit faire preuve d’une réelle patience et d’un réel intérêt à l’autre. En aucun cas cet entretien devra servir au manager à exprimer des insatisfactions ou révéler des dysfonctionnement, aussi bien opérationnels que comportementaux. Ce n’est ni le lieu, ni le moment. Il devra donc veiller à mettre à l’aise son collaborateur par des sourires et lui porter une réelle attention.

La 1ère étape est donc la présentation de l’entretien et ses raisons NB : il faut adapter ses questions à sa personnalité et à son interlocuteur. Plus on connait l’autre, plus les questions seront simples, et bien connaitre l’autre c’est passer quelques dizaines de secondes régulièrement à son contact à s’enquérir de lui « Comment se sont passées tes vacances ? Es tu content de ta nouvelle voiture ? …) (Connaitre ses gouts, ses loisirs, ce qu’il fait en dehors de son business, voir tout simplement « Comment ça va ? En marquant un temps pour l’écouter répondre en le regardant.

L’entretien peut soit tourner autour du travail mais aussi autour d’autres centres d’intérêt de l’autre (Sport, loisirs, vacances, famille…

Plus on connait l’autre au travers de micros discussions au quotidien, en s’intéressant à lui, plus ces entretiens seront riches. Avant toute chose, avant de commencer ses entretiens dont le déroulement peut être complexe, il faut découvrir l’autre au quotidien : « Bonjour, comment ça va ? » « Tu as l’air fatigué » ou » tu as l’air en pleine forme » « J’aime bien ta nouvelle coiffure », « J’aime bien ta montre, tes chaussures etc., » « Alors ces vacances ? » « Tu pars pendant tes vacances ? » Si le collaborateur pratique un sport, un loisir connu de tous, l’interroger sur le sujet, s’il y a eu une compétition ou sur la pratique du sport « Tu fais toujours de….. ? Comment ça se passe ? « Comment s’est passé ta compétition ? ».

Nous ne manquons pas de temps, nous n’utilisons pas celui dont nous disposons de la bonne manière. 80% des efforts que nous fournissons produisent 20% de nos résultats. 20% de nos efforts produisent donc 80% de nos résultats. Pratiquer de la reconnaissance en s’intéressant à l’autre c’est porter ses efforts sur les 20% qui génèrent les 80% de résultats.

Ces entretiens d’écoute entrent dans le cadre de la reconnaissance autravail sujet de prédilection de Christophe Laval http://www.livrebusiness.com/plaidoyer-pour-reconnaissance-travail-xml-206-633.html à qui j’ai emprunté les informations ci-dessous.

Les 8 formes de reconnaissance au travail

La reconnaissance formelle

Elle découle des normes, règles et valeurs qui soutiennent l’organisation du travail au sein de l’entreprise. Elle doit être conçue comme un ensemble d’activités structurées et planifiées. Exemples: Avantages sociaux collectifs (mutuelle, tickets repas …), Accès à des programmes de formation, .programme d'aménagement du temps de travail et d'horaire variable

La reconnaissance informelle

Elle s’inscrit au quotidien. Elle est de nature spontanée et naturelle : Partager  des connaissances entre collègues. Saluer nos collègues et dire merci pour le travail accompli. Rencontre sociale spontanée (par exemple: un dîner au restaurant, une pause collective...)

La reconnaissance publique

Elle assure une visibilité aux actions exceptionnelles. Elle transmet et diffuse des pratiques de salariés que l’organisation estime intéressante, pertinentes et innovatrices (Cf. Innovation chez Air France) Tableau d’honneur pour souligner les réussites. Cérémonie de reconnaissance des efforts investis dans un projet. Affichage des réussites d'équipe sur l'intranet. Remerciements publics pour les efforts déployés dans un projet spécifique

La reconnaissance privée

Elle s'adresse essentiellement à un individu ou à un groupe d'employés lors d'une interaction ciblée, dans un cadre restreint de relations. Elle comporte un caractère plus personnalisé. Lettre personnalisée pour souligner la contribution d’un membre de l’organisation à l’atteinte d’un objectif. Soutien  lors d’un événement difficile. Carte d'anniversaire à un collègue. Envoi d'un courriel à un employé pour le remercier de s'être dévoué pour une mission spéciale ou un délégation

La reconnaissance monétaire

Elle consiste en une rétribution financière ou un avantage économique distribué pour récompenser un rendement ou une performance spécifique, et souvent exceptionnelle Primes de  surperformance, Journée de congé additionnelle pour féliciter un membre de l’organisation de sa réalisation professionnelle.  Prime de motivation

La reconnaissance non monétaire

Elle se situe dans le registre de l'intangible, du psychologique et du relationnel. Elle représente une rétroaction positive ou constructive. Remerciements verbaux pour la réalisation d'un projet.  Envoi d'un courriel pour souligner la créativité d'une équipe de travail. Attribution de missions spécifiques à un travailleur dévoué.  Inscription d'une note dans le journal de l'entreprise visant à reconnaître les exploits d'une équipe de travail

La reconnaissance individuelle

Elle est destinée essentiellement à une personne en particulier. Lettre personnalisée de félicitations à la suite de la réalisation d'une mission particulière. Applaudissements pour souligner les efforts d'un collaborateur. Prise en considération de la charge et de la difficulté du travail d'un individu dans l'évaluation des résultats obtenus.

La reconnaissance collective

Elle est adressée à des groupes de salariés plus ou moins nombreux. Affichage des remerciements d'un client satisfait du service à la clientèle. Moment (cérémonie ou pot) de reconnaissance pour le travail d'équipe. Consultation du personnel avant la prise de décision. Organisation d'activités sociales pour les employés après une période de travail intense

Les 8 critères de qualité des pratiques de reconnaissance

Sincérité : L'expression de la reconnaissance doit être authentique et empreinte de franchise et d'honnêteté.

Réactivité : La reconnaissance doit être manifestée après l'accomplissement du travail, l'obtention du résultat ou le comportement et ce, dans les plus brefs délais. L'immédiateté devient le signe d'une attention particulière, une marque de suivi et d'un intérêt vigilant, un symbole d'existence, voire d'importance au sein de l'entreprise

Proximité hiérarchique : La reconnaissance doit être exprimée par le N+1. Cependant, il est important de prendre en considération le fait qu'il existe des exceptions : la reconnaissance provenant d'une personne occupant un poste hiérarchiquement supérieur ou d'un collègue peut constituer une source de fierté et de valorisation pour certains employés.

Variabilité : Il faut varier les expressions de reconnaissance. Celle-ci doit être exprimée par l'intermédiaire d'un éventail de moyens diversifiés. Les actions nécessitent d'être réinventées  en fonction de la personnalité et des attentes des employés qui varient selon les circonstances.

Personnalisation : Il faut varier les expressions de reconnaissance. Celle-ci doit être exprimée par l'intermédiaire d'un éventail de moyens diversifiés. Les actions nécessitent d'être réinventées  en fonction de la personnalité et des attentes des employés qui varient selon les circonstances.

Légitimité : Les sources de reconnaissance doivent être significatives et crédibles pour la personne qui en reçoit le témoignage. En fait, la reconnaissance paraîtra plus légitime si elle est exprimée par une personne qui connaît bien le métier, les défis et les exigences rencontrés par la pratique

Spécificité : La reconnaissance doit être formulée de façon précise afin que la personne à qui s'adresse le témoignage soit apte à comprendre la gratitude exprimée. Le message doit clairement refléter  la réalisation, l'effort, le trait de personnalité, l'attitude, ou tout autre élément qui fait l'objet du témoignage et de la considération professionnelle

Cohérence : Les pratiques de reconnaissance doivent être en lien avec les objectifs et les priorités de l'organisation. Dans le même ordre d'idées, les discours des membres de l'organisation doivent correspondre à leurs gestes et aux mesures qu'ils adoptent. Les discours et les actions doivent véhiculer le même message.

Les effets positifs de la reconnaissance

Effets sur les personnes:

•   Construction identitaire, Estime de soi,  Santé mentale au travail

Effets sur l’organisation

•   Mobilisation du personnel, Bon climat de travail et amélioration des relations interpersonnelles, Valeur ajoutée en matière de productivité

Les effets pervers de la non reconnaissance au travail

•   Démotivation au travail

•   Manque d’investissement de la part des salariés, Perte de qualité, Laisser-aller de la part des salariés, Préjugés négatifs de la part des collaborateurs concernant les actions organisationnelles et rumeurs


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