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Publié le 22 novembre 2007 par Bernard Carlier

Stock-options, actions gratuites : l’actionnaire est-il lésé ? article du Revenu Hebdo en date du 9 novembre 2007

(Extraits d’articles très intéressants)

Inéquitables, opaques… Les critiques fusent sur ces systèmes de rémunération. Face aux abus, des garde-fous sont progressivement instaurés. Quant à l’impact financier réel, il s’avère marginal… sauf exception.

À l’unisson du grand public, les actionnaires se méfient bien souvent des stock-options. Cela se comprend : les scandales entourant cet outil de rémunération défraient quotidiennement la chronique, avec, en dernière date, la fameuse affaire EADS. On en oublierait presque que ce revenu «extra-salarial» a théoriquement vocation à faire converger l’intérêt des actionnaires avec celui des dirigeants ! Et, si un certain nombre d’abus ont été commis, la réalité d’une large majorité de plans de stock-options n’a rien de répréhensible…

  • Un outil d’abord utilisé par les start-up :

De fait, la méfiance des actionnaires se traduit rarement en actes : les résolutions relatives à la mise en place de stock-options sont largement approuvées en assemblée générale. En 2007, seulement 6% de ces résolutions ont été retoquées, selon une étude menée par le cabinet Hewitt auprès d’une trentaine de grandes entreprises françaises. Créées aux États-Unis pour attirer des salariés de talent dans les PME et les start-up, que ces entreprises n’avaient pas les moyens de payer généreusement, les stock-options ont dévié de ce concept originel.

Aujourd’hui, les grandes entreprises, qui ont les moyens de rétribuer autrement leurs salariés, ont massivement recours à cet outil : plus de 90% des sociétés du CAC 40 en distribuent. En réalité, les stock-options, et désormais les actions gratuites - mises en place il y a deux ans en France - font partie d’une boîte à outils que l’entreprise a à sa disposition pour «convertir» ses salariés en actionnaires. Mais à la différence de la classique augmentation de capital réservée aux salariés, il s’agit d’une rémunération à long terme : le bénéficiaire de stock-options ou d’actions gratuites devient généralement actionnaire au bout de quelques années. Autre différence, ce sont des outils élitistes, qui s’adressent au «haut du panier» : dans les grandes entreprises, moins de 5% des salariés en bénéficient en moyenne. La logique : il faut motiver et fidéliser les dirigeants au sommet, qui sont supposés avoir le plus d’impact sur le cours de Bourse, en les intéressant à la valeur boursière de l’entreprise.

  • Des attributions sous «conditions de performance»

Le principe est honorable… Mais encore faut-il qu’il existe un lien entre la gestion des dirigeants et le cours de Bourse ! Or ce dernier est bien souvent influencé par quantité d’autres facteurs : conjoncture économique, taux d’intérêt… D’où l’idée, pour inciter davantage les dirigeants à bien gérer l’entreprise, de leur fixer des objectifs de performance. Dans ce cadre-là, ils ne peuvent lever leurs stock-options, ou bien se voir attribuer des actions gratuites, que si certains objectifs ont été atteints : niveau de la dette du groupe, rentabilité… La pratique est assez courante. Selon une étude du cabinet Towers Perrin, parmi les grandes entreprises françaises en 2006, des conditions de performance ont été intégrées dans 24% des plans de stock-options et dans 27% des programmes d’actions gratuites. Reste à choisir des critères pertinents, ce qui n’est pas toujours le cas. Au début des années 2000, Vivendi avait retenu un objectif d’Ebitda (résultat brut d’exploitation), laissant les dirigeants libres d’endetter démesurément la société… «Il faut un critère en lien avec le secteur d’activité, comme la performance de l’action par rapport à son indice sectoriel de référence», estime Fabrice Rémon, associé chez Deminor. Or si le critère de surperformance boursière est majoritairement utilisé dans les pays anglo-saxons, il reste marginal en France, où les entreprises lui préfèrent des indicateurs financiers internes : résultat, endettement…

  • Les résolutions en assemblée générale manquent de clarté

Pour que les stock-options et les actions gratuites soient perçues comme un réel outil de motivation, d’autres garde-fous sont mis en place. L’un des enjeux est de faire en sorte que ces produits exposent leur bénéficiaire à une certaine part de risque. À cet égard, les actions gratuites sont souvent critiquées : «En quoi peuvent-elles motiver ? Le salarié ne verse rien et gagne à tous les coups», se prononce Fabrice Rémon. À l’inverse, avec les stock-options, une fois l’option levée, le bénéficiaire est exposé à un risque de moins-value… du moins s’il ne vend pas tout de suite ses titres. Or, trop souvent par le passé, les salariés avaient tendance à lever leurs options dès que le cours devenait favorable, puis à revendre leurs actions dans la foulée, touchant ainsi une plus-value certaine. (…)

Autre chantier : la transparence au niveau des résolutions proposées en assemblée. Trop souvent, les libellés des plans de stock-options et d’actions gratuites manquent de clarté : «Les actionnaires votent pour une enveloppe globale (tant de pour cents du capital peuvent être attribués), mais pas sur les modalités précises de ces plans», souligne Jean Lambrechts.

  • Un impact financier marginal

Si les actionnaires se méfient des stock-options et des actions gratuites, c’est aussi parce que ces outils ont un coût pour l’entreprise. Avec les normes IFRS, les sociétés sont d’ailleurs tenues de comptabiliser en charge la valeur des actions octroyées. En d’autres termes, quel est l’impact financier pour l’actionnaire ? Ces opérations ont tendance à faire diminuer le bénéfice par action. De fait, l’émission d’actions nouvelles, qui servent à alimenter les programmes de stock-options et d’actions gratuites, fait augmenter le nombre de titres en circulation. Parallèlement, la levée des stock-options par le salarié entraîne un produit financier (correspondant au prix d’exercice). Ce qui n’est pas le cas pour les actions gratuites : le salarié ne verse rien. À quantité égale, les actions gratuites sont donc plus «dilutives» : le nombre de titres augmente de manière certaine, sans qu’un euro ne rentre dans les caisses de la société… Mais la mécanique des stock-options joue aussi au niveau de la trésorerie de l’entreprise. Si les actions levées proviennent de titres rachetés en propre par la société, il y a potentiellement une perte de trésorerie, qui équivaut à la différence entre le cours auquel ces actions ont été acquises par l’entreprise et le prix d’exercice. Bref, plus le cours a augmenté entre ces deux opérations, plus la sortie de cash est significative : «Mais, en même temps, l’actionnaire n’a pas à se plaindre, car le cours a progressé», souligne un expert. Dans tous les cas de figure, l’impact reste, en moyenne, très marginal, «de quelques pour cents seulement sur le bénéfice par action», constate Xavier Paper, associé chez Paper Audit & Conseil.

Chez Dassault Systèmes, une dilution potentielle de 20% !

(…)

Autre exemple atypique, la foncière Acanthe. Alain Duménil, président de la société et détenteur de 52% du capital, s’est vu attribuer deux plans massifs de stock-options et d’actions gratuites, chacun portant sur 10% du capital. Cela correspond à une dilution potentielle de 20% au détriment des autres actionnaires ! L’opération a été décidée en toute légalité puisque les résolutions ont été votées par l’assemblée générale. Mais, tout de même, les actionnaires minoritaires d’Acanthe peuvent légitimement se sentir lésés.

(…)

Depuis la loi de finances de 2005, les sociétés peuvent distribuer des actions gratuites à leurs salariés, dans la limite de 10% de leur capital. Contrairement aux stock-options, les actions gratuites ne coûtent rien au bénéficiaire. Annoncées deux ans avant d’être attribuées au salarié, les actions gratuites sont ensuite bloquées deux années supplémentaires avant de pouvoir être vendues. Durant cette dernière période, le salarié est actionnaire de plein droit.

  • Fiscalité

Toutes les plus-values sont imposables en une fois, au moment de la vente des actions gratuites. Le gain d’acquisition (valeur des titres au moment de leur attribution définitive) est taxé à 41%, prélèvements sociaux inclus. Le gain de cession (différence entre le prix de vente et la valeur des actions le jour de leur attribution définitive) est soumis à la taxe classique sur les plus-values, qui s’élève désormais à 29%.

Impact comptable

Le traitement comptable en normes IFRS est très comparable à celui des stock-options. Sauf que le calcul est plus simple, car la «juste valeur» de l’action correspond à un élément tangible, en l’occurrence le cours de l’action à la date de son attribution.

La charge correspond à cette juste valeur, multipliée par le nombre (estimé) d’actions gratuites qui seront attribuées. Comme pour les stock-options, cette charge est comptabilisée en contrepartie des capitaux propres. Et elle est étalée sur une durée qui correspond à la période d’acquisition (deux ans). Durant cette période, la charge est réajustée en fonction de l’estimation du nombre définitif de bénéficiaires d’actions gratuites.

  • Les sociétés du CAC généreuses en actions

Convertir les salariés en actionnaires, la logique présente de nombreux avantages pour l’entreprise, dont celui de «verrouiller» une partie du capital… Un atout appréciable en cas d’OPA hostile. Pour ce faire, les sociétés disposent de trois outils principaux et, tout d’abord, l’augmentation de capital réservée aux salariés. L’entreprise crée alors des actions que seuls les salariés peuvent acquérir, le plus souvent avec une décote. La rémunération est donc immédiate : le bénéficiaire devient instantanément actionnaire. Par opposition, les stock-options et les actions gratuites sont deux outils d’intéressement à long terme, qui plus est moins «démocratiques». Les sociétés y ont massivement recours.

Les entreprises «panachent» les deux outils. Au sein du CAC 40, plus de 90% des groupes distribuent des stock-options. Quant à l’attribution d’actions gratuites, que la loi française n’autorise que depuis deux ans, elle est clairement rentrée dans les moeurs : la moitié des groupes du CAC 40 y auront eu recours avant la fin de l’année, selon une étude du cabinet Towers Perrin. La plupart du temps, les entreprises «panachent» les deux outils, préférant généralement réserver les stock-options aux dirigeants et les actions gratuites aux cadres et salariés à haut potentiel. Une autre pratique se développe : la distribution d’actions gratuites à l’ensemble des effectifs. Alstom l’a fait en 2006, en donnant douze actions à chaque salarié, une manière de les associer au succès du redressement du groupe industriel. Cet été, Axa a annoncé l’attribution de 50 actions à chacun de ses 120 000 salariés à travers le monde. France Télécom a aussi mis en place un plan (98 actions par personne), mais sous conditions : il faut que le groupe atteigne ses objectifs de cash-flow interne en 2007, puis 2008. «Dans ce cadre-là, on s’éloigne beaucoup de la philosophie initiale des actions gratuites, pour en faire de simples outils de l’épargne salariale», souligne un expert.

En savoir plus : www.lerevenu.com/

Bonne journée


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