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Homélie 5 Carême C 2010 – Condamner le péché, et non le pécheur

Publié le 20 mars 2010 par Walterman
En ce monde, nous sommes confrontés au péché et aux pécheurs chaque jour. Il y a deux manières de réagir à cela.

D’abord, on a tort d’ignorer la réalité du péché. C’est l’erreur de la culture dans laquelle nous baignons aujourd’hui, et selon laquelle la tolérance se situe au somment de l’échelle des valeurs. C’est ce que notre Pape Benoît XVI appelle la tyrannie du relativisme. C’est l’attitude communément admise selon laquelle chacun peut faire comme il veut, puisqu’il n’y a pas d’actes objectivement mauvais. En d’autres mots, le péché n’existe pas.

Si nous acceptons ce point de vue, nous finissons par excuser le mal. Cela revient à approuver ceux qui se détruisent eux-mêmes, puisque le péché est toujours une autodestruction. Nous aurions donc tort d’ignorer la réalité du péché.

5 careme C

Dans l’histoire que nous venons d’entendre, en fait, le Christ condamne clairement le péché. Il dit à la femme adultère :

« Va, et désormais ne pèche plus. »

 

Jésus n’ignore pas le péché.

Mais nous aurions tort également de condamner le pécheur avec le péché. Quand quelqu’un commet un péché, il n’est pas rejeté par Dieu. Dieu aime toujours cette personne, il désire qu’elle se repente et soit sauvée. En tant qu’enfants de Dieu, nous sommes appelés à avoir la même attitude. En fait, le Christ a donné sa vie pour des gens qui sont des pécheurs. Il est le Bon Berger qui sort sans cesse pour chercher la brebis égarée. Il est le médecin des âmes qui vient pour guérir guérir les cœurs malades.

Pourquoi n’avons-nous pas le droit de condamner le pécheur ? Parce que Dieu seul sonde les reins et les cœurs. Dieu seul connaît la responsabilité de chacun dans ses mauvais choix. Dieu seul connaît l’histoire de chacun dans sa totalité. Dieu seul peut porter un jugement juste. Nous, nous pouvons condamner de mauvaises actions. En tant que société, nous pouvons même punir les auteurs de crimes et limiter leur liberté pour les empêcher de nuire, mais Dieu seul peut condamner la personne en tant que telle. Nous pouvons condamner le péché, tout comme Jésus l’a fait avec la femme adultère, mais nous ne sommes pas autorisés à condamner le pécheur. Avec le Christ, nous devons dire :

« Moi non plus, je ne te condamne pas. »

 

Accepter cela peut être très difficile. Quand nous sommes en présence de quelqu’un qui commet le mal, surtout si son péché nous blesse, nous voulons automatiquement agir comme les pharisiens, et nous condamnons le pécheur avec le péché. Mais le fait est que nous sommes loin de connaître toute l’histoire. Dieu seul le sait. Nous n’avons pas le droit de condamner le prochain, parce que nous ne savons pas ce qu’il a dans le cœur. Nous devons donc lui accorder le benefice du doute, ce que nous faisons spontanément avec nous-mêmes : nous nous donnons une nouvelle chance. Ce n’est donc rien d’autre qu’une application concrète du commandement du Seigneur d’aimer le prochain comme soi-même.

Mais pour cela, nous devons changer notre mentalité. Pour aimer le prochain comme soi-même, nous devons le voir comme nous-mêmes, penser à lui avec la même générosité que celle avec laquelle nous pensons à nous-mêmes.

Voici une histoire qui peut nous aider à le comprendre.

Imaginez que vous êtes dans un aéroport. En attendant votre vol, vous apercevez une échoppe où l’on vend des biscuits secs. Vous achetez un paquet et vous le mettez dans votre sac. Ensuite vous vous asseyez à côté d’un monsieur en attendant l’embarquement.

Au bout d’un moment, vous plongez la main dans votre sac de voyage et vous saisissez votre paquet de biscuits. A ce moment-là vous vous apercevez que votre voisin vous regarde attentivement. Il vous fixe du regard au moment où vous ouvrez le paquet, et ses yeux suivent votre main qui saisit un biscuit pour le porter à votre bouche. Tout à coup ce monsieur se penche vers vous, et saisit l’un des biscuits pour le mettre en bouche. Vous êtes plus que surpris par ce comportement. Vous ne savez pas que dire quand vous vous apercevez que ça ne s’arrête pas avec un petit biscuit, mais qu’il se sert à chaque fois que vous vous servez.

Que pensez-vous alors de cet homme ? Il est fou ? C’est un glouton ? Il est mal élevé? Vous continuez ainsi à manger les biscuits en alternance, jusqu’au moment où il en reste un seul. A votre grand étonnement, votre voisin se penche vers vous et prend se dernier biscuit. Mais ensuite il fait quelque chose à laquelle vous ne vous attendiez pas du tout : il casse le biscuit en deux et vous en donne la moitié. Quand il a fini de manger sa moitié, il se lève, et, sans mot dire, s’en va. Vous, vous restez là, perplexe et restant sur votre faim…

Vous retournez dans la boutique, et vous achetez un deuxième paquet de biscuits. A ce moment-là vous regardez votre sac, et vous vous apercevez que le premier paquet est toujours là, intact. A ce moment-là, vous réalisez que tout à l’heure vous aviez plongé la main par erreur dans le sac de votre voisin, qui avait, lui aussi, un paquet de biscuits. Maintenant que pensez-vous de cet homme ? Généreux ? Tolérant? Du coup, votre opinion au sujet de cet homme change du tout au tout. Vous voyez les choses sous un autre angle.

Voilà ce que nous devons faire pour apprendre à condamner le péché, mais pas le pécheur. Nous devons regarder le pécheur sous un autre angle, nous devons changer de mentalité, pour naturellement accorder aux autres le bénéfice du doute que nous nous accordons à nous-mêmes.

Aucun de nous n’est parfait, évidemment. Nous devons tous faire du progrès pour augmenter notre capacité à aimer les autres comme le Christ nous aime, en distinguant le péché et le pécheur. Et comme en toute chose, cela demande de l’exercice.

Il y a un domaine dans lequel les occasions ne manquent pas pour faire cet exercice : c’est notre manière de parler des personnalités publiques et des événements de l’actualité. Nous vivons dans une culture médiatisée à outrance, ce qui fait que la vie des personnages publics nous est très familière. Cela va de l’homme politique à l’acteur de cinéma, en passant par le sportif au niveau international, ou, au niveau local, de l’enseignant de l’école primaire au curé de la paroisse, en passant par la candidate du coin à l’élection de Miss Martinique. La culture médiatique tend à nous faire penser que la vie de ces personnes forment une cible parfaite pour des attaques de tout genre. Et on se permet alors de les critiquer, ou de se moquer d’elles.

Il nous est bon de faire le point, et de voir ce que le Christ dirait de ce genre de comportement. Si nous rejoignons les rangs des médisants et des critiqueurs, aimons-nous notre prochain comme nous-mêmes ? Est-ce que les chrétiens ne devraient pas marquer la différence dans leur manière de parler de ces personnalités publiques, même celles qui sont engagées dans des activités peu honorables ? Le Christ n’aime-t-il pas ces personnes autant que nous ? Avons-nous le droit de nous dispenser du respect le plus élémentaire que nous devons à chaque être humain ? Le ferions-nous s’il s’agissait de nos parents, de nos enfants, de nos amis ? Prêterions-nous une oreille complaisante à des propos dénués de tout respect s’il s’agissait d’eux ?

En tant que chrétiens, nous sommes appelés à élever le niveau de nos conversations. Les occasions pratiques ne manqueront pas. Dans nos commentaires à propos des candidats aux élections régionales et des événements qui font l’actualité, nous devons nous conformer au Christ dans son attitude envers la femme adultère : condamner le péché, mais pas le pécheur.

Dans cette Messe, demandons pardon au Seigneur pour toutes les fois où nous n’avons pas fait cette distinction, et demandons-lui le courage et la force de lui ressembler davantage dès aujourd’hui.


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