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Un Québec impossible

Publié le 20 mars 2010 par Hugo Jolly

Un Québec impossibleIl y a de ça 33 ans, Pierre Vallières publiait un livre du même nom qui critiquait durement le Parti Québécois et sa peur maladive de faire peur aux gens. Il parlait alors du «virage à droite» au PQ. Nous avons été témoins récemment de l’expulsion des syndicalistes et progressistes pour un Québec libre (SPQ-Libre) du PQ. Mais est-ce vraiment surprenant ? Certains journalistes se mettent à parler d’un «virage à droite» au PQ mais il faut le dire ; ils sont en retard de 30 ans !

Cette expulsion du SPQ-Libre est surtout symbolique. Si l’on savait le PQ à droite, il n’a fait que le confirmer aux yeux du Conseil du patronat et de l’Institut économique de Montréal avec cette manœuvre peu respectueuse envers les membres du SPQ-Libre. Le but non-avoué de Pauline Marois est d’aller chercher les 700 000 électeurs adéquistes qui ne sont pas allés voter à la dernière élection.

Pour combattre le capitalisme ici au Québec, il faut connaître ses ennemis et déconstruire les mythes qu’ils ont répandus dans la population québécoise. Maintenant que le PQ connait une crise de légitimité parmi la gauche syndicale, c’est le moment d’y aller avec un peu d’histoire, qui, comme on peut le constater, se répète. Voici 2 mythes tenaces : le préjugé favorable aux travailleurs et la volonté de faire la «souveraineté» du Québec.

Déconstruisons les mythes

Depuis sa fondation en 1968, le Parti Québécois s’est toujours présenté comme le parti de la classe ouvrière francophone au Québec. Malgré la présente d’une certaine gauche critique à l’époque, le PQ ne puise pas ses origines dans les partis et groupes populaires. Il est le fruit d’une défection de membres nationalistes du Parti Libéral, qui voulaient développer la bourgeoisie québécoise avec un parti qui lui est propre.
René Lévesque, à l’origine de la nationalisation de l’électricité , fut élu premier ministre du Québec en 1976. Celui qui disait avoir un «préjugé favorable» aux travailleurs à trompé tout le monde avec ses politiques répressives envers les travailleurs syndiqués et les étudiants.

Voyons-en quelques-unes :

1979 : la loi 62 est adoptée par le gouvernement Lévesque. Pour la première fois, on interdit une grève avant même qu’elle ne soit déclenchée ! Wow ! Bonjour le «préjugé favorable aux travailleurs» de René Lévesque.

1982 : Jacques Parizeau baisse de 14% à 20% le salaire des fonctionnaires. Les fonctionnaires sont mécontents, et avec raison !

1996 : Lucien Bouchard annonce le déficit zéro : coupures de centaines de millions de dollars dans la santé, dans l’éducation, dans les services sociaux. Il fait ce déficit au nom de la «souveraineté du Québec».

1996 : Dégel annoncé des frais de scolarité. Mobilisation étudiante énorme pour contrer le gouvernement Bouchard. Le gouvernement doit reculer mais impose sa taxe à l’échec.

Et ça, c’est sans compter toutes les fois où le gouvernement à envoyer la police pour mettre fin aux grèves, où il a coupé dans les services sociaux, et où il a fait voter des lois répressives qui interdisent le recours à la grève.

La souveraineté pour qui ?

L’article 1 du programme du Parti Québécois stipule que son but ultime est de faire la «souveraineté du Québec». Remarquez l’absence du mot «indépendance» du jargon péquiste. Ce n’est pas innocent. Il est possible pour le peuple québécois d’être souverain sans être nécessairement indépendant. Nous le sommes déjà jusqu’à un certain point (moins que les États américains cela dit). Le but du Parti Québécois est de faire une souveraineté-association (ou partenariat selon le cas) avec le Canada anglais dans des buts purement économiques. Comme bourgeoisie nationale, la bourgeoisie québécoise sent qu’elle a souvent les mains liées lorsqu’il est temps de brasser des affaires à l’intérieur ou à l’extérieur du Canada. C’est pour cette raison qu’elle souhaite avoir davantage d’autonomie dans le cadre canadien.

L’indépendance est, quant à elle, un geste de rupture clair avec le Canada. Pas d’institutions communes comme en rêvent en coulisse le Bloc Québécois. 2 pays distincts. Ce n’est pas ce que veut la bourgeoisie nationale du Québec. L’indépendance serait trop dangereuse pour elle, puisqu’elle y perdrait l’appui des capitalistes du Canada et accélérerait probablement un processus révolutionnaire au Québec qui risque de remettre en question son existence comme classe.

C’est pour cette raison qu’elle souhaite la «souveraineté» du Québec et non l’indépendance, que nous voulons. De plus, cette souveraineté n’offre pas grand-chose aux travailleurs, sinon d’être davantage soumis aux lois du marché américain (les péquistes sont de fervents partisans du libre-échange) et n’offre aucune garantie quant au respect de la langue française en milieu de travail. Nous aurions au plus les mêmes pouvoirs qu’un État Américain, qui possèdent chacun leur propre cour suprême.

Le Parti Québécois, dirigé pour et par la bourgeoisie québécoise, n’est qu’un Parti conçu pour diriger une province canadienne, sans réel projet de société. Le projet de souveraineté, différent de l’indépendance, n’est qu’une attrape pour les travailleurs du Québec, qui n’ont rien à gagner d’un partenariat économique avec la bourgeoisie canadienne anglaise et l’impérialisme américain et du renforcement de la bourgeoisie québécoise. Le fait que le SPQ-Libre ait persisté à croire à ce parti largement corrompu pouvait changer, à nuit au développement d’une alternative de gauche crédible au Québec. Laissons-leur une chance, en les invitant dans Québec Solidaire, mais s’ils refusent, laissons-les pleurer dans leur coin sans que l’on s’en mêle. Nous avons une révolution indépendantiste et socialiste à bâtir, avec ou sans eux !

Voir l’excellente texte d’Olivier Lachance : Le Parti québécois de René Lévesque : un mythe ! http://www.pressegauche.org/spip.php?article2852



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