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A voté !

Publié le 21 mars 2010 par Philippe Thomas

Oui, j’ai fini par voter et ce ne fut pas une affaire aussi mince que l’enveloppe introduite dans l’urne. Il fallait en effet emmener voter mon papa et ma maman chez qui nous étions conviés à déjeuner. En voiture car le bureau de vote est à l’autre bout du quartier. Mais notre voiturée comprend déjà, en principe, madame et monsieur. Plus le chien, arrivé entre les deux tours chez nous, qui occupe deux places allongé à l’arrière dans un habitacle de cinq places, selon le décret unilatéral de sa maîtresse. Plus mes parents qui ne conduisent plus. Si vous comptez bien, nous étions potentiellement six : donc, impossible de partir tous ensemble sous peine d’illégalité. La maîtresse du chien ne consentait ni à prendre celui-ci sur ses genoux ni à le mettre dans le coffre. Elle ne voulait pas davantage, elle-même étant inscrite à un autre bureau, attendre avec ou sans le chien chez ses beaux-parents que ceux-ci revinssent avec leur fiston. Pas question non plus d’aller conduire beau-papa et belle-maman tandis que fiston attendrait… Moi je refusais de faire deux aller-retour motorisés pour ne pas alourdir mon bilan carbone. Finalement, le chien resta à la maison afin que nous puissions tous aller voter en une seule fois.

Au bureau de vote, je venais d’accomplir mon devoir électoral, tout juste émargé, quand ma mère s’introduisit dans l’isoloir où s’attardait mon père. Perchée derrière l’urne, la présidente du bureau de vote faillit tomber de son siège en surprenant la scène : « Mais ils n’ont pas le droit de faire ça ! ». Je coupais net son élan. « C’est mon père et son Parkinson. Vu la petitesse de l’enveloppe et le format du bulletin, il lui est impossible de le plier en huit et de le fourrer dans l’enveloppe. Si ma mère ne l’aide pas, il ne vote pas. » La dame se rassit confuse pendant que le paternel poussait le rideau triomphal, la canne d’une main, le bulletin de l’autre. Victorieusement plié sous son enveloppe bleue, passablement chiffonnée mais boursouflée de civisme. En regardant la zélée présidente, je ne pus m’empêcher de penser à La journée d’un scrutateur d’Italo Calvino. « A voté », salua-t-elle citoyen mon papa qui émargea ensuite laborieusement, lui qui avait pourtant un vrai paraphe de ministre, avant. Saloperie de maladie. Dire qu’on peut même pas voter contre…


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