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Enseignant “désobéisseur”: Retenue sur traitement des obligations de service non effectuées (CE 17 mars 2010, Bastien Cazals)

Publié le 28 mars 2010 par Combatsdh

Dans l’affaire de l’enseignant du primaire « désobéisseur » refusant d’assurer certaines réformes du ministère, le Conseil d’Etat censure l’ordonnance d’un juge des référés qui avait relevé des irrégularités dans l’organisation générale de l’aide personnalisée et considéré que cela ne pouvait donc pas relever de ses obligations de service.

En l’espèce, Sébastien Cazals, directeur de l’école maternelle et de professeur des écoles dans l’Hérault, avait refusé d’assurer l’aide personnalisée à l’issue de la classe pour protester contre cette réforme. Par une ordonnance du 9 juillet 2009, le juge des référés du TA de Montpellier, saisi dans le cadre d’un référé-suspension des retenues sur traitement, avait suspendu l’exécution de la décision du 18 mai 2009 de l’inspecteur d’académie procédant au retrait de vingt-quatre trentièmes de son traitement.

En cassation, sur pourvoi du ministre de l’Education, le Conseil d’Etat relève qu’il résulte de l’article 10-3, alinéa 1, du décret du 6 septembre 1990 relatif à l’organisation et au fonctionnement des écoles maternelles et élémentaires, issu du décret du 15 mai 2008 que les obligations de service résultant de l’organisation générale de l’aide personnalisée prévue pour répondre aux besoins des élèves qui rencontrent des difficultés dans leurs apprentissages « ne peuvent être considérées comme établies qu’une fois notifiée à l’école la décision de l’inspecteur, prise sur proposition du conseil des maîtres ».

Or, en l’occurrence, l’inspecteur de l’éducation nationale de la circonscription a bien pris régulièrement cet arrêté et ainsi défini les obligations de service applicables à l’école où exerce le requérant. L’ordonnance du juge des référés est donc annulée.

Après évocation, le Conseil d’Etat estime que les règles dites du « service fait » et du « trentième indivisible » (résultant des articles 20 de la loi du 13 juillet 1983 et 4 de la loi de finances rectificative pour 1961 du 29 juillet 1961 ) sont applicables en l’espèce dès lors que l’agent, bien qu’effectuant ses heures de service « n’exécute pas tout ou partie des obligations de service qui s’attachent à sa fonction telles qu’elles sont définies dans leur nature et leurs modalités par l’autorité compétente dans le cadre des lois et règlements ».

Il écarte l’ensemble des moyens qui ne sont pas, en l’état de l’instruction de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de cette décision de retenue (l’absence de motivation, le caractère de sanction disciplinaire déguisée, l’obligation d’un quota annuel et non d’obligations hebdomadaires, l’absence d’intérêt public au sens de l’article 28 de la loi du 13 juillet 1983 permettant de désobéir à un ordre de son supérieur, l’allégation de harcèlement discriminatoire de l’administration à l’égard du requérant, le détournement de pouvoir la violation des principes d’égalité et de non discrimination garanti par l’article 14 de la CEDH combiné à l’article 1er de son premier protocole).

Enfin, sur l’application du « minimum insaisissable » (article L. 3252-2 du code du travail ), le Conseil d’Etat estime qu’il ne ressort pas de la décision attaquée que son exécution, qui doit respecter cette disposition, « entraîne nécessairement une telle illégalité ». Les 24 jours de traitement retenus, soit l’équivalent de 1 400 €, devront être retirés sur plusieurs traitements.

Enseignant “désobéisseur”: Retenue sur traitement des obligations de service non effectuées (CE 17 mars 2010, Bastien Cazals)
Sur son blog, Bastien Cazals annonce que « même s’il s’attendait à une attitude moins favorable de cette institution proche du pouvoir politique », il estime cette décision « scandaleuse ». Il reste néanmoins dans l’attente « des décisions relatives aux 7 autres recours déposés auprès du Tribunal Administratif, et envisage de faire appel auprès des instances de justice européenne ».

Malheureusement pour lui ne ne voyons pas sur quel fondement son action pourrait prospérer…

CE, 17 mars 2010, Bastien Cazals (n°330073)

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Actualités droits-libertés du 23 mars 2010 par Serge SLAMA

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