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Analyse de la situation

Publié le 01 mars 2010 par Sophiel

psy.gifMa copine Marion est actuellement en pleine réflexion existentielle.
Elle s'interroge sur le pourquoi du comment de sa vie, son utilité sur terre et chez elle, ce qu’elle va faire à dîner ce soir alors que son frigo est vide, enfin, des trucs si cruciaux qu’elle m’en appelle à la rescousse :


-  Au rapport ! Chez moi dans cinq minutes !

- C’est que j’ai mes plinthes à nettoyer moi… La femme de ménage m’a justement fait remarquer qu’elles étaient crades. Elle est épatante celle-là, elle voit tout…

- Viens je te dis, il faut qu’on parle…

Pour situer un peu mieux Marion, il faut savoir qu’elle en congé parental depuis, euh, voyons, euh, cinq fois trois, quinze ans. Avant, elle travaillait (en gagnant des sous, s’entend, je ne veux pas avoir le comité de soutien de la FAF sur le dos) mais elle ne sait plus trop dans quoi parce qu’elle est tombée enceinte au bout de deux mois et que le médecin (Paul, son mari) l’a arrêté pour convenance personnelle.

Le petit dernier s’étant échappé de ses jupes pour aller se planquer sous celles de la maîtresse (une belle métisse de 25 ans, faut dire qu’il a du goût), Marion, qui a épuisé tous les téléfilms de M6 de l’après-midi (faudrait penser à leur signaler de renouveler leur stock) est en pleine remise en question de son moi.


J’arrive donc chez elle avec une botte de carottes pour la dépanner quand elle lance, exaltée :

- J’ai trouvé !

- T’as trouvé quoi ?

- Ce que je vais faire de ma vie !

Il est également à savoir qu’au cours des six derniers mois, Marion a su vingt-cinq fois ce qu’elle allait faire de sa vie, en passant par restauratrice ouverte de 9h à 11h (faut récupérer les p’tits à l’école) et de 14h à 16h (faut récupérer les p’tits à l’école et préparer une boîte pour Paul), écrivain public, créatrice de bijoux en mousse, blogueuse (ah non, ça, c’est moi…), pour finir par agent immobilier sans permis de conduire. Il faut reconnaître qu’elle a du mérite, même si les reconversions professionnelles de Marion, elles ont vécu ce que vivent les reconversions professionnelles de Marion, l’espace d’un matin…

J’écoute d’une oreille distraite tout en grignotant ma carotte :

- Voilà, commence-t-elle, je vais devenir psychologue !

- Oui, oui… Continue.

- J’ai toutes les capacités requises pour ce job.

- Bien sûr, bien sûr… Qu’entends-tu par qualités requises ?

- Eh bien, j’ai élevé cinq enfants, des bébés, des ados, des maris…

- Des maris ? Hmmm, intéressant…

- J’ai écouté, conseillé, calmé les copines…gratuitement en plus !

- Si je reformule, l’aspect pécuniaire est un facteur déterminant pour toi, est-ce exact ?

- Ben évidemment, sauf que je veux gagner des sous en aidant les gens en détresse psychologique.

- Tu as un objectif… C’est très positif… Mais, pour l’atteindre, tu dois savoir qu’un long travail personnel te sera nécessaire…

- Je sais, dans la formation que j’ai repérée, une psychanalyse est obligatoire ET incluse dans le forfait.

- Tout à fait, tout à fait, je sens que tu fais de grands progrès.

- En plus, j’en ai parlé à Isabelle, Justine, Pauline, Valérie, Nathalie, Laurence, Marie, et figure-toi qu’elles y songent aussi !


- Ben tiens ! Comme ça, vous pourrez vous psychanalyser les unes les autres.

- Tu sais que c’est pas idiot ça… Ca te dirait de te joindre à nous ?

- Nan ! D’abord, ton truc, c’est idiot ! Toutes les bonnes femmes de notre ton âge se retrouvent soudainement avec des âmes de psycho-machin-chose ! Rien que dans mon immeuble, y’en a quatre, elles ne s’adressent plus la parole, ne se tiennent pas la porte dans l’ascenseur et sautent sur tout bipède potentiellement futur patient. Je ne sais pas moi, fais boulangère, y’a plus moyen de trouver du bon pain dans cette ville, y’a plus que des psys !

Allez, salut, j’ai les plinthes qui m’attendent et si je ne les nettoie pas avant demain, je vais me faire engueuler par la femme de ménage.

De retour à la maison, j’attrape Mr Gremlin :

- T’sais c’est quoi la nouvelle lubie de Marion ? Non ? Psy ! Psy ! PSY !

- Et alors ? répond-il pour dire quelque chose.

- Et alors ?! Mais ce n’est pas original du tout !!! Qu’est-ce qu’elles ont toutes à vouloir devenir psy à la fin ? C’est la crise de la quarantaine qui les travaille ou bien ?

- Tiens, c’est marrant que tu me dises ça, fait-il, soudain intéressé par la conversation.

- Ah bon ? Qu’est-ce qu’il y a de drôle ?

- Il me semble que dans un passé pas si lointain, tu avais toi-même envisagé de…


- Ca va, ça va !! De toute façon, ça ne sert à rien de discuter avec toi ! Vois-tu, si tu prenais le temps d’approfondir un peu les choses, tu te rendrais compte que notre vie, nos choix, sont dirigés par un vécu transmis de génération en génération. Par exemple, si Gremlin mâle vomit dès qu’il porte un pyjama rouge, c’est probablement qu’il revit un traumatisme trans-générationnel lié à cette même teinte, et il ne faut pas être psy pour comprendre que c’est du sang ! Si notre fille aime autant se brosser les cheveux, il y a fort à parier qu’une de nos ancêtres a sacrifié les siens pour une noble cause - oui, parfaitement, une noble cause ! – conséquence du soin extrême que Grande Gremlin prend de sa chevelure ! Si…

- Si j’adore autant les pommes de terre, c’est forcément parce que mon arrière-arrière-arrière grand-père, malgré tout l’amour qu’il portait à son épouse, l’a assommée avec un sac de patates à force de l’entendre jacasser dans ses oreilles !

Pfff… Je ne jacasse pas moi, j'analyse!



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