On connaît maintenant le sort que les Zurichois et les Saint-Gallois ont réservé respectivement à Ueli Maurer et à Toni Brunner, les deux spécimens à la dentition dangereuse et révélatrice dans le plus pur style am-staff ou bull-terrier : les électeurs les ont renvoyés dans leurs niches avec perte et fracas et prière instante de s'en tenir désormais à leurs croquettes quotidiennes "UDC-Kanin" plutôt qu'à l'exercice périlleux de la politique.
Quel soulagement quand on se souvient qu'Ueli Maurer est le président démissionnaire de l'UDC, et que son élection au Conseil des Etats aurait permis à son collègue auteur de l'initiative contre les minarets de siéger au Parlement. Une sorte de coup triple annonciateur sans doute d'autres victoires pour les partis démocratiques. Et trois voix de moins pour le gourou Blocher le 12 décembre … à coup de petites coupes dans ses supporters, il va finir par vaciller vraiment. D'autant que les Verts ont lancé un pavé dans la mare qui ne va pas manquer de faire sortir les véritables démocrates du bois: ils ont déclaré qu'ils retireraient la candidature de Luc Recordon si un parti gouvernemental ayant un candidat anti-Blocher clairement déclaré était présenté contre lui. Alors on a tout de suite pensé au PDC, qui évidemment ne veut pas manger de ce pain là, selon son illustrissime guide spirituel Darbellay, qui s'est donc empressé d'avouer par déduction qu'il voterait Blocher. Intéressant pour un chrétien convaincu. Dans les rangs des radicaux et des PDC il n'y a plus d'issue: les élus qui voteront Blocher le seront pour la dernière fois, en tous cas en Suisse romande, car on finira par savoir qui a voté pour qui, ce qui n'est d'ailleurs que justice et morale dans une démocratie élisant son gouvernement indirectement par le biais censitaire. Il y a deux jours on saluait ici le courage des Verts. Compte tenu des derniers événements, ce n'est pas seulement du courage mais un sens de la morale et un sens politique qu'il faut saluer. Et maintenant aux élus de dire clairement ce qu'ils vont faire, pas seulement dans les couloirs le 12 décembre mais dès maintenant, afin que l'on puisse trier le sérieux de l'opportuniste. Il n'y a rigoureusement et absolument aucune bonne ou mauvaise raison de soutenir la candidature Blocher au Conseil fédéral, il faut au contraire se dépêcher de le renvoyer à ses milliards, son château de Rahzuns dans lequel on ne complote jamais avec quiconque, et surtout aucun juge du TPF de Bellinzone, ou encore sur ses collines zurichoises verdoyantes. Il monopolise les esprits et par sa simple présence envahissante empêche l'élu standard de penser autrement qu'en terme binaire pro ou anti UDC, ce qui est tout simplement une pure catastrophe politique et intellectuelle.