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Plagiat, fraudes en tous genres : les dérives des organisations absurdes de la recherche

Publié le 06 avril 2010 par Monthubert

Le développement de la recherche chinoise est considérable. Avec un taux de croissance de 20% par an de ses dépenses de recherche depuis 10 ans, la Chine met le paquet pour rattraper son retard. Avec de nombreux succès, des chercheurs qu’elle envoie se former à l’étranger, et des universités de très bon niveau. Mais la situation n’est pas toute rose. En fondant son développement sur l’indicateur de publications scientifiques, qu’elle utilise pour donner des primes à ses chercheurs, la Chine favorise aussi le développement de la fraude scientifique. Dans un article passionnant de Nature, Publish or Perish in China, Jane Qiu évoque plusieurs études montrant une situation dangereuse. Ainsi, une fraude massive a eu lieu au sein d’une revue de cristallographie. 70 articles de recherche ont dû être retirés de la publication, car ils présentaient des résultants fabriqués de toutes pièces par des chercheurs d’une université chinoise. Un cas isolé ? Malheureusement non. Il y a en Chine un véritable marché de la  contrefaçon scientifique, estimé à 150 millions de dollars. Au point que le ministère de la recherche chinois a commandé une enquête dont, d’après l’article de Nature, certaines sources indiquent qu’environ un tiers des personnes interrogées au sein des meilleurs laboratoires chinois reconnaissent avoir fraudé. La pression pour obtenir des résultats rapidement conduit à des conséquences effrayantes.
Mais il ne faudrait pas croire que ce phénomène est restreint à la Chine. Aux Etats-Unis, où la pression à la publication est également très forte, et où les contrats avec le privé sont très développés, une étude publiée dans Nature, conduite à la suite de scandales liés aux conflits d’intérêts de chercheurs, a montré qu’un tiers environ des chercheurs américains admettent avoir triché d’une manière ou d’une autre.

Ce qui est préoccupant, c’est que la France est en train de prendre le chemin de ces pays. En développant une évaluation de plus en plus quantitative, en mettant en place des primes plus nombreuses et plus importantes, le gouvernement prend le risque d’une augmentation forte des fraudes scientifiques. Et non content d’exposer les individus à ces dispositifs pervers, le gouvernement entreprend de les étendre aux collectifs, avec la mise en place de primes collectives attribuées à des services sur la base d’indicateurs quantitatifs.  L’absurdité de cette politique a pourtant été pointée par des chercheurs comme Maya Beauvallet, dans son livre Les stratégies absurdes, comment faire pire en croyant faire mieux, et plus récemment dans un article consacré justement aux primes collectives paru dans Alternatives économiques. Elle cite un rapport de l’OCDE très négatif sur les primes au mérite, qui peuvent conduire à une démotivation et agir à l’inverse du but poursuivi.
A force de mépris envers les chercheurs, à force de tourner le dos au pacte liant la société à ceux qui créent le savoir, en créant les outils de leur soumission à des impératifs étrangers au véritable développement de la science, le gouvernement nous conduit dans le gouffre de la fraude et du plagiat. Nous pouvons encore prendre le bon virage afin d’éviter le ravin, mais le temps nous est compté.

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