Les moi aussi

Je les appelle les moi aussi et le fonctionnement de leur cerveau m'est une énigme. Leur attitude, la plupart du temps, est assez violente même si elle n'en a pas l'air du tout. Ils veulent tellement se fondre dans le paysage qu'ils le redessinent, parfois à coups de boutoirs.
Les moi aussi ont souvent voire toujours un avis, une position et ils entrent dans les conversations comme on piétine des plate-bandes. Pousse-toi de là que je m'y mette. Le moi aussi n'est souvent pas convié au départ mais il débarque et s'installe.
Les moi aussi, quels que soient le sujet dont on cause autour d'eux, s'arrangent pour entrer dans la danse et veillent à ce qu'ensuite on les voit danser. Parfois, ils créent tellement le vide autour d'eux qu'ils restent seuls en piste. Ils ne ménagent pas leur peine. Consacrent beaucoup d'énergie. Ils ne veulent pas être en reste.
Les moi aussi écoutent quelques instants ce qui se dit, puis s'en mêlent. Ils ont toujours l'anecdote qui va bien, le souvenir qui colle au sujet. Le moi aussi sert de transition et le je fais le reste. Les moi aussi sont tout terrain, ils rivalisent d'inventions.
Si l'on évoque un lieu, ils sont allés, ou pas loin, ou ils connaissent quelqu'un qui.
Si on évoque une souffrance, une maladie, ils l'ont eue, ou pas loin, ou une connaissance à eux...
Si on évoque une personne, ils la connaissent, et si ce n'est pas le cas, c'est du pareil au même.
Les moi aussi ont plus d'une corde dans leur arc et pas mal de variantes. Ils peuvent dire c'est comme moi, ou encore j'ai ceci voire ça me fait penser que moi. Etc.
Les moi aussi sont de toutes saisons et de tous les mois.