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Publications de Sylvestre LE BON (Île Maurice).

Par Ananda


                      Toutes voix confondues

 


Sylvestre Le Bon est né à Maurice. Son amour pour la poésie remonte à l'époque où il poursuivait des études supérieures de lettres. Il a été un des plus jeunes lauréats du prix Pierre Renaud (1996). En 2004, il a donné un choix de vers larges, riches d'images et de pensée dans son recueil de poèmes Ballades d'ici et d'ailleurs (Editions A3, Ivry/Seine). L'auteur retrouve la même maison d'édition pour son nouveau livre de poèmes, Reves en fugue, qui paraîtra d'ici la fin du mois. Nous parlerons ici de ce recueil et d'un texte en prose, l'Absence de noms, paru dans le no. 8 de la revue l'Atelier d'écriture. Deux textes qui par leur tonalité donne à l'auteur une place originale par les choix stylistiques et par les aspects visuels.

Entrer dans la poésie de Sylvestre Le Bon, c'est peut être s'arrêter sur le seuil de son recueil  Reves en fugue , visualiser l'espace du poème qui ramène un fond de mémoire et un vent d'espoir : "C'est ici qu'il venir / A la croisée des tendances et des couleurs/ des parfums des murmures/ respirer l'air trouble du merveilleux incompris/ c'est ici qu'il faut savoir / Mêler sa voix au concert des langues/ Salut Namasté Korek Salam/ Voix tropicales îliennes / Ayant senteur d'épices et de massala/ Couleur des champs de cannes frémissants/ Et des lagons turquoise accent de la ravane/ Allure du Kestrel solitaire... / Ici/ Est appelé à naître un chant nouveau/ Pétri par mémoire des pères/paré de santal et de henné..." Dans son dernier recueil se retrouve tout le lyrisme dont s'est nourri son existence de poète et d'homme public. Lyrisme fait d'amour et d'observation de son île natale. Vers libres hérités de la prosodie mais conservant sa présence : "Et que serait mon chant de poète: Si mes vers ne cascadaient/ Comme la chute de ces reins/ S'ils ne brillaient comme ces sourires/ Cette mer de mages/ Rythme modulé des senteurs d'épices/ Pieds libres, dansants césure ivre/ Portant le secret des mythes... Je ne suis que fils d'une île / Reprenant sur les perrons de la mer Indienne/ Le chant de Boileau et de Hugo/ Rythmant dans la ceinture rimailleuse du ressac/ le dérèglement de Rimbaud... / battant au rythme du balafon/ Sur les pouls de l'Afrique/ Sang rouge sang noir... " Mais du lyrique passionné qu'est Sylvestre Le Bon seule l'expression poétique doit retenir le lecteur : images originales, style déconcertant, héritage littéraire qui rallie différentes voix, absence de ponctuation à la mode chez les poètes aujourd'hui. Sylvestre voyageur qui nous conduit à tous les ports, à toutes les sources : la mer de sable fin, les souffles salés, les saveurs et les odeurs enivrantes n'ont cessé de lui chanter : "Dis-le moi, île/ Voix sans identité/ Si n'étaient romancées / en prose de sable fin/ Les saveurs d'ailleurs/ Et les rumeurs de tes sources/ Soupirs de tes filles délaissées dans les tripots d'Ouessant/ forges assourdissantes près de Bihar / Tam-tam de folie résonnant / Sur les côtes d'Afrique/ Ralliement d'identité..." Des figures se dégagent dans un ouvrage sincère, d'une généreuse et libre inspiration, quelques figures choisies : l'île, la femme, le corps, les poètes aimés et toujours l'exil qu'il faut apprendre "Sur les traces des fils du sol/ Dévalant des perrons d'algues / Pour se désaccorder avec le réveil de l'oiseau-manioc/ le bruissement des filaos sous les rudiments d'écume/ La créolité de la confiture de goyave..."

Répétitions, obsessions dans des poèmes en prose, des blocs de phrase, la poésie de Sylvestre Le Bon se cherche. A chacun de choisir son lieu de lecture.


L'Absence de noms

L'écriture se cherche aussi et se fictionnalise dans l'Absence de noms, texte de Sylvestre Lebon publié dans l'Atelier d'écriture no. 8. Le dispositif mis en place par l'auteur est complexe : le livre dans le livre ouvre des perspectives, emprunte aux structures labyrinthiques. Le texte met en avant la subjectivité d'un parcours et d'une écriture. Ça circule et attire vers des territoires inconnus comme les errances des Bohémiens. Ce sont des petites touches distillées par une voix lontaine qui met le texte en abyme.


Extrait choisi

J'aurai bien aimé le connaître celui-ci. j'ai lu son poème sur la feuille d'un journal qui, je ne sais comment, traînait sous une étagère; C'est en ramassant la feuille que mes yeux sont tombés sur ce poème intitulé "Une âme de Tzigane", et dédié à un certain Antoine. Du coup, j'ai décidé de ne pas ranger la feuille qui devait servir à envelopper les chaussures retapées des clients. L'auteur du texte est un certain Sylvestre Lebon qui témoigne de son admiration pour les Bohémiens et chante la ferveur qui rythme leurs errances et leurs plaisirs. Je l'ai lu à deux reprises avant de me rendre compte que le papier journal datait quand même de quatre années. Et qui était cet Antoine à qui le poème était dédié ? S'agit-il du même que je connais ? car les lieux évoqués dans ce texte - d'une simplicité agréable un tantinet épique - ne sont pas étrangers à ses récits imbibés d'éther : Saintes-maries-de-la-Mer, Andalousie, Bucarest, Rajastan, Sulukule. Dès que je rencontrerai mon vieil ami aventurier, je lui demanderai s'il s'agit bien de lui-même et, si oui, de me faire rencontrer ce Le Bon. Peut-être que ce dernier habite aussi Beau-Bassin.

En tout cas, moi je ne suis pas natif de cette ville et qui n'aspire pas à me fixer à un port d'attache, je dois reconnaître que celle-ci a un charme particulier et qu'elle m'attire. Ce charme doit tenir d'un temps passé où il faisait bon vivre à Beau-Bassin, de ses boutiques et ses magasins qui semblent trahir la marque de l'éphémère, de ses domaines étranges et de ses routes ombragées fuyant vers le silence....

  Source : Magazine Week-End.



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