Londinium

La première fusée s'envola de la roue, disparu dans la nuit, puis réapparu au milieu de nulle part, éparpillant avec fracas sa robe étincelante. Les autres explosifs s'enchaînèrent à une cadence fulgurante, éclatants avec fracas sur le fond ténébreux des cieux nocturnes. Les larmes scintillantes s'effilochèrent en traînées gracieuses, chamarrant Londres de teintes insolites, puis s'estompèrent dans les profondeurs de l'infini. Au cœur de ce déferlement incandescent, London Eye se bariolait de couleurs saisissantes. Un rideau de fumée opaque dissimula bientôt la roue en feu.

De fines gouttes de pluies tentèrent de s'imposer, sans assurance, loin des averses drues dont la ville était coutumière. L'averse pusillanime n’effraya pas les pétards volants, qui imperturbables poursuivirent leur ballet aérien au-dessus du fleuve indécelable.

Soudain, tout s'accéléra. La roue du millénaire crachait tous ses projectiles de feu, jetant à la face de la capitale sa palette entière de couleurs. Les explosions déchirèrent la nuit avec une puissance apocalyptique. London Eye semblait sur le point de s'écrouler et d'être engloutie dans les remous vigoureux et indomptables de la Tamise.

Puis, plus rien. Le silence. Quelques secondes. Des cris. Une exultation primitive. Des applaudissements bruyants. La démence pyrotechnique n'aura durée que dix minutes, mais l'objectif de la nuit avait été atteint sans tergiversation. Défigurer les cieux. Rendre blafards les visages levés vers le ciel. Faire vibrer les âmes. Unir dans un fragment d'éternité la population cosmopolite. La faire rêver à l'unisson.