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Belle-Maman…

Publié le 11 avril 2010 par Lawrence Desrosiers

J’ai toujours aimé ma belle-maman. Madame Deschênes a été douce et bonne pour moi. Parfois, lorsque l’on respecte trop les gens, on a un peu peur de les approcher, de s’ouvrir à eux.

Mon exubérance et ma folie la faisaient bien rigoler; elle riait de bon cœur et était heureuse lorsque je laissais libre cours à mon imaginaire. À 81 ans bien sonnés, elle était une fidèle lectrice de mon blogue. Elle était moderne.

Elle est entrée à l’hôpital le 15 mars, malade et affaiblie. Elle avait un cancer au pancréas. Elle ne pouvait plus manger, surtout à cause de la présence des métastases dans ses intestins.

Au début de son hospitalisation, elle était à l’urgence. J’allais la visiter trois fois par jour. Chaque matin, au milieu de mes randonnées quotidiennes, j’arrêtais m’enquérir de son état de santé; avait-elle de la douleur? Avait-elle mangé? Avait-elle bien dormi? Et je discutais avec elle. J’étais certain que tout allait bien et qu’elle nous reviendrait en santé. Je crois que je rêvais.

Et je retournais en début d’après-midi.

Elle avait parfois de la visite, son amoureux était tout aussi présent que moi. Nous nous partagions le temps en sa compagnie dans la journée. C’était notre mission de retraité.

Puis ils ont amené madame Deschênes dans une salle au troisième étage, afin qu’elle soit soignée dans un endroit plus calme. Elle partageait cet endroit avec trois autres personnes. Je continuais mes visites trois fois par jour. Je me suis fait prendre au piège de l’intérêt de ses paroles et de l’amour.

Elle était tellement sereine, gentille, douce et aimante pour le personnel de l’hôpital, qu’on aurait dit qu’ils voulaient tous se l’approprier, comme moi. Elle remerciait les préposées aux bénéficiaires, les infirmières, les préposés au ménage pour les soins et le travail réalisé pour son mieux-être. De sa voix douce et affaiblie par la maladie, elle tenait inlassablement des propos pleins d’amour, de compassion et de sérénité.

Mes visites s’allongeaient dans le temps, parce qu’elle m’intriguait et m’impressionnait. Sa force morale, malgré qu’elle soit si malade et menue, me renversait. J’étais fier d’être en sa compagnie. Je sentais une aura d’amour et de bonté autour d’elle. Chaque nouvelle personne qui la visitait recevait de l’amour, du vrai, sans clinquant. Je sentais cet état de grâce, j’en faisais partie.

Elle a déménagé à trois autres reprises.

Dans une chambre semi-privée, un jeune homme s’est attaché à elle; lui aussi s’est fait prendre au piège de la sagesse et de la bonté de cette grande dame.

Avant de partir pour la Vallée des Roseaux, elle est restée brièvement dans une chambre privée. Sa santé se dégradait de plus en plus, mais elle trouvait la force de communiquer, de discuter, de prendre soin de ceux qui l’entouraient. Une sorte de processus inversé : la personne en fin de vie qui se préoccupe de ceux qui lui survivront. N’est-ce pas là le plus grand don d’abnégation? N’est-ce pas là la façon de faire d’une maman?

Le temps passé seul avec elle m’a fait grand bien; sa grande bonté a cicatrisé mon âme à tout jamais. Je me sens privilégié d’avoir vécu ses derniers instants en sa compagnie. Mon plus grand regret est de ne pas avoir profité de sa sagesse lorsqu’elle était en forme.

Après son départ, j’ai senti un grand vide, difficile à combler. La présence de ses enfants me fait grand bien, ceux à qui elle a transmis ses valeurs et sa sagesse.

Je te pleure maman Deschênes, tu me manques déjà. Tu es quelque part, en train de distribuer à ceux qui en ont le plus besoin, ta grande sagesse, ta dignité, ta sérénité et surtout, ton amour.

Lawrence


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