Magazine Humour

Expérience sociologique : comment lit le peuple ?

Par Anaïs Valente

Vous savez combien j'aime les expériences sociologiques.Ah oui, j'aime ça.

Dernière expérience en date : "comment lit le peuple ?" 

Outil de travail : un livre puisé au hasard dans ma récente collection (un livre dont je vous ai parlé dans ces colonnes – ça fait magazine cette expression, non ? - titre disponible sur simple demande par mail accompagnée d'un versement de 11,99 eur – tout se monnaie Mesdames et messieurs).

Lieu de l'expérience : la salle d'attente au bureau.Le livre y est déposé bien à vue, au centre d'une antique table d'appoint, histoire de jauger les réactions de la faune humaine qui attend, attend et attend encore.L'attente rend-elle curieux ?L'attente rend-elle somnolent ?L'attente donne-t-elle envie de lire ?

Résultats :

Un premier Monsieur s'en désintéresse totalement, et l'ensevelit sous un tas de magazines puisés dans la réserve, m'obligeant, après son passage, à aller faire le ménage (dieu que j'aime faire le ménage).

Un couple pénètre ensuite dans la salle d'attente : Monsieur jette un œil, feuillette rapidement l'ouvrage, puis l'abandonne, sans doute car il ne comporte pas d'images… Madame, elle, semble intriguée, puis captivée.Elle se plonge dans la lecture.Son GSM sonne, la distrayant.Elle dépose l'ouvrage.Répond au téléphone.Prend ensuite un magazine, oubliant le livre qui la passionnait précédemment.Voilà comment un GSM peut distraire une envie culturelle…

Un Monsieur impatient se présente ensuite : il se plonge immédiatement dans une lecture frénétique, qu'il ne lâchera à regret que lorsque son tour sera venu.

Une Dame semble énormément apprécier l'ouvrage, au point que je la soupçonne de vouloir le dérober.Un coup d'œil à gauche, un coup d'œil à droite… La voie est libre.Elle ébauche un mouvement vers son sac à main, jette un dernier regard aux alentours, puis se ravise, prise de remords ou d'une angoisse soudaine, et redépose enfin l'ouvrage.Bien lui en a pris, je m'apprêtais à prévenir le service de sécurité, non mais, nul ne peut impunément perturber mes expériences sociologiques.

Un Monsieur bedonnant se lance, devant mon livre, dans le nettoyage intégral de sa tenue vestimentaire : et que je frotte, et que je gratte, et que j'époussette.Je n'ose imaginer ce dont il tente de se débarrasser : bébêtes, pellicules, miettes de croissant ?Le tout retombe inévitablement sur la couverture du livre servant, aaaargh, horreur et putréfaction, encore du ménage en perspective.

Et la journée se poursuit, faite de lecteurs captivés qui n'abandonnent l'ouvrage que contraints et forcés, parce que leur tour est venu; de lecteurs désintéressés qui remarquent à peine qu'un joli livre leur fait de l'œil; de lecteurs épuisés qui somnolent béatement dans la salle d'attente; de lecteurs plus intéressés par les derniers potins de la Star Ac ou la dernière collection de sous-vêtements de Loana (mais si, souvenez-vous, la Loft Story Girl qui a fait des choses que la morale réprouve dans une piscine truffée de caméras).

Une expérience sociologique somme toute productive, qui a provoqué chez moi maints fous rires et moments attrayants.C'est l'essentiel…

Vous me direz : comment sais-tu tout ça Anaïs ?Et bien passque j'ai la TV au bureau moi Messieurs-Dames.Une chance hein.Bon c'est toujours la même chaîne un peu monotone "salle d'attente TV", mais ça permet d'observer pas mal de choses.

Crédit photo : Junior Gomes (Stock exchange)

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