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Hier en soirée, documentaire sur la chaîne Planète : MASSACRE ROYAL CHEZ LES MAYAS.

Par Ananda

Cancuén était une cité-état maya de l'âge classique.

Elle est située sur le territoire de l'actuel Guatemala.

Mais, à l'époque de l'Empire Maya, sans être une des grandes cités dominantes de la stature de TIKAL, elle n'en jouissait pas moins d'une prospérité et d'une vie luxueuse au top-niveau du fait de sa position géographique de carrefour des routes commerciales du monde maya.

Les Mayas étaient "des guerriers, des commerçants et des sorciers".

Leurs cités-états étaient, à l'âge classique, gouvernées par des rois au pouvoir immense (sacerdotal et polique) sur les épaules desquels reposaient la prospérité de l'agriculture, de la croissance du maïs sacré et, par là même, la stabilité de la société et du monde. Ces souverains étaient l'émanation d'une classe aristocratique, qui faisait faire à la plèbe tous les travaux pénibles et, par dessus le marché, l'écrasait d'impôts (en nature).

L'époque à laquelle s'intéresse ce documentaire se situe aux alentours de notre an 800.

Une découverte on ne peut plus macabre et "inquiétante" faite sur le site de Cancuén par les archéologues (au fond d'une pièce d'eau asséchée, dans le limon protecteur d'un ancien bassin) atteste qu'à ce moment-là, à quelques pas seulement de l'immense palais royal doté de 200 chambres, a été sauvagement massacré tout un groupe (dans les 80 personnes si mes souvenirs sont bons) constitué non seulement d'hommes, mais aussi de femmes, d'adolescents, d'enfants et même de bébés.

Par qui ? Pour quelles raisons ?

Cela s'apparente à une "enquête policière".

"Une affaire non classée qui a 1000 ans" et qui témoigne, qui plus est, du "plus grand massacre jamais découvert", cela a de quoi intriguer, non ?

Les archéologues pensent d'abord, tout naturellement, a un sacrifice rituel. On sait que les Mayas étaient coutumiers de ce genre de pratique.

Mais, finalement, non...car, horreur, les malheureux présentent tous des squelettes démembrés, ce qui ne cadrait pas du tout avec les rites sacrificiels en vigueur.

Ce qu'il faut savoir, c'est que le carnage s'est produit peu après le décès d'un roi particulièrement charismatique qui a régné une bonne quarantaine d'année. Ce roi était tellement bon "communicateur" que les spécialistes, enthousiastes, le comparent carrément à "une star" : "imaginez la réunion, en un seul homme, de Mick Jagger, de Bill Clinton et du pape Jean-Paul II". Connaissant les attentes de son "public", il n'hésitait pas à organiser des "shows" très spectaculaires et impressionnants au cours desquels il se mutilait sous ses yeux dans le but de faire couler son sang et, ainsi, de marquer son "esprit de sacrifice". Des scènes reconstituées nous restituent l'ambiance de manière très vivante.

Cet homme certes exhibitionniste mais avisé vivait dans un luxe inouï, au milieu des objets les plus précieux qui soient aux yeux de sa culture : le jade et la plume (cette dernière symbole du serpent Quetzalcoatl) mais aussi les colliers de canines de jaguar (*).

Fin diplomate, il nouait des alliances et, de la sorte, consolidait la prospérité de sa cité déjà très riche, dans un univers instable, fragile où la concurrence entre roitelets et cités faisait rage et où l'agriculture (nous l'avons dit, culture du maïs, sur sol calcaire et sans le moindre cours d'eau à disposition) était toujours à la merci du bon vouloir capricieux des pluies.

De suite après la disparition de ce prestigieux leader, c'est un univers entier qui s'écroule.

En effet le fameux massacre coincide avec l'effondrement de tout le monde maya classique.

Alors, qui sont ces malheureux ?

Qui sont ces victimes fuyardes, affolées, coursées, sans défense d'un acharnement, d'une rage brutale qui n'épargna même pas les plus jeunes, poignardés à la gorge par des couteaux de silex ?

On détermine assez rapidement qu'ils sont issus de l'aristocratie.

L'indice principal ? La forme allongée artificiellement vers le haut de toutes les boîtes crâniennes. Cela se faisait dès la plus tendre enfance, parce qu'à cet âge, les plaques osseuses du crâne ne sont pas encore soudées, ni consolidées. On enserrait le haut de la tête de l'enfant entre des pièces de bois, des planchettes, et le tour était joué. C'était une marque d'ordre esthétique et un signe distinctif associé à la caste noble. De même, d'ailleurs, que les dents limées en pointe également retrouvées parmi les victimes.

Plus ça va (nous confient les archéologues), plus ce massacre leur fait penser à des formes beaucoup plus récentes de "génocide" : ils citent "la guerre civile au Guatemala, le massacre du Rwanda ou la Bosnie".

Plus leurs recherches avancent, plus ils commencent à avoir froid dans le dos. Sombre drame, sinistre perspective !

Après celle du sacrifice, on émet l'hypothèse de l'assaut guerrier, lancé par quelque cité rivale. Mais là encore, les preuves manquent; on bat rapidement en retraîte.

L'affaire se corse cependant avec une nouvelle découverte archéologique : tout près du charnier repose une tombe qui, pour être "sommaire", n'en abrite pas moins la dépouille d'un individu paré de jade et entouré de très longues plumes; un roi, le doute n'est plus permis...mais un roi qu'on a inhumé à la va-vite !

Un glyphe que l'on trouve également dans la tombe révèlera son nom. C'est l'héritier direct du grand souverain charismatique cité plus haut.

Qu'est-ce à dire ?

On ne peut, hélas, que se livrer à des conjectures.

Il est plus que probable, par exemple, que le grand roi au règne de 40 ans a été amené, pour entretenir ses alliances avec d'autres cités, à conclure de nombreux mariages (la polygamie n'était, dans cette société comme dans bien d'autres, permise qu'aux nobles et aux hauts dignitaires qui, certes, ne s'en privaient guère). Qui dit nombreux mariages dit, forcément, floppée de descendants (souvenons-nous de Ramsès II). Qui dit floppée de descendants dit grand nombre de gens "d'extraction royale" et, de ce fait, susceptibles de revendiquer le trône.

L'hypothèse  de l'élimination, de l'éradication du roi tout  fraîchement couronné et de sa famille au complet par un ou des princes rivaux de la même cité devient tentante.

"La guerre, la jalousie, le sexe", nous résume l'un des chercheurs.

Ne surtout pas oublier le contexte, de plus en plus chaotique, de surpopulation, de sécheresse, de famines, de cités qui se vident, jetant sur les chemins des milliers de dépossédés encombrants en quête de refuges, de convoîtises sans cesse attisées par les affaiblissements des pouvoirs, vectrices de rivalités et de guerres.

Autre possibilité en de pareils temps très troublés : une révolte de la plèbe pressurée (un peu comme dans le cas de l'Île de Pâques) contre des dignitaires qui n'assurent plus leur mission de protecteurs de l'ordre cosmique (l'ordre cosmique, dans ce contexte, est étroitement lié aux récoltes et à la survie de la société).

Voilà qui porte à méditer sur le déclin des civilisations.

Les Mayas n'avaient-ils pas élaboré une culture brillante, "raffinée", ingénieuse, "à nulle autre pareille" ?

N'avaient-ils pas domestiqué la pierre (sans aucune outil de métal, pour ériger leurs pyramides-temples monumentales), l'eau des pluies (grâce à des systèmes fort élaborés et très astucieux de drainage), l'écriture et  les chiffres (avec le développement de systèmes mathématiques et glyphiques complexes remarquables) ?

A cette queston-exclamation, le commentateur ne peut que - tout ce qu'il y a de plus judicieusement - conclure : "la seule chose que les Mayas n'avaient pas conquis, c'est leur nature".

P.Laranco.

(*)

Le jaguar était le prédateur le plus redoutable de ces jungles d'Amérique Centrale. Le chasser représentait un réel danger, d'où le prix qui était accordé à ses canines, symboles de sa férocité. De plus, la religion des Mayas faisait de lui un dieu du monde souterrain, de l'inframonde, essentiel.


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