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Jour 3 Départ de la piaule du motel vers 8h. Rendez-vous avec...

Publié le 21 avril 2010 par Fabrice @poirpom
Jour 3

Départ de la piaule du motel vers 8h. Rendez-vous avec...

Jour 3

Départ de la piaule du motel vers 8h. Rendez-vous avec le ruisseau de la veille. Qui a pris la confiance. Ce qui était une rigole de pisse hier, se prend pour une rivière aujourd’hui, plus affirmée. Toute aussi joueuse. Jusqu’à la Dordogne qui l’engloutit d’un bloc. Mille autres viendront chatouiller la route, rafraîchir les voyageurs. Qui voient le Cantal s’offrir ainsi à eux. Début de parcours entre eau de source de publicité et flans de colline taillés de plus en plus sauvagement à la machette. Le serpentin de bitume se déroule. Ponctuellement, une épingle vient rappeler une vérité: Dame Nature dicte les choses. Parfois, Elle demande simplement de faire le tour…

Deux solistes croisés sur la route. Un Yam’ FJR 1300. Majestueux. Bruit velouté. Un vaisseau spatial en pleine campagne. Et un Harley. Gros. Lourd. Imperturbable. L’engin fait vibrer la terre. Les deux montures chargées comme des lamas péruviens.

Dans l’Aveyron, Madame la Nature reprend de ses rondeurs. Les formes des collines et monts sont à deux doigts de la sensualité. Des pulls en puissance et des briques de lait sur pattes grignotent mollement la chlorophylle qui s’étale à perte de vue. Et ces routes, courbes et virages qui n’en finissent pas…

A midi, le popotin sur un caillou, les Timberland au bord de l’eau, le sandwich bricolé à la saucisse chevrette a la saveur du liquide amiotique. Simple et fondamental. Genre: source de vie.

À l’approche de Rodez, le paysage change brusquement. Les forêts verdoyantes sont sabrées. Seules persistent quelques petites touffes, crêtes de verdure. L’air est plus sec. La fraîcheur fait la gueule et s’est arrêtée quelques kilomètres plus au nord. Tant pis.

Le temps d’un Perrier rondelle en terrasse à Rodez et retour sur le tarmac. Sur la N88, la chevrette et l’éclair au chocolat du déjeuner de champion font leur effet. Bâillements se répètent. Un panneau indique ‘le trou de balle du monde’. Coup de frein, blocage de roue et bifurcation. À l’arrivée, le susnommé trou est un chemin cahoteux, défoncé par un tracteur. De part et d’autre des tranchées de pneus, il y a du vert et de l’ombre. 100% compatible avec le coup de barre. Le temps de dégrafer l’armure, jeter le cuir sur le gazon et le gazouillis des piafs fait office de berceuse vingt minutes durant.

Retour sur la piste. Chaque poids lourd croisé rappelle qu’une bécane de 200 kg est finalement un convoi bien léger et bien fragile. À quelques kilomètres de l’autoroute, coup de guidon pour se perdre. Routes cabossées et sinueuses, lacs paisibles et bleds assoupis. Et sinusoïdes encore. La route jusqu’à Millau rappelle qu’une bécane de 200 kg est un putain de sex toy monté sur roulettes.

Arrivée à Millau en un souffle, hôtel aseptisé dégoté en un soupir. Il est tôt. Paquetage dégrafé de la monture, retour sur le macadam. Configuration légère. Direction les gorges du Tarn. Un Suzuk’ SV 650 emboîte le pas. Coucou dans le rétro. Réponse de l’intéressé(e). La balade sera tranquille, propre et précise jusqu’à ce qu’il disparaisse dans un camping. Et les Gorges s’installent puissamment. Flotte et chlorophylle. Caillasses colorées du sol au ciel. Ce truc pue la force tranquille. Sauts de puce, pause syndicale. Pas feutrés jusqu’au bord de l’eau. Fraîche. Mais tentante. Hésitation subliminale. L’armure vole. Quelques secondes suffisent avant d’avoir la peau pincée par le Tarn, froid et imperturbable. Cure de rajeunissement accéléré. En sortant, douceur ambiante comme serviette de bain. Quelques minutes de patience, à ècouter tous les craquements et bruissements transportés dans les Gorges. Reprise de la route jusqu’aux Vignes. Traversée du pont et ascension. Sinueuse et joueuse. Les gorges prennent une nouvelle dimension. Sur une échelle de 1 à 10, la puissance du lieu atteint 13947. En haut, il faut redescendre. Lol. D’un côté, un mur. De l’autre, le vide intersidéral. Entre, une poutre. Aussi appelée route. Sorte de GR pour motorisés. Saupoudré de caillasses et de sable. Atterrissage en travers au Truel. Coup de gaz jusqu’au Rozier sur un bitume lisse comme la peau d’un nouveau né, accrocheur comme un atome, large comme une avenue parisienne, sinueux comme un serpent du désert. À pleurer.

Retour à Millau. Dîner sur le pouce. Rapide errance dans la ville avant d’attaquer une nouvelle ascension. Puncho d’Agast. Sur les hauteurs de Millau. Tout en haut. De nuit. Sur une route aussi entretenue que les pavés de la Bastille. Circulation en moins. Dénivelé vertigineux en sus. Une façon d’aller décrocher le pompon de la journée.

Toute cette putain de journée, la même envie: chialer et éclater de rire. À chaque sortie de virage.

Tentatives de suicide involontaires: aucune. Si ce n’est les diverses sessions d’escalade et de randonnée.

Trip partiel cumulé: 1150 km.


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