Les assiettes et couverts font un bruit de cliquetis et de carillon, couvrant à peine le brouhaha des conversations.
Les enfants jouent dans la cour, leurs bras blancs, dénudés, voltigent en tous sens, sous les premiers rayons du soleil d’été. Parfois, un adulte émerge à la lumière, les yeux plissés, appelle un enfant, remet un chapeau en place, disparaît de nouveau, comme happé, accueilli par des exclamations joyeuses.
Il est de ces journées où il fait bon n’être qu’un enfant, et se contenter de grappiller dans une assiette à peine entamée.
Il est de ces journées où les chaises deviennent dures à force de se dandiner dessus, à force de vouloir être ailleurs, à force de sourire.
Il est de ces journées où le dessert à la fraise a un goût de dîner, où les paroles, les regards, masquent si mal les contrariétés, les disparités.
Il est de ces journées où l’on se retrouve par habitude, par envie, pour une date, ou pour faire plaisir.
Les enfants ne courent plus dans la cour. Un bébé s’est endormi sur le canapé. La journée s’épuise, doucement, tandis que des mains récupèrent des sacs, attachent des ceintures, claquent des portières de voiture.
Il est de ces journées qui laissent un goût amer, paradoxal, de turbulence joyeuse et de profonde solitude.