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Le degré zéro de la politique

Publié le 28 avril 2010 par Hermes
Le degré zéro de la politique
Bien sûr que cette burqa est obsessionnalisée par le pouvoir. Mais elle l’est tout autant par cette minuscule secte islamiste qui accroît ainsi sa visibilité. On renforce donc sa force de propagande. Et dire que ce ne serait qu’un effet du sarkozime, c’est ne pas lire la presse internationale et attribuer au Président une « qualité » qu ’il n’a pas : De façon brouillonne, à son habitude, il se contente de tirer les ficelles – plus elles sont grosses, plus ça lui convient – et d’aboyer plus fort que les autres pour se donner l’illusion d’être le Maître du Monde.
La sagesse imposerait donc de cesser de faire écho à quelques faits divers : souffler sur les braises ne fait qu’attiser le feu, surtout que ces braises sont récoltées dans la pire des presses, celle qui se vautre dans ces poubelles où l’on exhume un événement rare et peu significatif pour en faire ce qui entre au cœur du débat démocratique.
Avec un peu de recul, il est pourtant facile de comprendre que toute société, à toute époque, a besoin de produire sa « négativité », celle qui lui permet d’avancer même si elle s’exprime rageusement dans l’immédiat, même si elle révulse ceux qui sont sans mémoire et prennent les signes de révolte comme une menace de mort.
Cette négativité s’apparente à cette « part maudite » qu’évoquait Georges Bataille. Elle est constitutive des échanges d’u groupe social donné, lequel , en dépit de l’idéal républicain, est fragmenté en tribus avec leurs signes respectifs, jeunes ou vieux, hommes et femmes, des différences acceptables parce qu’elles sont « naturelles » mais qui deviennent insupportables quand elles touchent au culturel et à la révolte qui en jaillit.
Oui, il y a bien aujourd’hui, la barbe islamique, la burqa et tout cet accoutrement de cirque. En d’autres époques la minijupe et les cheveux longs portaient une autre contestation . Comme les graffitis ou le piercing ; mais tout s’absorbe par le temps qui légifère aussi bien que les hommes. Les signes de la normalité s’affichent tout autant et rentrent même parfois en collision avec eux. Le crocodile Lacoste, le logo du faux luxe ou du Mac Do révèlent la schizophrénie des banlieues ; Désir impensé d’être à la fois dedans et dehors, d’être dans la normalité mais avec la révolte.
On a là les symptômes classiques d’une crise d’adolescence pour ce que certains voudraient lire comme une fin de l’Histoire.
Mais il y a surtout le paradoxe d’une société qui a poussé l’individualisme à ses limites jusqu’à extraire celui-ci de ses besoins naturels pour le projeter dans ce virtuel, dans une forme d’ "Odyssée de l’Espace" à la Kubrik.
L’individu se raccroche alors à ces signes pour retrouver le groupe, s’inventer une société qui, pour lui, a fait faillite.D’autant plus que, autre paradoxe, cet individu tellement adulé, est relégué hors de tout espace social. Les lieux publics sont sous l’œil des caméras, les routes radardisées, les fumeurs sont jetés à la rue, la parole individuelle est contrainte de se soumettre à la doxa d’une morale faite sur mesure pour l’ordre marchand.
Qu’on ne s’étonne pas, quand tout « dérapage » est aussitôt judiciarisé, que le refoulé revienne dans toute sa négativité dans le vote extrémiste - qu’il soit politique ou religieux.
Cette liberté qui s’effrite est porteuse d’excès et conduit à l’affrontement. Plutôt que mettre de l’huile sur le feu, nos médias et nos politiques devraient s’attacher, sans angélisme, à créer de nouvelles solidarités. La France a peur ? Et alors ? C’est en dépassant ses peurs qu’on grandit.
La tolérance zéro ne sera jamais que le degré zéro de la politique.

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