...et c'est rien de le dire!
J'ai souvenir qu'à sa sortie, j'ai boudé honteusement ce qui me semblait n'être qu'un énième blockbuster dégoulinant de clichés cartoonesques usant et abusant des séquences pétaradantes en veux-tu en voilà et alignant comme nombre de ses confrères marvelesques (Spiderman, Les 4 fantastiques, Superman...) les théories manicchéennes à deux ronds et autres banalités affligeantes de naïveté. Les précédentes adaptations de comics m'avaient échaudé et, en ce temps-là (hélas pas si lointain), Robert Downey Jr et moi ne nous connaissions pas encore très bien. Aujourd'hui, ce n'est toujours pas le cas, d'un point de vue purement et douloureusement réaliste, pragmatique et littéral mais, d'un point de vue cinématographique, c'est clairement le grand amour.
"Je suis vraiment loin d'avoir l'étoffe d'un héros..."
On aura beau dire tout ce que l'on veut - que le scénario s'en sort mieux que bien, que le tout est rythmé, cadencé, réglé comme une pendule à protons, que les effets spéciaux dépotent, que les séquences d'action sont parfaitement calibrées, que la bande son est à se damner - si Iron Man carbure, c'est avant tout grâce à son role-lead. Je ne connaissais pas l'existence de ce type avant le film - les comics, moi... - mais assurément, si on me l'avait présenté, j'aurais immédiatement raffolé de ce mec. Autant Peter Parker n'est que l'ombre de Spiderman, autant Tony Stark, lui, est bel et bien le maître de son double, qu'il ne revendique d'ailleurs pas comme tel, mais comme une "extension" de lui-même. Le véritable phénomène n'est pas tant, ici, l'armure qu'est Iron Man que le milliardaire à l'origine de celle-ci.
Incarnation du rêve américain, jet-setteur déjanté, richissime bambin héritier d'un empire à la pointe de la technologie équipant l'armée des Etats Unis, capricieux égocentrique et génie ambitieux, Tony Stark a tout pour agacer, plaire... et défrayer la chronique. On adhère forcément à l'ensemble de son histoire tant elle reste accessible - dans la mesure où l'on croit aux grosses fortunes et aux progrès technologiques - et parfaitement ancrée dans le réel. Le premier point fort de ce "super-héros", c'est qu'il n'a pas le moindre pouvoir... hormis celui, puissant, que lui confère son portefeuille. De suite, cela le rend plus crédible, plus "proche", le faisant lorgner d'avantage vers un James Bond ou, plus pertinemment, vers un Batman que vers un Hulk. Ici, pas d'expérience foireuse ayant mal tournée, juste de la physique, de l'analogique... et de la mécanique.
La personnalité de Stark y fait beaucoup. Arrogant mais charmant, capricieux mais cabotin, narcissique mais un brin dépressif sur les bords, l'anti-héros est attachant, à l'image de son interprète, qui réutilise et tourne en dérision nombre d'aspects de sa propre vie pour mieux donner corps à Stark. Inutile de vous préciser que, bien évidemment, sa prestation est tout bonnement exceptionnelle (à l'instar de tout ce qu'il fait, d'ailleurs! Hum. Je m'égare...). Le jeu et le charisme naturel de Robert Downey Jr font ici merveille, sous-tendant l'ensemble de l'intrigue, pourtant bien ficelée, de bout en bout, magistral... en toute impartialité cela s'entend.
Ce qui achève de faire de cet Iron Man un véritable phénomène, c'est le fait que, d'emblée, on ne nous le présente pas comme un vengeur masqué volant à la rescousse de la veuve et de l'orphelin. Non. Tony Stark n'est pas un héros, loin s'en faut, et ne se revendique d'ailleurs pas comme tel, si ce n'est, à l'occasion, pour flatter son propre ego. Il est donc logique que son armure ne le transfigure pas à chaque fois qu'il l'enfile en bon samaritain. S'il peut rendre service et sauver les miches d'un ou deux quidam au passage, il ne s'en privera pas mais, sa logique à lui est toute industrielle. Il souhaite faire barrage à ce qu'il a lui-même entretenu pendant des années: un armement massif ayant atterit dans de mauvaises mains. Son but est d'inverser la vapeur, pas d'éprouver de grandes théories stériles sur la paix dans le monde. Et c'est là que ça devient franchement fédérateur. Parce que pertinent.
"Vous m'avez déjà surpris à faire pire que ça..."
Jon Favreau - qui, au passage, a tout mon respect, tant pour sa belle créativité que pour ses apparitions réjouissantes à l'écran - a fait mieux que de laisser son role-lead s'éclater devant la caméra. Il a donné une direction captivante à l'ensemble de son histoire. Certes, on se trouve face à un blockbuster en puissance. Il en a toutes les balises. Excepté que la franchise Iron Man, elle, joue la carte de la dérision plus souvent qu'à son tour, offrant une distanciation raffraîchissante par rapport aux adaptations classiques de comics se prenant bien souvent trop au sérieux dans un contexte risible. Là, le problème ne se pose jamais, tant tout se justifie soit logiquement, soit par auto-dérision.
L'autre très bonne idée, c'est de crédibiliser au maximum le spectacle. Ainsi, si Iron man a des adversaires, ils sont bel et bien faits de chair et de sang, pétris d'idéaux pour le moins discutables, poussés par la cupidité ou la quête de pouvoir, comme tous bon despotes en devenir, mais avec, toujours, cette crédibilité en toile de fond. Pas de petits hommes verts ou de tempête de sable ambulante, rien que du concret. Un rien high-tech, un poil plus théatraux que des terroristes lambda certes, mais concrets. La méga bonne idée était de baser la génèse de Iron Man lors d'un séjour forcé en Afghanistan. De suite, ça donne le ton. Et, en prime, c'est super bien mis en scène. Du très bon, quoi.
Enfin, le fait de nous exposer les différentes étapes de création d'Iron Man achève de faire ce ce héros Marvel le plus vraisemblable. Les essais de l'armure figurent d'ailleurs parmi les séquences les plus tripantes du film.
En prime, un casting fort sympatoche, avec un méga coup de coeur pour miss Pepper Potts (Gwyneth Paltrow) et l'apparition de l'agent Phil Coulson (Clark Gregg) détaché par le Shield...
En somme, j'ai eu la sensation de me trouver devant un bon gros divertissement, éprouvant un certain plaisir coupable à "kiffer", tout en restant dans quelque chose de plutôt mature, pour le coup. De l'entertainment de haute voltige, harmonieux, l'abêtissement en moins.
En bref, au rayon adaptation de comic-book, je classerais celui-ci juste après les Batman de Nolan - et ce qui me connaissent savent que c'est un très gros compliment - pour son atypisme dans le domaine tout en restant fidèle à certains codes du genre, pour sa classe éffrontée, son fun éhonté, et sa maturité infantile (j'aime les termes antithétiques). Ah, et pour Downey Jr, évidemment! Mais, avais-je encore besoin de le rappeler?
I'm lovin' it!
*Indice de satisfaction: (-)
*2h05 - américain - by Jon Favreau - 2008
*Cast: Robert Downey Jr., Gwyneth Paltrow, Terrence Howard, Jeff Bridges, Clark Gregg, Jon Favreau...
*Genre: L'homme au masque de fer...
*Les + : Fun, fun, fun. Robert Downey Jr. Méga fun. Du feel good movie dopé à la testostérone et au bling-bling. So cool.
*Les - : Doit-on vraiment chipoter sur les quelques baisses de régimes ici et là? Franchement?
*Liens: Fiche film Allocine
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