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Ne plus ouvrir les volets, jamais !

Publié le 10 janvier 2010 par Perce-Neige
Ne plus ouvrir les volets, jamais !
J’adore, pour ce qu’il suggère de souvenirs, de fugitifs bonheurs, ce texte de Sylvie Robic dans « Les doigts écorchés » (Editions Naïve) : « C'est l'été 79, il doit faire très beau dehors. On est tous les deux avec Bruno, dans le noir de la chambre. On a décidé de ne plus ouvrir les volets. On écoute très fort, extatiques, « No More Heroes » des Stranglers. D'en bas montent faiblement des exclamations exaspérées, suraiguës. On désespère maman. Maman n'a pas la force ou la sagesse de comprendre que le rock, c'est en partie fait pour ça. Le rock a été inventé pour sortir le, petits garçons des prisons des caresses maternelles. Le rock est une guerre inévitable pour échapper à sa mère. À l’amour et à la haine de sa mère. C 'est sûrement pourquoi on fait comme si on ne l'entendait pas. Même quand elle hurle en tambourinant à la porte. D'ailleurs on ne l'entend pas. On est absorbés dévorés par la musique. La musique se met à nous définir entièrement. Tout ça, c'est grâce à Jean-Pierre. Il est plus vieux, il a déjà passé son bac, il est en première année de fac de lettres à Grenoble, il s'est fait plein de nouveaux potes. Jean-Pierre nous raconte l’histoire d'une de ses idoles, le New-Yorkais Richard Hell qui, dès 74, invente l'imagerie punk. Ça ne nous empêche pas de préférer les Anglais à Television. Jean-Pierre a remisé ses oripeaux baba pour un look plus straight. Nous qui n'en n'avions pas, de look, on commence à saisir l'importance d'une bonne panoplie. Notamment auprès des filles. Nous aussi, Contre l'avis de maman, on se coupe les cheveux très courts, sans miroir, pour mieux ressembler à Rimbaud. C'est à ce moment que la guerre contre maman se déclare vraiment. Dans le noir de la chambre, déchiré par la basse et les hurlements de Jean-Jacques Burnel, je rêve de la prochaine boum du lycée, je rêve d'y étrenner le tee-shirt que j'ai savamment lacéré en cachette. Il me faut d'urgence une paire de lunettes noires en plastique, quelques épingles à nourrice. Et surtout un blouson de cuir. » Bon sang, quel vertige… Lire absolument ce roman. Et puis se jeter sur quelques CD oubliés. Le reste importe peu, vous verrez.

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