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Accroissement de la sécurité sanitaire, cheval de Troie de la libre concurrence européenne ?

Publié le 10 mai 2010 par Tnlavie

Accroissement de la sécurité sanitaire, cheval de Troie de la libre concurrence européenne ?

Si l’on en croit le communiqué de presse de la Commission européenne, c’est la sécurité des patients qui est à l’origine de la création d’une banque de données européenne relative aux dispositifs médicaux, destinée à renforcer la surveillance du marché.

Une décision, adoptée par la Commission européenne il y a une quinzaine de jours, impose à tous les pays de l’Union d’utiliser, à partir de mai 2011, une banque de données européenne sur les dispositifs médicaux répondant au nom d’Eudamed. Les dispositifs médicaux couvrent des milliers de types de produits utilisés pour le diagnostic, la prévention et le traitement : stimulateurs cardiaques, prothèses de hanche, appareils à rayons X, seringues ou… analyses sanguines. Bien que ces dispositifs soient commercialisés sur le marché unique européen, les données essentielles à leur sécurité, comme les certificats de conformité ou les données relatives aux investigations cliniques, n’étaient jusqu’à présent que collectées au niveau national. « La banque de données Eudamed est un outil informatique sécurisé qui garantira aux autorités de surveillance du marché un accès rapide aux données en question. Du point de vue des fabricants, la banque de données contribuera également à simplifier les règles concernant la mise sur le marché de dispositifs de diagnostic in vitro ».

John Dalli, commissaire à la santé et à la politique des consommateurs, a déclaré: «La décision adoptée aujourd’hui est une bonne nouvelle pour les patients de toute l’Union. Elle participera à une plus grande sécurité de ces derniers en fournissant aux autorités nationales un accès rapide aux données critiques».

Les dispositifs médicaux conformes à la législation européenne peuvent être commercialisés sur le marché unique de l’Union. Toutefois, à l’heure actuelle, les données importantes (par exemple les données concernant les certificats de conformité, y compris ceux ayant fait l’objet d’un retrait ou d’un refus, les données relatives aux investigations cliniques ou les rapports de dysfonctionnement ou d’incident) concernant la sécurité des dispositifs sont collectées au niveau national et ne sont partagées que manuellement. On ne peut que se réjouir que soient ainsi rendues publiques les données relatives aux incidents d’exploitation, permettant de réduire le risque d’incidents récurrents dans le reste de l’Union.

Ce qui est un peu plus gênant, et ceci, nous l’apprenons en visitant la page d’accueil de cette nouvelle entité, puisqu’il semble que les motivations de cette décision semblent être finalement plus guidées par des enjeux économiques que de santé publique.

Comme c’est étonnant…

« Eudamed éliminera en effet les obstacles administratifs pour les fabricants de dispositifs de diagnostic in vitro en facilitant le processus d’enregistrement ». Actuellement, les fabricants doivent informer séparément chaque pays de l’UE concerné lors de la mise sur le marché de certains de ces dispositifs, ce qui est long et couteux et nécessite de multiples expertises.

Pour la Commission européenne, sous le faux nez du progrès technologique « Les dispositifs médicaux sont en constante évolution. Dans le secteur de la santé, les citoyens et la société en général peuvent bénéficier directement du progrès technologique et l’innovation ». on distingue d’autres impératifs « Eudamed aidera à s’assurer que les patients continuent de bénéficier de soins de santé de qualité et d’un niveau élevé de protection sanitaire, en vérifiant que des lois ou des réglementations nationales ne compromettent pas la libre circulation des dispositifs médicaux dans le marché intérieur. »

Soyons clair, le libre échange va donc être renforcé et le commerce facilité dans le domaine de la santé, secteur sensible où l’on sait que les États ont encore un semblant de souveraineté qui entrave parfois les visées commerciales des uns ou des autres.

Une nouvelle fois, après avoir donné l’impression aux citoyens que la défense de la santé publique était au cœur du dispositif, c’est l’élément économique sur lequel on insiste. En simplifiant les démarches de mise sur le marché des dispositifs médicaux, on fait faire de grosses économies aux fabricants, mais surtout la Commission européenne leur évite de devoir affronter les autorités de santé des pays les plus stricts quand il est justement question de sécurité, procédé pourtant dénoncé depuis plusieurs années par de nombreux défenseurs de la santé publique.

À l’heure où, sans aucun contrôle ou entrave, les dispositifs médicaux, comme les lentilles de contact ou leurs produits d’entretien, sont en vente libre sur Internet, où l’on peut sans difficulté trouver de quoi faire des tests MST rapides sur le net, il est étonnant de voir que les décisions censées assurer une meilleure protection de la santé publique ne soient prises qu’après que le volet purement commercial de libre concurrence ait été mis en place.

Bien loin devant la défense de la santé publique, le leitmotiv semble donc  bien être de « ne surtout pas entraver le commerce »…

Un refrain que les jeunes biologistes commencent à bien connaitre



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