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Quand Paris est sa banlieue rencontre Pariphérie

Publié le 04 décembre 2007 par Jean-Paul Chapon

Au bord de la route on fait du stop,
On abandonne son chien,
On soulage une envie pressante,
On vend des fruits de saison,
On se prostitue quelque que soit la saison,
On cueille des fleurs et des champignons,
On dépose des bouquets funéraires pour ne pas oublier,
On jette ses déchets par la fenêtre sans même y penser.

On pourrait dire que le bas-côté est à la route ce que la périphérie est à Paris : une marge, un espace en retrait, que l’on croit connaître sans jamais prendre le temps de la regarder, de l’apprécier.

C’est par ces lignes que débute le numéro 3 de Pariphérie, la revue de la Suburbia. Cette revue est un ensemble d’articles écrits par les étudiants de 5ème année d’architecture du séminaire Pariphérie : approches de la métropole, animé par Valéry Didelon et François Béguin à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles, l’ENSA-V. Mercredi dernier Paris est sa banlieue était invité à participer à un atelier de ce séminaire, trois heures de rencontres et de discussion autour du thème de la Ville. Un de ces moments trop rares d’échanges agréables et passionnants. De l’a priori sur la banlieue à la notion de monument, la « démocratie du sommeil » et les limites de la ville, Le Mans doit-il être inclus dans une réflexion sur le Grand-Paris, représentation de la ville, ville et non-ville. Trois heures que je recommencerai volontiers à la première occasion ;-)

Pariphérie, c’est un séminaire qui revisite le regard sur la Ville ou réapprend à la voir. La description précise que « l’objectif final de cet enseignement est la fabrication par le groupe d’étudiants d’une publication sur la métropole parisienne. »  Il s’agit d’un travail collectif de recherche fonctionnant en atelier, « qui cherche à dresser un portrait du Paris contemporain rompant avec les représentations établies » et à « renouveler son regard sur les rapports qui se tissent entre centre et périphérie… sur leur hybridation, des échanges entre culture urbaine et suburbaine ou de la circulation entre modèles académiques et figures génériques. »

En support du travail des 15 étudiantes et étudiants du séminaire Pariphérie une marche d’observation, un itinéraire à définir, puis la marche en elle-même en avril dernier, de la gare du RER de Lieusaint dans la ville nouvelle de Sénart, première étape à Draveil, deuxième à Thiais avant d’arriver à Paris. Grande couronne, petite couronne, franchissement des trois remparts Francilenne, A86 et Périphérique, 60 km de marche parcourus en trois jour de la grande couronne parisienne au point kilométrique 0, le parvis de Notre-Dame, pour une observation « des franges de la métropole parisienne à son cœur »… avec une approche pluridisciplinaire, « sciences humaines et sociales, architecture et urbanisme » et « plan, relevé architectural, observation ethnographique, mais aussi littérature, photographie, entretiens, etc.»

Je reviendrai plus en détail sur les différents articles de la revue de la Suburbia. Un exemple pour montrer le type de travail, tiré de Cartographie mentale du plan de réseau ferré d’Ile-de-France *. Trente personnes, de Paris et de banlieue, ont été abordées et on leur a demandé de « dessiner leur vision personnelle du plan de réseau de transport en commun de l’Ile-de-France ». Malgré la faible taille de l’échantillon, les résultats de la démarche sont particulièrement intéressants, avec la limite de Paris présente dans 2 dessins sur 3 et une représentation de la centralité dans près de 1 dessin sur 2. Sans trop de surprise, on constate que « l’habitant des environs de Paris à quelques exceptions près, a une vision assez étendue de ce réseau, contrairement à son voisin parisien. » Plus intéressant sur la notion de métropole «  puisqu’une frontière est majoritairement présente entre Paris et sa périphérie, c’est donc le signe que la notion de réseau est incomplète. Servant de connexion des territoires entre eux, la perception idéale du réseau Ile-de-France ne devrait pas marquer de distinction entre un centre et une périphérie. » On remarque ainsi dans les cartes publiées par la revue, la différence entre une première carte très complète d’un habitant de Conflans-Sainte-Honorine qui ne montre pas les limites de Paris mais celle de la « centralité », celle d’une jeune fille de banlieue étudiante à Paris mais ne montre aucune limite administrative mais simplement le réseau tel qu’elle l’utilise, et celle d’une parisienne intra-muros dont la vie professionnelle et sociale se situent à Paris et qui précise « périphérique » sur sa carte.

Au cours de notre discussion la semaine dernière, Valéry Didelon me fait remarquer que les urbanistes sont absents de Paris est sa banlieue, peut-être suggère-t-il parce qu’ils sont particulièrement absents du débat sur la Ville et la notion de métropole, en tout cas en France ? D’où l’idée du séminaire Pariphérie, approches de la métropole qui visiblement prépare bien la relève et sur lequel je reviendrai encore, avec par exemple un article décapant  Monuments de la Pariphérie : « pour » des miniatures de l’échangeur Pompadour dans les boutiques souvenirs.

à suivre…

Jean-Paul Chapon

* Les 15 articles du numéro 3 de la Revue de la Suburbia :

· Au bord de la route - Salwa Bouchareb
· Evolution et déplacement de la surface commerciale – Pétar Stéfanov
· Paysages sonores, quelles représentations ? – Hélène Préchac
· Cartographie mentale du plan de réseau ferré d’Ile-de-France – Bérénice Béhaghel
· La banlieue dans la culture populaire : une évolution des stéréotypes entre les années 1950 et 1990 – Pierre Guyot
· Plug-in City – Paul Bouvier
· Concurrences, quand l’architecture se substitue à la ville – Benoît Fiton
· Localisation et thématisation des supports publicitaires de trois villes – Clélie Protière
· Les banlieues en représentations : jeux d’échelles – Naïk Lasherme
· Monuments de la pariphérie – Isabelle Guillon
· Décodage des voies périphériques – Daphnée Courthiade
· Les enjeux de la mobilité – Jérôme Leclerc
· Le marché d’intérêt national au sein du pôle Orly-Rungis – Etienne Mares
· Domesticity – Thomas Dantec
· La place du Vélo en Hollande et à Paris – Marine Demandre

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