"Vous savez quelle date on est aujourd'hui... Non ce n'est pas vraiment mon anniversaire mais il y a 68 ans aujourd'hui, en 1942 je rentrais à la sécu, c'était mon premier poste... Je m'en rappelle comme si c'était hier... D'ailleurs le premier matin quand j'ai vu la montagne de papier à trier à midi j'ai dit à ma mère "c'est pas possible j'y retourne plus!!!" alors elle a souri et puis elle m'a dit "essaye au moins un jour ou deux" et puis finalement j'y suis resté... Mais c'était une drôle d'époque quand même... Il y avait les allemands alors on n'allait pas au cinéma, on n'allait pas danser... Parce qu'on ne voulait pas s'amuser à coté d'eux...Du coup avec les amis de la bande on se retrouvait dans les bois pour faire des pique-nique... Il n'y avait que ça à faire... Ça et puis de temps en temps il y avait la foire... Vous savez à l'époque la sécu était rue *** juste à coté de la place *** alors quand il y avait la foire on sortait tous un peu plus tôt et on y allait tous ensemble, tout le service, s'amuser un peu... Ça c'était bien... Et puis en plus il y avait les gars du groupe Todt (ndlr le STO) qui étaient chez nous... Ceux là alors... "une bombe, je vais mettre une bombe ici" qu'il hurlait le chef, ça rigolait pas... Enfin, vous savez si j'avais du avoir peur chaque fois qu'on nous a menacé de tout et n'importe quoi hein, dans ma carrière...
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Mais enfin les allemands je ne les aimais pas... La première fois que je les ai vu, je m'en souviendrai toujours, j'étais avec une amie dans la rue et on a vu arriver une grosse moto avec un allemand dessus alors on s'est mise à courir comme des folles pour rentrer chez nous... Chez moi ma mère à sourit et elle m'a dit "Enfin ils ne vont pas te mitrailler dans la rue voyons!" mais bon j'étais pas rassurée... Et puis un autre jour les hitlerjungen ont défilé dans la ville et se sont regroupés sur la place ***, là, je ne sais pas ce qu'il a fait mais il y a un chef qui a enlevé sa ceinture et s'est mit à taper comme un fou sur un jeune... Le pauvre il est tombé par terre mais même à terre le chef continuait de le frapper comme un fou... Non vraiment j'aimais pas les allemands... Enfin, c'était une drôle d'époque hein? "