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Trois chevaux blancs (Jean Joubert)

Par Arbrealettres

Trois chevaux blancs (Jean Joubert)


Trois chevaux blancs sous ma fenêtre
paissent le champ de la morte
où les oliviers s’embroussaillent.

Elle disait: “J’ai vu, la nuit,
votre chat noir sur la crête du toit,
contre la lune.”
Elle croisait ses doigts pour conjurer,
brûlait des cierges, flairait la mort,
lisait dans l’insomnie les saints et les sorcières.

Elle disait, serrant les poings contre sa ventre:
“J’ai un feu, là, qui me brûle.”

Elle mourut dans un décembre de lumière,
fut portée jusqu’aux cyprès de la colline
où l’attendait la pierre qu’elle avait dessinée.

Sous ma fenêtre, elle avait fait planter
un peuplier,
pour la beauté des feuilles, du murmure,

que, lui aussi, le feu brûla,
et qui mourut.

Les chevaux paissent entre les ronces
hennissent, montrent les dents,
agitent leurs crinières.

Je les entends, la nuit,
au pied de la muraille,
qui rêvent et respirent,
tout près,
comme si nous partagions le même lit,
nos corps mêlés,
nos yeux pleins de fantômes et de larmes.

(Jean Joubert)



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