La pénibilité du travail fait l'objet d'une passe d'armes à fleurets mouchetés entre PMA et A perdre la raison. Le premier ne voit pas pourquoi le travail d'une standardiste serait moins pénible que celui d'un ouvrier de chantier, le second relève que non seulement l'espérance de vie des ouvriers est moindre mais que de surcroît, une part plus importante de leur existence professionnelle se déroule avec une incapacité physique ou psychique. Je vais les mettre tous les deux d'accord, puisque je ne suis d'accord ni avec l'un, ni avec l'autre. Il y a dans les statistiques publiées par Melclalex (A perdre la raison) un élément manquant à mes yeux : j'aimerais connaître l'espérance de vie non selon la catégorie socio-professionnelle, mais selon le niveau d'éducation (en termes scolaires, pour être précis). Notamment, l'espérance de vie dépend d'autres facteurs que la catégorie socio-professionnelle : hygiène de vie, génétique, sédentarité, et cetera...Faudra-t-il pondérer le calcul des retraites selon ces critères ? Si l'on évoque l'équité, est-il équitable de pénaliser selon la génétique, un critère que l'on en choisit vraiment pas, pour le compte, ceux qui naissent avec une constitution plus fragile ? Car voilà où nous en arriverions si nous ne tenions pas compte de ce critère. A l'inverse, est-il juste de faire peser sur toute une génération le choix de consommer alcool et tabac qui obèrent lourdement l'espérance de vie indépendamment de toute considération socio-professionnelle ?
On le voit, avec la pénibilité, on va ouvrir la boîte de Pandore. On pourrait gloser aussi sur les chiffres donnés pour les inactifs, dans le tableau de Melclalex, qui en font les individus les plus exposés à la maladie et à la mort précoce.
Au fait, dans la mythologie grecque, Pandore, l'épouse d'Épiméthée (le frère de Prométhée), ouvre le cadeau empoisonné que les dieux ont préparé pour les hommes. On y trouve tous les maux, et je crois bien qu'un certain d'entre eux nous affectent sur nos vieux jours. Il ne reste plus qu'une petite créature ailée quand Pandore s'avise de son erreur : l'espérance...
Sur le fond, je suis plus proche de l'interrogation de PMA que des conclusions Melclalex, mais, pas de ses conclusions : la pénibilité est un critère, dès lors qu'on admet qu'il faille le prendre en compte, il ne devra pas être le seul, au risque, dans le cas contraire, de dénaturer le désir originel de justice qui y prélude. Tiens, Nicolas va peut-être devoir attendre avant d'ouvrir sa prochaine canette ; s'il a écrit sa précédente note sur le sujet d'un trait, il a du avoir très soif après. Sa note péchait à mon avis par un travers : c'est de l'agrément ou non d'une tache que Nicolas traitait alors, et non de la pénibilité au sens de ses implications sur la vie physiologique d'un individu, ce qui n'empêchait pas un certain nombre de réflexions de bon sens de sa part sur le sujet.
Pour conclure et sur ce point, bien que l'entreprise soit risquée, tant les critères seront difficiles à établir, cela me semblait fort sage, dans un premier temps, dans la 9ème proposition du gouvernement, de ne tenir compte de la pénibilité du travail selon un «suivi personnalisé de la carrière des travailleurs et non sur la définition a priori de catégories professionnelles.»
