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En Belgique, la fin du vote obligatoire n’est pas pour demain

Publié le 20 mai 2010 par François Collette

Le vote est obligatoire en Belgique depuis 1893, quand fut instauré le suffrage universel plural… pour les citoyens masculins. Les raisons d’alors étaient évidemment liées à la démocratisation du pays. Plus d’un siècle plus tard (117 ans), les temps ont bien changé. Alors, à qui profite le crime ? 

La Belgique reste avec le Luxembourg et la Grèce l’un des trois derniers pays européens à imposer aux citoyens l’obligation de voter. Soi-disant, pour certains intellos bien-pensants mais surtout et avec une belle dose d’hypocrisie pour les tenants politiques du système, par « souci de démocratie ». Souci de démocratie ? Comme à l’origine, en 1893, où la majorité de la population était illettrée et dominée par la bourgeoisie friquée ? Il faudrait tout de même qu’on m’explique sans langue de bois. Décider de ne pas voter est un acte politique justement lié à la démocratie. Partout ailleurs, le citoyen a le choix de se rendre ou non aux urnes. Les pays voisins seraient-ils moins démocratiques que le royaume d’Albert II ?

En fait, les raisons du maintien de l’obligation de voter sont exclusivement politiques dans ce pays taraudé par la particratie. C’est le fruit d’un vieux modus vivendi quasi unanime entre les partis politiques qui tiennent fermement à cette manne d’électeurs obligés qu’ils ne doivent pas convaincre d’aller voter. Les partis traditionnels, tous peu ou prou clientélistes, profitent largement du système où le citoyen lambda, totalement déboussolé, vote plus par tradition que par conviction politique, se moquant du quart et du reste des « programmes » de gouvernement. Quant aux partis radicaux de Flandre (N-VA, Vlaams Belang) et de Wallonie (Ecolo), ils héritent des mécontents de plus en plus nombreux qui expriment ainsi leur rejet des compromis et des compromissions qui polluent la vie politique. 

Ce n’est donc pas demain que les Belges auront le choix de voter ou de ne pas voter. Les quelques récentes velléités des libéraux flamands (Open VLD), relayées par quelques intrépides libéraux francophones isolés dans leur parti (MR), ont fait l’effet d’un pétard mouillé. Tant que la classe politique belge restera ce qu’elle est, conservatrice et particrate, rien ne changera au niveau de la loi électorale.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’obligation de voter n’est pas un barrage à l’abstentionnisme. En hausse continuelle, il frôlait les 10 pc aux dernières élections régionales (environ 600.000 personnes !) et il y a fort à parier que le phénomène progressera considérablement le 13 juin prochain depuis que tout le monde sait que les « inciviques » ne sont plus poursuivis depuis 2003. Pour la petite histoire, un mouvement de protestation à l’encontre du monde politique s’est créé sur l’Internet, d’abord en néerlandais avant de devenir bilingue, pour clamer aux élus de tous bords que les citoyens ne sont pas tous des moutons : « Ik stem niet – Je ne vote pas ». Symbolique, peut-être, mais symptomatique du fossé creusé entre les citoyens et le monde politique. 

Les électeurs ont les élus et les coalitions gouvernementales qu’ils méritent. Le vote obligatoire en reste le garant. Moi, en tout cas, je ne vote pas et je le revendique !


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