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« Fiscal », un faux-ami

Publié le 24 mai 2010 par Lecriducontribuable

À lire, cet article d’« Aux innocents les mains vides » qui fait écho à celui de Roman Bernard : « Régulation : le faux-ami anglais ».

Le mot « fiscal » est un des nombreux faux ami de la langue Anglaise. Comme « actually » qui veut dire « en réalité » ou « eventually » qui veut dire « finalement », « fiscal policy » en Anglais ne veut pas dire « politique fiscale » mais « politique budgétaire » !

Si l’on se réfère à la définition de Wikipedia, la « fiscal policy » signifie d’abord s’occuper des dépenses puis des recettes… Ainsi quand la BCE ou la Commission Européenne s’expriment en anglais, nos journalistes traduisent les consignes de MM Trichet ou Baroso comme une invitation à l’augmentation des impôts alors qu’ils appellent simplement à une discipline budgétaire absolument nécessaire si l’on veut éviter d’appauvrir nos enfant et petits-enfants pour des décennies !

L’Etat Français a, à la fois, une dette égale à 6 fois ses recettes fiscales annuelles (chacun reconnaitra que c’est plus impressionnant que ~100% du PIB) et le taux de dépenses publiques le plus élevé des grands pays de l’OCDE (les seules exceptions étant la Suède et le Danemark, 2 « petits » pays avec une conscience de la responsabilité collective très différente de la notre).

Notre « fiscal policy » ne peut donc être centrée sur l’augmentation des impôts et le débat anecdotique sur le « bouclier fiscal » l’illustre fort bien: il coûte 800 millions d’euros et représente donc moins de 0,5% de notre déficit 2009 (qui est de 165 milliards d’euros) et moins de 2% du coût annuel de notre dette (qui est de 42 milliards d’euros) ! On peut bien sûr le supprimer pour signifier de façon définitive à tous Français résidents et non résidents que l’instabilité fiscale est une « règle d’or » en France. On ne ferait, ce faisant, qu’extraire le contenu d’une petite cuillère d’une immense marmite de déficit et de dette.

Il y a sûrement des « niches fiscales » à l’efficacité contestable ou à la vertu obsolète. Supprimons-les ou rabotons-les, on trouvera des cuillères à soupe et quelques louchettes toujours misérables en contenance par rapport à la taille de la fameuse marmite !

Si l’on veut s’attaquer à vraiment vider la marmite avec comme unité de mesure la bassine ou la casserole, il faut s’attaquer aux dépenses comme sont en train de le faire nos malheureux partenaires Hellènes qui, en supprimant un 13ème mois à leurs fonctionnaires, y vont à coup de 7-8% sur une dépense certaine et colossale, celles des salaires et retraites des fonctionnaires…

Pour ne pas faire long, je citerais deux pistes de type « bassine »:

  • la dette de l’Etat Français est pour un gros quart ou petit tiers constituée de la retraite des fonctionnaires (déjà retraités ou futurs retraités). Celle-ci est toujours calculée sur la base du dernier traitement (et non sur la moyenne des 25 meilleurs années pour les salariés du secteur privé). Mettre en place un « discount » de 5% pour les plus petites à 20% pour les plus grosses retraites du secteur public tant que la France n’est pas revenue dans les clous de Maastricht ne paraîtrait pas idiot. Nos retraités encourageraient sûrement à plus de vertu budgétaire leurs collègues toujours en activité ! Passer progressivement de la dernière année à la moyenne des 25 dernières (ou meilleures ce qui doit revenir au même) années pour ceux qui n’y sont pas encore, paraît également ponctué du meilleur bon sens… Il faudra 10 ans pour « lisser » les effets d’une transition de ce type mais l’évidence de la mesure en terme d’équité et d’efficacité budgétaire devrait en faire un « no brainer » !
  • les rémunérations dans le secteur public (fonctionnaires d’Etat, des collectivités territoriales ou de l’administration hospitalière) comprennent des tonnes de primes diverses et variées, collectives ou pseudo-individualisées… En suspendre le paiement ou les « discounter » fortement tant que la France n’est pas revenue dans les clous de Maastricht ressemblerait à la décision prise par toute entreprise en difficulté qui supprime les bonus ou les primes de fin d’année le temps de retrouver une meilleure santé financière. Peut-être cela créera-t-il même parmi nos concitoyens fonctionnaires une conscience des coûts qui permettrait d’aller plus vite dans la chasse au gaspillage ou dans l’évitement de la surenchère à l’embauche de nouveaux fonctionnaires qui semble être le leitmotiv central de nos syndicats et la marotte quasi-obsessionnelle de nos élus locaux.

J’entendais Jacques Attali récemment dire qu’un gouvernement responsable et non démagogique aurait beaucoup plus de chances d’être reconduit en 2012 car les Français sont « raisonnables » et ont donc compris l’ampleur du drame « fiscal » (en Anglais !) que nous vivons. Prions pour que l’ex-sherpa de François Mitterrand arrive à convaincre notre Sarko national de s’armer d’une bassine ou de plusieurs casseroles plutôt que de petites cuillères fussent-elles en argent…

(Source)


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