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Défense et illustration de Miss Univers (5)

Publié le 30 mai 2010 par Zebrain
Humaine, tout simpement

belial093-2009.jpg Tout au long de sa carrière, Joëlle Wintrebert s'est interrogée sur la nature humaine. Ses textes les plus forts sont ceux où elle pousse le plus loin l'expérimentation de nouvelles structures sociales, intellectuelles et sexuelles. Et toujours, le problème insoluble des rapports et relations entre hommes et femmes revient au premier plan, même lorsqu'elle fait intervenir des créatures hermaphrodites ou parthénogénétique, même lorsqu'elle aborde le monde théoriquement désexualisé de l'enfance.

Sa vision globale, que cet article a tenté de cerner, procède d'une démarche tout autant psychologique que politique. La militante et la femme de lettres mènent un même combat, et toutes deux s'intéressent avant tout à l'être humain. Appartenant à la génération qui a pleinement vécu la remise en question du rôle des deux sexes, Joëlle Wintrebert a su tirer parti de la liberté procurée par la Science-Fiction pour extrapoler en ce sens. Et ce sujet d'une grande richesse lui a fourni la matière d'une bonne partie de son oeuvre, des Olympiades truquées à Chromoville, de L'Océanide au Créateur chimérique, de Pollen aux Amazones de Bohême. Il n'est pas étonnant que beaucoup des textes cités plus haut se répondent les uns aux autres, présentant souvent des versions différentes d'un même thème. Les hétaïres de Chromoville renvoient aux visioputes de Bébé-Miroir, dont la fillette de « Sans appel » n'est pas très éloignée, et l'on pourrait aussi évoquer l'enfance violée de Danna dans Les Amazones de Bohême. Les traitements que subissent les sportives des Olympiades truquées, poussés à bout dans leur logique, peuvent très bien déboucher sur les pondeuses décérébrées de Chromoville. Il ne s'agit pas ici de répétition, mais d'approches multiples ; le thème de l'exploitation, qui revient fréquemment, concerne des victimes différentes : enfants, femmes, humains mutés, créatures extraterrestres... Et la suppression des différences, de quelque type qu'elles soient, ne résout en rien ce problème fondamental ; la solution, si solution il y a, réside dans l'acceptation sociale de ces mêmes différences sans qu'elles deviennent pour autant source de discrimination.

En tant que femme, Joëlle Wintrebert a dû se heurter à bon nombre des obstacles que rencontrent ses semblables dans un monde qui, s'il a évolué au cours du XXe siècle, demeure malgré tout un monde d'hommes. C'est peut-être également pour cette raison qu'elle a choisi la Science-Fiction pour s'exprimer, parce qu'il s'agissait d'un domaine où la prépondérance masculine était presque caricaturale, comme on l'a vu au début de cet article. Un domaine à conquérir.

Notre société demande aux femmes, bien plus encore qu'aux hommes, de prouver leur valeur. Il me semble que Joëlle Wintrebert y a réussi, accomplissant le tour de force de prouver qu'elle était avant tout un écrivain.

Un être humain.

Roland C. Wagner

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