Poème dédié à Sylvestre Le Bon, mon cousin
Saurais-je jamais si je suis
d'Inde ou de France ?
Ne le crois.
C'est si difficile, ma foi,
ce me semble, d'être
métis.
Je le sais fort bien, maintenant,
je serais
toujours partagée,
incapable de faire choix,
en quête
d'unification.
Toujours, je ressentirais ça,
ce va-et-vient, ce mouvement
pendulaire de balancier,
cet équilibre
sur un fil.
Sans jamais d'arraisonnement,
je continuerai
mon chemin
hasardeux entre les grands blocs
d'identité, portant en mon
intimité tout l'incertain,
tout le flou de ma condition,
de mes deux pôles ballottés
qui me divisent en deux camps,
qui me condamnent sans merci
ni remède à mon nomadisme.
Presque rien...
juste cela :
cette attente innommée, sans but,
ce manque, qui creuse
l'écart
à peine s'en aperçoit-on.
La plupart du temps on l'oublie,
on le relègue au second plan,
dans l'arrière-plan de la vie,
en lisière de ce qui est.
Presque rien...
si ce n'est
ce hic,
ce tout mince fissurement
cette lézarde au trait si fin
qui va son chemin
sans bruit.
Non, rien
qu'un chuchotement,
qu'un sussurement qui surgit
d'on ne sait où, de nulle part,
de quelque vide sous-jacent.
Peut-être...une hallucination
mauvais tour de l'absurdité,
un zeste palimpseste de
béance dénuée de sens ?
Qu'y voir ?
L'ombre de nos désirs,
de nos soupirs d'incomplétude ?
Patricia Laranco.