Magazine Humeur

Le sexe et la norme

Publié le 07 juin 2010 par Anthonynaar
Le sexe et la norme
J’ai envie de vous parler de Sex and the City. Pourquoi ? Et bien, parce qu’après trois semaines à voir Sarah Jessica Parker en une robe de grand couturier hideuse sur les murs, j’ai finit par développer deux ou trois idées sur le sujet. Et que dans la mesure où je tiens un blog, autant que je vous en fasse profiter.
En jetant un coup d’œil aux critiques disponibles sur Allociné, j’ai vu que l’Humanité avait qualifiée la série d’impertinente, et il est globalement considéré que Sex and the City est une série libertine, bref, sacrément anticonformiste et subversif.
Sauf que comme toute personne ayant deux neurones en état de fonctionner peut le remarquer, Sex and the City est tout sauf impertinent, tout sauf subversif, et on ne peut plus conformiste. Faire une série où quatre femmes parlent de sexe à longueur de temps aurait certes été anticonformiste dans les années 60, seulement voilà, la société a évolué depuis et il est considéré comme normal que les femmes aient une vie sexuelle épanouie, il est même considéré comme normal qu’elles en parlent entre elles, au même titre que les hommes. Sex and the City se contente de « théoriser » la norme de l’époque.
Remarquez, ce n’est pas un crime, une œuvre grand public ne peut tout simplement pas se permettre d’être réellement anticonformiste, dans la mesure du fait où il faut qu’elle rapporte de l’argent, et donc qu’elle se conforme aux désirs d’un groupe suffisamment large pour que les investisseurs soient contents.
L’exemple type du fait qu’une série est obligé de se conformer à la norme culturelle de son temps, c’est 24 heures chrono : les premières saisons, diffusées à l’heure du bushisme triomphant, de la guerre contre le terrorisme et du défonçage de gueule de l’Irak, n’hésitaient pas à montrer un Jack Bauer torturant des terroristes pour leur faire avouer la localisation d’une bombe nucléaire, et ne suscitaient aucune critique « éthique ». Or, quelques années plus tard, alors que l’aventure irakienne s’est transformée en quasi-fiasco sauvé in-extremis par le général Petraeus et que les photos d’Abou Grahib ont horrifiées l’Amérique et le monde, les gens se sont mis à critiquer 24 heures chrono, justement pour avoir justifié la torture dans ses premières saisons.
Bref, tout ça pour dire que Sex and the City est le conformisme à l’état pur. Des femmes aisées, cultivées, urbaines, sans enfants, qui se soucient d’abord et avant tout de leur vie sexuelle : c’est cela la norme d’aujourd’hui. Au lieu de s’appeler Le sexe et la ville, la série aurait très bien pu s’appeler Le sexe et la norme.
Mais il y a un point où Sex and the City aurait pu être anticonformiste, un point primordial en plus : c’est son actrice principale.
Oui, parce que ce qui saute aux yeux quand on découvre la série, c’est que Sarah Jessica Parker n’est pas un canon de beauté. Son visage n’est absolument pas attirant. Et ça pour le coup, dans le paysage audiovisuel mondial, peuplée de femmes irréelles de beauté, c’est franchement subversif. Mettre une femme normale comme actrice principale d’une série à succès, c’est pour le moins exceptionnel.
Sauf que.
Sauf qu’au lieu de jouer sur l’aspect humain de Sarah Jessica Parker, les créateurs de la série ont tout fait pour l’effacer. Ils ont voulu la rendre parfaite comme toutes les autres actrices, à coup de régime, de sport et de je ne sais quoi.
Le résultat ? Désastreux.
Franchement, regardez les affiches de Sex and the City 2 et osez dire que cette fille n’est pas immonde. Immonde, non pas à cause de son corps retouché et de ses robes qu’on ne porte que dans la Jet-Set. Immonde, non pas à cause de son visage normal. Non, si elle paraît immonde, c’est à cause de l’alliance des deux, qui donne un résultat révulsant.
Sarah Jessica Parker avait la réalité de son physique. Les autres actrices ont l’inhumanité du leur. A vouloir mixer les deux, Sarah Jessica Parker n’a plus rien. Ni la réalité, ni l’irréalité. Elle n’est plus une femme normale, qu’on peut apprécier, toucher, aimer. Elle ne sera jamais une femme anormale qu’on peut regarder, envier, et sur laquelle on peut fantasmer.
Enfin bref.
Tout ça pour dire que le seul aspect de Sex and the City qui aurait pu être anticonformiste a été gommé jusqu’au ridicule.
Si vous voulez de la vraie femme, allez voir là. C’est bourré de défauts, la lumière est mauvaise, il y a des bourrelets et les marques du bronzage, mais au moins, ce corps est réel.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Anthonynaar 74 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazines