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FME, plan de secours et loi de Gresham…

Publié le 09 juin 2010 par Copeau @Contrepoints

FME, plan de secours et loi de Gresham…

Il y a quelques mois, plusieurs économistes proposaient la création d'un Fonds Monétaire Européen (FME) dont la mission serait d'encadrer, de contrôler et d'accompagner les dépenses des Etats Membres. Aujourd'hui, nous assistons à la création d'une coopération entre l'UE et le FMI pour mettre en place un « plan de secours » qui soutiendrait les Etats Membres en difficulté.

Qu'on l'appelle FME ou plan de secours, le système est le même ; une forme d'assurance pour les Etats dont la mauvaise gestion a entrainé une perte de crédibilité sur les marchés financiers. Et lorsqu'on parle d'assurance, l'économiste a toujours un mot à dire. Il rappelle que l'assurance donne lieu à un problème d'aléa moral.

L'aléa moral, c'est le fait qu'une fois assuré, on ne supporte plus totalement le risque qu'on prend. Ainsi, le conducteur qui s'assure fera moins attention à sa voiture, le propriétaire d'un objet assuré sera incité à prendre moins de précaution lorsqu'il l'utilise. Les assureurs ont trouvé une parade, en utilisant un système de bonus-malus et en distinguant les catégories d'individus selon leur comportement plus ou moins risqué (primes différentes selon les classes d'âge, l'état de santé, et proposition de différents contrats d'assurance).

Cependant, lorsqu'on « assure » un pays, de tels mécanismes d'incitation sont plus difficiles à mettre en œuvre (c'est toute la problématique de l'élaboration d'un plan de rigueur pour la Grèce en contrepartie d'une aide). En effet, il faut tenir compte de la réponse des marchés à l'annonce d'un tel plan et de ce fait, il est souvent nécessaire d'assurer l'Etat quoiqu'il arrive, c'est-à-dire, même s'il ne respecte pas ses engagements (après tout, quel pays respecte même le Pacte de Stabilité ?)

Le mécanisme d'assurance ne fonctionne donc pas parfaitement, laissant une grande marge de manœuvre aux Etats dans la gestion future de leur dette et de leurs politiques économiques. Fort de ce constat, nous pouvons nous risquer à une prévision quant à l'avenir des Etats de l'UE. Il y a fort à parier qu'on retrouve un phénomène bien connu des économistes : la Loi de Gresham.

Cette loi explique que lorsque deux monnaies (or et argent) circule sur le même territoire, la monnaie la plus faible, la plus risquée (historiquement l'argent) chasse la bonne (l'or). La raison est simple : les individus préfèrent conserver la monnaie dont la valeur s'apprécie dans le temps (celle qui a le plus grand pouvoir d'achat) et utilisent alors la mauvaise monnaie pour leurs transactions courantes, gardant à l'esprit qu'il vaut mieux avoir de l'or pour l'échanger plus tard en argent, puisque la valeur de l'or sera de plus en plus grande.

Cette réaction naturelle des individus va donc conduire à un abandon d'une monnaie stable (la stabilité est nécessaire pour que les entrepreneurs osent investir) et une utilisation d'une monnaie risquée.

Quel lien avec l'UE dans laquelle une seule monnaie circule ? Et bien on pourrait dire que la loi réapparaît d'une nouvelle manière, quelque peu inattendue.

En assurant les « mauvais Etats », ces derniers sont incités à conserver une mauvaise gestion au détriment des Etat rigoureux qui paieront le laxisme des premiers. Ainsi, l'ensemble des Etats va être incité à agir avec laxisme puisqu'il existe une assurance d'une part, et qu'il faut éviter d'être le bon qui paie pour les mauvais d'autre part…

Ici, la loi de Gresham pourrait donc être résumer de la manière suivante : ce n'est pas la mauvaise monnaie qui chasse la bonne, c'est la mauvaise gestion des Etats qui chasse la bonne !

Deux conclusions peuvent être tirées de ce constat : premièrement, si l'on veut « aider » les Etats Membres en difficulté, il faut accepter d'avoir un contrôle de plus en plus centralisé au niveau européen, c'est-à-dire un abandon de ce qu'il reste de souveraineté nationale. Deuxièmement, l'adoption d'une monnaie unique n'a pas réglé les problèmes monétaires en Europe, elle a simplement déplacé le problème du plan monétaire au plan budgétaire. En d'autres termes, « chasser le marché par la porte, il revient par la fenêtre »…


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