Les ambassadeurs de l’armée de l’Air …et de la France.
La voltige : Ťconduisant aux limites de l’utilisation, elle permet au pilote d’acquérir jugement et précision, souplesse et fermeté, connaissance totale de la machine et de ses marges, et finalement l’aisance et l’agressivité indispensables au combat ŕ haute altitude comme ŕ la mission de pénétration ŕ trčs basse altitude et ŕ grande vitesse. Pour l’enchaînement des exercices qu’elle exécute, la patrouille, elle, présente un véritable et merveilleux ballet aérien qui subjugue les spectateurs par l’élégance de ses arabesquesť. Ainsi s’exprimait le regretté général Bernard Capillon, chef d’état-major de l’armée de l’Air et ancien chef de la Patrouille de France (1).
Ces propos résument mieux qu’un long discours les sentiments venus ŕ l’esprit des téléspectateurs de France 2 qui ont regardé la derničre émission ŤVivement dimancheť de Michel Drucker, consacrée tout entičre ŕ la ŤPAFť. Une émission délicieusement Ťpeopleť, ŕ la limite du publi-reportage au profit de l’armée de l’Air, mais aussi une émission riche de trčs belles images. On en voit trop rarement de pareilles aux heures dites de grandes écoute sur une grande chaîne généraliste de télévision et il se justifiait d’autant plus de le souligner.
On a vu ŕ l’écran trois vedettes, dans le désordre l’équipe soudée de pilotes d’élite, leur nouveau chef, le commandant Virginie Guyot et Carla Bruni-Sarkozy, l’épouse du chef de l’Etat (2). Sans l’oublier l’infatigable Alpha Jet dont la silhouette ne vieillit pas et se marie parfaitement bien avec l’exigence de qualité d’un patrouille qui joue le rôle délicat d’ambassadeur de l’armée et de l’Air et, trčs souvent, ŕ l’étranger, de la France tout entičre.
Premičre femme ŕ avoir pris la tęte de la PAF, pas nécessairement trčs ŕ l’aise hors de son cockpit, face aux caméras, elle donne un visage au savoir-faire, ŕ la compétence, au sérieux qui caractérisent les pilotes, tous les pilotes. Elle parle (évidemment) bien de son métier, qui rime avec passion. Et chacun lui sait gré d’avoir mentionné au passage le souvenir ému de la souriante Caroline Aigle, qui fut la premičre femme française pilote de chasse, arrachée il y a trois ans, ŕ 32 ans ŕ peine, aux siens et au monde de l’aviation par la faute d’une maladie fulgurante.
Les patrouilles acrobatiques sont toutes fascinantes. Les plus modestes au męme titre que celles dotées d’appareils performants, encore que rarement trčs récents. On pense, par exemple, aux Red Arrows britanniques, aux Frecce Tricolori italiens qui contribuent aussi ŕ animer de grands meetings aériens malheureusement devenus trop rares. Leur rôle va bien au-delŕ des repčres mentionnés habituellement : en mettant en évidence le talent de pilotes, ces équipes préservent la touche d’humanité qui perd du terrain, qui fait de plus en plus défaut ŕ un monde envahi, mangé par la technologie.
On n’ose męme plus penser ŕ l’avenir. L’Alphajet aura probablement un successeur, tôt ou tard. Mais ŕ quelles missions préparera-t-il les équipages qui en prendront les commandes si d’inhumains UAV (Uninhabited Aerial Vehicle) prennent la succession des avions de combat ? Toute la persévérance sans cesse recommencée qui a commencé avec Maryse Bastié pour aboutir aujourd’hui ŕ Virginie Guyot risque-t-elle d’ętre perdue ŕ tout jamais ? Vivrons-nous un scénario rappelant celui de Ť2001 Odyssée de l’espaceť, en vrai, cette fois ?
Il est ŕ peine trop tôt pour se poser la question. Entre-temps, assistons aux meetings aériens, précipitons-nous vers les pilotes, rappelons-leur qu’ils sont les héritiers d’un passé prestigieux, les détenteurs de valeurs uniques et irremplaçables. Une lourde responsabilité que la PAF assume avec brio.
Pierre Sparaco - AeroMorning
(1) Dans la préface de ŤVoltiges aériennesť, trčs bel ouvrage du photographe Alain Ernoult, aux éditions Atlas/Xavier Richer.
(2) Notre illustration : la Premičre Dame de France et le commandant Virginie Guyot photographiés ŕ Salon-de-Provence (Photo: Sirpa Air).