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Belgique, l’autre crise européenne

Publié le 14 juin 2010 par Hmoreigne

  

Victoire de la peur de perdre son identité, défaite de la solidarité et du vivre ensemble, les élections qui viennent de se dérouler en Belgique ce week-end résonnent comme un coup de tonnerre dans le ciel européen. Quand l’un des pays fondateurs de la construction européenne se déchire, c’est tout le rêve européen qui vacille.


La Belgique a la peau dure” déclarait ce matin en Français sur France Inter  Hermann de Croo, Ancien Ministre d’Etat, député fédéral flamand du parti libéral (open VLD). Volontairement très rassurant, le parlementaire esquisse un régionalisme dans lequel “plus on ouvre les fenêtres de la mondialisation, plus on se replie dans le coin de la pièce“. Une sorte de grand retour en arrière dans un territoire marqué historiquement par le poids des municipalités.

Cette tentation du repli portée par un refus d’appartenir à une communauté de destin au motif qu’on en refuse la solidarité qu’elle sous-tend, marque un coup d’arrêt à une intégration européenne qu’on pensait inexorable, et une atteinte encore inimaginable il y a quelques mois à l’utopie européenne. Le 9 mai dernier on célébrait le 60ème anniversaire de la déclaration solennelle de Jean Monnet qui invitait “tous les pays intéressés à poser les premières bases concrètes d’une fédération européenne.

Simple fédération marchande dont l’obésité liée aux élargissements successifs n’est pas sans rappeler l’obésité de l’Empire Romain,l’Union Européenne bute sur des structures politiques qui la condamnent à l’impotence et demeure orpheline de trois éléments sous estimés : une gouvernance (économique et politique), une langue et une citoyenneté.

Les sujets de l’Empire romain avaient le latin, et pour certains la citoyenneté. Les Européens du XXIéme siècle, par défaut et en catimini, s’orientent vers l’anglais et ne voient pas se profiler en dehors du simple affichage du passeport une citoyenneté européenne.

L’idée européenne est en panne, faute de chefs d’Etat ou d’Eurocrates susceptibles de la conceptualiser. Ne pas avancer c’est reculer. C’est le destin que l’on réserve à l’UE si on accepte l’idée que des nations puissent être vouées à “l’évaporation”, terme trompeur volontairement évoqué dans le cas Belge par le leader flamand Bart De Weever.

Fin stratège, le leader de la Nouvelle Alliance flamande (N-VA), le parti séparatiste flamand n’a pas choisi l’expression au hasard. Sous une image soigneusement construite d’homme patient et modéré, Bart De Wever a pour but la création d’une Flandre indépendante directement membre à part entière de l’Union européenne.

Le retour, somme toute à, la notion de Hanse, ces associations de villes marchandes du moyen-âge. Bart Eeckhout, dans le quotidien du plat pays De Morgen, décrypte la méthode employée. Le journaliste relève que l’idée d’étape intermédiaire avancée dans le démantèlement via le confédéralisme est un leurre. “Les nationalistes flamands, les libéraux et les chrétiens-démocrates voudraient aujourd’hui nous faire croire qu’ils vont réussir, au lendemain du 13 juin, à transformer pacifiquement et démocratiquement un système fédéral ayant une histoire de près d’un demi-siècle pour en faire une confédération. C’est ce qu’on appelle du charlatanisme pur et dur“.

L’éditorialiste estime qu’ “il n’existe nulle part dans le monde un pays confédéral stable et actif, à savoir une alliance entre des entités nationales fédérées qui décident ensemble de former un Etat. Le confédéralisme se termine soit par une refédéralisation, comme en Suisse, soit par la division d’un pays. Vers un confédéralisme comme but ultime, comme l’expliquent les partis flamands ? Jamais à ce jour un pays existant n’a réussi à se démanteler pour réussir à former un modèle confédéral viable“.

Pourquoi alors évoquer ce confédéralisme impossible ? Bart Eeckhout apporte une réponse simple :”vous ne gagnez pas des élections avec cette idée séparatiste ou en tout cas vous ne devenez pas le plus grand parti du pays en prônant la fin de ce même pays“. 

Signe des temps, c’est cette Belgique à la recherche de son destin perdu qui assumera la présidence de l’UE le 1er juillet prochain.


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