Qui aurait cru que l’énergie solaire, en tant que source propre inépuisable d’énergie ferait un jour polémique ? Et cela se passe aux Etats-Unis, la grande puissance montante de l’énergie solaire. La volonté du gouvernement est de doubler la production d’énergie renouvelable des Etats-Unis d’ici à trois ans au moment où le secteur est en phase de surproduction et alors que la baisse du crédit et la baisse du prix du pétrole remettent en question nombre de projets dans l’électricité solaire.
Barack Obama a lancé un projet pour la création de grandes centrales solaires notamment dans le désert des Mojave une des zones les plus ensoleillées du monde, en engageant plus d’une vingtaine d’études de faisabilité, politique qui satisfait les grands groupes environnementaux.
Le problème provient du fait que les études de faisabilité demandées par Obama sont loin de faire l’unanimité, essentiellement parmi les associations locales et une véritable guerre de l’information est en train de voir le jour.
La Chambre de Commerce de Las Vegas, sous la pression d’associations écologistes, a demandé à des experts de l’industrie du solaire de mettre à jour les problématiques entourant le front de l’énergie renouvelable au-delà de 2010 et le résultat est sans appel : les conséquences de cette activité ont des effets néfastes sur notre écosystème et sur l’environnement. Le désert des Mojave devient ainsi le théâtre d’une polémique entre les défenseurs de l’environnement et les industriels du solaire.
L’un des principaux défauts de centrales thermosolaires classiques est de nécessiter une grande quantité d’eau douce somme source froide. Des dizaines de millions de litres d’eau sont nécessaires au bon fonctionnement d’une centrale, les panneaux devant être nettoyés régulièrement à base d’eau, et ce d’autant plus dans le désert où les miroirs ont tendance à être exposés au sable. Un projet de centrale au Nevada a estimé qu’il lui faudrait 5 milliards de litres d’eau par an, autrement dit près de 20% de la consommation totale d’eau de la région. Depuis, le projet, qui avait fait l’unanimité au départ, est bloqué.
Suite aux pressions des lobbies écologistes, Solar Trust Of America, via l’Allemand Solar Millenium, est en passe de construire une centrale thermosolaire dans le Nevada qui va recourir à un système de refroidissement sec (aspiration de l’air). Et ceci même si cette technologie conduit à diminuer le rendement énergétique de la centrale et donc à entraîner un coût du kWh thermosolaire plus élevé (une partie de la production électrique est utilisée pour aspirer l’air, et le refroidissement à air est bien moins efficace que le refroidissement avec de l’eau douce).
La présence de centrales solaires a également des conséquences sur l’environnement. L’association Wildlands Conservancy soutenue par l’une des personnalités politiques le plus influentes de Californie, la sénatrice démocrate Diane Feinstein s’est mobilisée auprès du Bureau of Land Management au nom de la protection des tortues du désert. Il a pourtant été prouvé que la présence de centrales solaires aurait peu d’incidences sur les animaux du désert. L’association fait actuellement pression sur le Bureau of Land Management, chargé d’attribuer les permis de construire, pour qu’il n’accorde des permis qu’aux projets qui s’implanteront dans des zones fréquentées.
Diane Feinstein a présenté, à la mi-décembre 2009, une proposition de loi destinée à protéger des millions d’hectares du désert du Mojave. Ce texte supposerait de renoncer aux quelques 13 centrales solaires et parcs éoliens qui devaient être implantés dans la région. Que le texte soit adopté ou non, son initiative compromet l’implantation de nouvelles centrales dans la zone des monuments nationaux. Elle vient donc s’opposer frontalement au gouverneur Arnold Schwarzenegger, le défenseur de la lutte contre le réchauffement climatique car elle possède un moyen de pression non négligeable : elle dirige la sous-commission sénatoriale qui contrôle le budget du ministère de l’Intérieur, un poste qui lui donne une influence importante sur le domaine foncier fédéral.
Les élections au poste de gouverneur seront lancées dès le mois de novembre prochain et l’ombre de Diane Feinstein plane pour briguer ce poste. Nous comprenons mieux la mobilisation du milieu politique dans cette affaire.
Ce débat, au nom du « désert désert », révèle une contradiction inédite au sein du milieu écologiste américain : concilier préservation des natures vierges avec les ambitieux projets de lutte contre le réchauffement climatique. Au nom de l’environnement, tout est permis afin de mener une campagne électorale d’envergure.
Marie-Anne Cervoni