L'éducation est aussi une mise au monde en tant qu'individu sexué. J'avais déjà émis, sur ce média, mon intime conviction de devoir préparer notre fils à la sexualité, aussi. Lui expliquer ce que c'est que la fécondation comme là, l'amener à avoir les informations sur les "mécanismes amoureux" (pas de notre bouche en tous cas). Oui bien-sûr! Mais encore plus un apprentissage d'un corps à corps. Allez je m'explique avant que vous partiez outrés sans lire la suite.
(ce livre philosophique pour enfants méritera bien-sur d'autres billets)
La sexualité n'est pour moi que la résultante d'une apposition des corps, que mise en tension, qu'une approche, qu'une attention, qu'un respect. La sexualité est aussi une identité sexuelle. L'éducation "sexuelle" est alors constituée de nombreux autres éléments bien plus importants qu'une indication d'imbrication :
- un respect du corps, du sien et de celui des autres: ne pas être touché, cela a commencé par ne pas être chatouillé avant que le lutin puisse lui aussi, en retour, nous chatouiller, mais cela a été ne pas être embrassé à outrance bébé (bercé, pris dans les bras, remis dans sa verticalité sur ma hanche, oui, souvent, à la moindre demande, au moindre besoin), ne pas être câliné sans consentement et ne pas accepté d'être touché parce que plus petit. J'avais beaucoup aimé le livre « Respecte mon corps » du Docteur Catherine DOLTO à ce sujet.
- un apprentissage de la proximité: Nous sommes en plein dedans avec une petite copine de classe qui agresse avec toute son affection le petit d'homme. Elle court au devant, le prend dans ses bras de force, l'embrasse avec effusion. Le chenapan est toujours stupéfait et en souffre. La coquine, même reprise, même stoppée dans son don d'amour, ne comprend pas, reste en manque. L'apprentissage de la proximité à l'autre se met en place même avant 4 ans! Se recentrer avant d'aller vers l'autre mais aussi respecter un espace vital, une bulle de promiscuité non-possible sans consentement. L'espace vital réduit, celui des proches, des très proches, concrétisé par un ballon de baudruche entre eux-deux, un ballon qu'il ne faut pas éclater mais qui peut être tenu que par les deux ventres, une sorte de chorégraphie, de douceur et de dynamique pour ne pas agresser la bulle vitale...
- une éducation à la sensualité: savoir faire la différence dans les touchers, caresser, frôler, taper, pincer, toquer, chatouiller, gratter, modeler, griffer, maintenir un oiseau dans sa main fermement et pourtant avec douceur. Apprendre à écouter l'autre mais aussi apprendre à exprimer ses sentiments. Apprendre les niveaux d'intensité en toute chose et apprendre les nuances.
- une haptonomie affective et/ou amoureuse où le toucher se fait respect : "Le toucher haptonomique confirme affectivement l'autre dans le Bon qu'il représente, l'affermit dans son existence pour établir un état de sécurité de base, afin qu'il puisse s'épanouir et développer son identité - son authenticité - propre" (source de l'extrait) Un billet viendra!
L'éducation de l'être sexué est aussi dans les représentations que nous véhiculons des hommes et des femmes, comme une éducation aux sentiments différente ou des jouets ciblés garçon, ciblé fille, ou une répartition des tâches ménagères, du bricolage... ou que sais-je encore!
C'est aussi dans la représentation visuelle que nous nous faisons. Et tout ce billet voulait en arriver là: l'image de l'homme ou de la femme que nous présentons à nos enfants délimite aussi leur manière d'être homme ou d'être femme.Par exemple au Mali, les petites filles Touaregs, très jeunes, sont encore la cible de mariages forcés.
" - Il existe encore un grand nombre de mariages forcés?
- Ah! Oui, oui! Quand même, ça bouge. (...) Et puis l'on revient de loin. Tenez : dans ma thèse de médecine, j'ai consacré un passage aux poupées que l'on donnait aux filles tamasheks, touaregs donc.
- Pourquoi vous êtes-vous intéressée à ce point aux poupées?
- Vous allez comprendre. C'étaient des poupées qui ressemblaient un peu aux Vénus hottentotes. Elles n'avaient pas de visage, pas de jambes, mais des gros seins et des grosses fesses. On donnait ça aux petites filles pour jouer, mais aussi pour qu'elles se représentente ainsi la femme idéale, celle qu'elles devaient devenir. Et l'on gavait les petites filles, il fallait qu'elles soient grosses pour être de parfaites futures mères."
(extrait de "J'ai choisi d'être médecin chez les Touaregs" propos de Soeur Anne-Marie recueillis par Jacques DUQUESNE et Annabelle CAYROL. La Soeur Anne-Marie étant devenue à l'âge de 40 ans médecin au Mali)