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Eyes of war

Publié le 20 juin 2010 par Ruminances

Posté par clomani le 20 juin 2010

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C'est complètement à l'aveuglette que je suis allée voir ce film ce matin. Je savais seulement qu'il s'agissait d'un film sur les photographes de guerre, point/barre.

Petite remarque en passant sur le business des diffuseurs de cinoche : en 2 ans, le prix du ticket de la séance du matin au Pathé est passé de 5€ à 7€ : presque du 25% d'augmentation !!! Tout ça pour se taper au moins 35 mn de bandes annonces débiles et de pubs encore plus débiles (surtout celle d'Orangina qui, pour vanter les produits naturels qu'elle contient, fait dire à un pandaje fais ma toilette intime avec Orangina tous les matins” !!! (c'est en la revoyant ce matin que j'ai pigé - sic-).

EYES OF WAR commence à Londres… deux amis photographes de presse se préparent pour le Kurdistan… La veille du départ, ils sortent ensemble avec leurs épouses dont l'une est enceinte. Sur place, au Kurdistan, ils débarquent en camion dans un camp, en même temps que des blessés kurdes… (Ca se passe dans les années 90, quand Saddam faisait la chasse aux Kurdes en Irak.) Les blessés sont là pour être soignés ou mourir s'ils ne sont pas soignables. Les photographes mitraillent les blessés, les blessures, la distribution de tickets jaunes ou bleus selon que vous êtes guérissable ou non. Sous la grande tente, le médecin, Kurde, examine, tâte, décide et distribue aux blessés des cartons jaunes ou bleus…

David, est vite pris de nausées par l'odeur de cette “boucherie”, Marck lui, fait son métier : il photographie comme on tire au revolver… Il n'est pas là pour faire du sentiment, mais des photos. Son objectif le protège de la guerre. Les deux reporters de guerre suivent les quelques hommes à qui le toubib a distribué un petit carton bleu… emmenés sur une colline en brancards. Là, le médecin leur tire à chacun une balle… pendant qu'un survivant fait la prière, debout dans les montagnes. David craque : il n'en peut plus de ces morts alors qu'il a une famille, qu'il va avoir un enfant dans quelques jours. Il veut absolument être là-bas pour l'arrivée du bébé. Marck reste insensible… il veut faire son job. Le “mitrailleur fou” finit par gagner le débat et nos deux compères partent sur une embuscade organisée par les Kurdes. Spectacle horrible : le blindé irakien saute sur une mine et les Irakiens pris au piège sont tirés comme des lapins…

David renonce et retourne au camp de base. Marck lui dit que c'est à 30 km… l'autre n'en a rien à fiche. Il n'en peut plus de ces boucheries, de ces blessés, de ces morts. Il tourne le dos et part. Marck lui, opte pour suivre les rebelles kurdes. Marck est blessé, il est au camp de base dans ce qui sert d'hopital de campagne au médecin kurde, ses cartons jaunes et bleus à la main. Complètement groggy, amaigri, Marck est observé et interrogé par le médecin… il peut bouger ses jambes ! Je me souviens de cette phrase dans la bouche du toubib : “les jambes sont complètement inadaptées à la guerre moderne“… et je pense “mines anti-personnel” ! Ca fait tant de dégâts dans les populations civiles !

Sur le terrain, Marck hérite donc -à son grand soulagement- d'un carton jaune. Il a une blessure à la tête, des bleus partout… Il finit par marcher et rentre à Londres… seul, boitillant, couvert de bleus. Il a trouvé acquéreur pour ses mitraillages photographiques lors de “la mort en direct” des “cartons bleus“. Mais il va de plus en plus mal. S'ensuit alors pour Marck une descente dans la déprime en même temps qu'il s'emmure dans le silence… Echec du psy envoyé à son chevet avec ses tests de Rorschach. David n'est toujours pas rentré, et Marck est enferré, enterré dans ce Kurdistan, dans ces images de guerre, de blessés, de blessures, de boucherie, de moribonds, de morts… il se ferme et rêve de torrent bouillonnant. Vient à son chevet Joachim le Franquiste, la honte de la famille de sa femme. Il a soigné des soldats franquistes à leur retour de guerre.

Mais Joachim parle : il était et est encore aux côtés des survivants et veut les aider à vivre alors que Marck est resté du côté des morts, et se mure dans son silence. On apprend enfin la vérité… oh, elle n'est pas si moche qu'on s'y attend… mais elle est lourde à porter pour celui qui survit.

Je ne vous conte pas la suite… mais ce qui me venait en tête pendant la séance : j'ai repensé aux bouquins d'Harzfeld sur le Rwanda où les victimes, les survivants se sentent eux, coupables d'être encore en vie, alors que les génocideurs ne montrent pas l'ombre d'une quelconque culpabilité. Joachim d'ailleurs dit que c'est facile de tuer, du moment qu'on l'a fait une 1ère fois ! Mais que c'est un effort considérable de rester dans la vie pour une victime, et de revenir dans le vivant pour un bourreau. Là, on pense aux enfants soldats du Libéria, de Sierra Leone, qu'on faisait boire ou qu'on droguait, qui n'avaient peur de rien et coupaient bras, jambes, oreilles, massacraient les civils encouragés par leurs chefs de bande…

Enfants difficilement récupérés par quelques ONG après… qui se retrouvent sans travail, au sortir des écoles où ils sont allés… et en viennent à dire qu'ils s'ennuient tellement qu'ils regrettent leur vie d'avant (entendu ça dans un documentaire sur ces enfants).

Enfin, sur le chemin de mon retour chez moi, j'ai pensé à ces photographes de guerre, ou à quelques reporters cameramen… J'en ai croisé quelques uns… certains sont restés toujours bien droits dans leurs bottes… partant seuls sur des fronts incertains… d'autres sont revenus carbonisés parce que soumis à des épreuves sur place qui leur ont fait péter un câble. Et je me suis demandé si ce métier en valait la peine : depuis le temps qu'on film les guerres et les conflits, ça n'a pas arrêté les hommes… bien au contraire. Certains les trouvent très esthétiques, ils en font des films.

Le métier de reporter-photo est-il toujours un métier d'information ? Plus un métier artistique ? L'art peut-il se glisser dans une photo de guerre ? Comment photographier ou filmer la guerre économique qui sévit actuellement ? Rien n'est montré… tout est dans des paroles, des déclarations, des sommets mondiaux, surmédiatisés, surprotégés, enflicaillés par peur des contestataires anti-mondialisation ? Le métier de journaliste consiste-t-il vraiment à informer les gens ou à les endormir ? Qu'est-ce qui fait encore courir des reporters de guerre sur des terrains aussi douloureux en Afrique, en Palestine, que dénoncent-ils, par exemple, en Palestine ? Puisqu'Israël continue à flinguer qui bon lui semble et à prétexter que c'est pour sa protection.

Je n'arrive pas à répondre à ces questions. Personnellement, j'ai besoin d'avoir des images de ce qui se passe sur notre planète, parce qu'elle est infiniment petite, maintenant… mais ne suis-je pas un peu voyeuriste lorsque je feuillette des albums de photos de guerre ? Pourquoi ai-je tant aimé “5 colonnes à la Une” qui passait à la télé le mercredi soir, et qui a été une ouverture au monde pour la petite fille que j'étais ? J'ai travaillé au moins une trentaine d'années dans des rédactions : pour quoi faire ? Pour des journalistes qui faisaient quoi ? Leur métier… mais faisaient-ils vraiment leur métier ?

Voilà… je vous ai livré mes états d'âme du jour… c'est loin des retraites, loin des inondations meurtrières… Mais ça m'a bigrement interpelée, ce film ! Si vous y allez, donnez-moi vos avis. Ca m'intéresse.

Sortie : 16/06/2010 franco-belgo-hispano-irlandais / Guerre / 1h35min Réalisation : Danis Tanovic Avec : Colin Farrell, Christopher Lee, Paz Vega, Kelly Reilly, Jamie Sives, Branko Djuric, Mozaffar Shafeie, Luis Callejo


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