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Les nuées dispersées
Reste la place au doute
*
Survivre quand il ne reste plus rien
Plus de grain à moudre
Plus d’horizon à découvrir sans sacrifier à l’essentiel
*
Vie sacrifiée
Entre deux mots
Entre deux maux
Aux caprices planétaires
Humains déserteurs
*
Puiser au puits des volontés
L’ultime transgression des frontières
Abolition des privilèges liés au temps
Au petit bonheur de la chance
Aux filiations hasardeuses
*
Un enfant porté sur les fonds baptismaux
Parents aux yeux fermés sur les dérives
Gouvernail verrouillé au grand large
Nul indice de cruauté
Pourtant
*
C’est dans le flamboiement
D’une grappe blanche et fleurie
A l’extrême d’une branche marronière
Détachée dans l’azur bleu de nos indifférences pâles
C’est ici
Donc
Que règne l’absurde et le divin
Juste avant de s’allonger au divan
Qu’une accorte divine ouvre
En ses salons d’oubli
*
Qu’une larme roule encore aux joues
C’est jour de faiblesse et d’errance
Entre deux tarmacs solitaires
*
Réduits à des chiffres
Contraints à des chiffes
Nulle révolte ne point
Aux poings rageurs
Terrés en poches cousues
*
Mots crevés au gosier sec du monde
Source tarie aux abords des bordels
Femmes et gosses trahis en longues cohortes d’ignorance
Notre soifest si grande
Pourtant
*
Nous pilotons au jugé
Entre deux tours d’aiguilleurs dépourvus de tous cieux
Tanguons un moment entre deux ailes ouvertes
Des papillons multicolores
Strient le ciel de leurs parachutes ouverts
*
Vie agrémentée de ces riens
Jamais ne touchent à l’essentiel de l’âme
Depuis si longtemps murée en silence complice
*
Dure est la chute aux champs du déshonneur
Le mirage des bourses repliées et frileuses
Se confond en vagues de misère
*
La pacotille sonore et trébuchante
Choit derrière les grilles et les miradors
Couvrant d’un fleuve de cliquetis dorés
Le cri des sacrifiés
A l’autel du commerce inéquitable
*
Les nouveaux dieux ont leur panthéon propre
Jamais ils ne se mêlent à la foule en loques
Ils se prélassent en vaines promesses
Dans l’attente d’un suffrage
Aveuglément accordé
*
Les rois de ce monde sont démocratiquement élus
Des tribus les soutiennent
Taillant dans le vif de la vie
A grands coups de machettes jubilatoires
Le sang gicle sur l’œil obscène des caméras lubriques
Un silence pesant ensemence ce temps
D’hommes et de femmes déchirés
D’enfants affamés
*
De leurs carrosses
Une main se tend
Jette quelques miettes
Aux sébiles sans clameur
*
Rien de pire que misère indigne
Rien de pire que l’illusion d’être
Autre pendant de l’avoir
*
C’est à un sursaut de vie
Que nous aimerions boire
Frêle beauté drapée d’espérance
Entre deux chuchotements
Amour et paix s’étendent aux ombrages
Attendant l’heure de l’ultime clameur
*
Nulle vie ne s’achète ou se vend
C’est vivre dont nous avons faim
Vivre sans limite et sans couvercle
Vivre à mains nues
A corps découvert
A cœur ouvert
*
Si fragile parcelle lentement ensemencée
De pères en fils
De mères en filles
Et inversement si bonheur s’y trouve
*
Paroles mûrement lancées
En nuées martinières
.
L’aurore nous invite
Ma mie
A cultiver les battements secrets
D’intense fraternité
.
Manosque, 15 mai 2010
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