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La revanche de Sylvain Chavanel

Publié le 05 juillet 2010 par Jeanpaulbrouchon

CHAVANEL Le cyclisme aime les belles histoires. Celle écrite par Sylvain Chavanel sur la route de Spa ne va pas tarder à entrer dans celle du Tour.

Chavanel, il y a un peu plus de deux mois, fait une lourde chute au cours de Liège-Bastogne-Liège. Aux abords de l’arrivée, il percute la voiture d'un directeur sportif qui a eu la malencontreuse idée de piler juste devant lui. On le relève atteint d’une grave fracture à la base du visage. Il perd connaissance, est transporté dans l’hôpital le plus proche ou il reste trois jours en observation. Un avion sanitaire le ramène chez lui à Châtellerault où le verdict est sans appel. Pas question de remonter sur son vélo avant deux mois. Quant à la suite de sa carrière on attendra de prendre une décision suivant l’évolution de la guérison. Deux mois plus tard, Chavanel est au départ du Tour de Suisse. Son comportement est sans éclat. Après bien des discussions avec son équipe et le corps médical, il est incorporé dans la formation Quick Step du Tour de France.

A Rotterdam, peu avant le départ, il étudie le profil détaillé des étapes en compagnie de Jérôme Pineau, son coéquipier. Pineau envisage d’acquérir le maillot des grimpeurs au cours de cette étape de Spa.

« Si tu le veux, je t’aide », lui lance Chavanel. Seulement, quand on est coureur français sur le Tour et qu’on a pas les moyens de remporter l’épreuve, il faut se lancer dans des offensives au long cours.

Dès le 11ème kilomètre, Chavanel attaque avec Pineau. Ils sont suivis par six autres coureurs dont un français, Sébastien Turgot. Dans chaque côte, Chavanel fait le travail pour Pineau qui engrange des points précieux pour le classement des grimpeurs.

Dans la côte de Stockeu, à 35 kilomètres de l’arrivée, Chavanel est seul à ouvrir la route. Le peloton tarde à réagir. Il aborde la descente avec prudence. La route est recouverte d’une fine pellicule grasse due à une chute de pluie violente entraînant au sol les miasmes de la végétation environnante. Le peloton est totalement désorganisé. Plus de 70 coureurs sont à terre. Les uns cherchent leur vélo qui a disparu dans le fossé, les autres tentent de se maintenir en équilibre. Des spectateurs veulent aider les coureurs à se relever et se retrouvent eux aussi à terre.

Tant bien que mal on fait les comptes. Dans un premier groupe Cancellara et Cadel Evans. Dans un deuxième groupe Armstrong, Contador, Basso. Dans un troisième, beaucoup plus loin les frères Schleck. Cancellara se conduit alors en patron du peloton. Il ordonne à ceux qui l’accompagnent de ralentir et d’attendre les attardés. Plus personne ne veut prendre de risques sur cette route devenue aussi glissante que si elle était recouverte de verglas. C’est un pacte de non-agression qui est conclu entre tous et en particulier par ceux qui visent la victoire finale. La direction de course s’interroge. Faut-il neutraliser l’épreuve sur une courte distance ? Finalement on y renonce car Chavanel poursuit son effort solitaire. La temporisation volontaire du peloton le protège. Il gagne finalement l’étape avec près de quatre minutes d’avance sur un peloton qui ne dispute même pas le sprint pour la deuxième place. Bonus à l’arrivée pour Chavanel. Il endosse à la fois le maillot jaune et le maillot vert. Son équipier Pineau reçoit lui le maillot des grimpeurs et Chavanel obtient en outre le Prix de la combativité.

C’est une récompense formidable pour le coureur français, considéré il y a peu comme le grand espoir du cyclisme national, mais qui n’a jamais pu confirmer le talent qui est en lui. Souvent décrié pour son absence de performances, il renaît tout d’un coup alors que sa carrière a bien failli tourner court il y a un peu plus de deux mois.

Certes, Chavanel a bénéficié de circonstances de course exceptionnelles mais il n’est pas responsable de l’attitude du peloton qui a préféré enterrer bien profond en ce début de Tour la hache de guerre. Tant mieux pour lui. Certains trouveront que le peloton a refusé le combat. Ils auront raison, mais l’organisateur ne peut promettre le soleil à chaque départ de course. La pluie fait partie intégrante de la course cycliste.

Voici maintenant un coureur français en tête du Tour de France, nanti d’une confortable avance au classement général sur son suivant immédiat, le suisse Cancellara à 2'57". De quoi voir venir au cours de l’étape suivante, celle des pavés. Et si d’aventure, le peloton concluait un nouveau pacte de non-agression estimant l’étape trop difficile, Sylvain Chavanel est bien capable de porter le maillot jaune jusqu’aux Alpes. Mais ne rêvons pas trop. La météo annonce pour les jours qui viennent un temps ensoleillé.

Quoiqu’il en soit, Sylvain Chavanel aura bien mérité son maillot jaune. Souhaitons-lui de le porter longtemps pour redorer l’image d’un sport national bien terni actuellement.

Jean-Paul


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