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Cinq échecs pour une reprise en trompe-l'oeil.

Publié le 05 juillet 2010 par Loïc Abadie

Note importante : Les prochains articles que je publierai seront écrits sur le nouveau site d'économie et de conseils "objectiféco".

Nous commençons maintenant à avoir une idée de plus en plus précise des résultats des plans de relance et des politiques de fuite en avant budgétaires menées par la plupart des états touchés par la crise. La reprise en cours depuis l'été 2009 est associée à cinq échecs majeurs qui la condamnent à mon sens à n'être qu'un bref interlude au sein d'une récession de longue durée.

1) Le gouvernement US a échoué dans ses tentatives de relance du secteur immobilier.

Jamais jusqu'ici une reprise n'avait été associée à une poursuite de la chute du nombre de ventes de logements neufs aux USA. C'est pourtant ce qui se produit actuellement aux USA : Des mesures d'incitation fiscale avaient été prises par le gouvernement en 2009 mais n'ont donné lieu à aucun redressement significatif des ventes. Pire, dès que l'incitation a pris fin (le 30 avril 2010), les ventes de logements neufs et les promesses de vente se sont effondrées de plus de 30% au mois de mai, bien en dessous des plus bas du printemps 2009.

Dans l'ancien, une vente sur trois est le résultat de saisies immobilières.

2) La reprise sur l'emploi est beaucoup plus faible que pour toutes les autres reprises des dernières décennies. Dans les faits cette reprise est même presque inexistante !

Les demandes d'allocations chômage ont certes beaucoup diminué depuis leur pic de début 2009, mais se sont stabilisées depuis 2010 à un niveau aussi élevé que celui observé lors du pic de la précédente crise (2001-2002). Voir ce graphique de la Fed.

Encore plus significatif, il n'y a aucune amélioration réelle sur le front du taux d'emploi depuis le début de cette pseudo-reprise il y a un an.

En matière de mesure de la situation de l'emploi, il y a en effet un seul chiffre sur lequel aucun "bidouillage" n'est possible : le nombre de personnes ayant un emploi, et le ratio population en activité / population active. Ce ratio n'est pas sensible à des phénomènes parasites (personnes qui renoncent temporairement à chercher un emploi à cause d'une conjoncture trop mauvaise, personnes radiées des dispositifs d'allocation et d'assurance...etc) : Mesurer le taux d'emploi d'une population active plutôt que son taux de chômage est donc bien plus objectif, et a bien plus de sens d'un point de vue économique.

Le graphique ci-dessous montre l'absence d'amélioration sur cet indicateur (et accessoirement une tendance longue à la dégradation du taux d'emploi, logique dans une situation d'économie artificielle totalement dépendante de la consommation à crédit. Il n'y a pas toujours besoin de travailler pour vivre à crédit au dessus de ses moyens, mais cela se paie tôt ou tard.

emploiUS2010.jpg

3) Le crédit, véritable moteur de la croissance articicielle observée avant-crise n'est pas relancé, et les défaillances ne sont pas enrayées.

Le graphique ci-dessous portant sur le crédit bancaire sur les 12 derniers mois montre que la contraction se poursuit de façon régulière (la "dent de scie" de mars 2010 étant dûe à un simple changement de périmètre de calcul associé à une nouvelle norme comptable).

creditUS.jpg

Sur les défaillances à présent, ce dossier produit par le gouvernement US détaille les chiffres du T1 2010.

- Les lancements de nouvelles procédures de saisie immobilière (370 000 au T1 2010) sont exactement au même niveau qu'un an auparavant (au point bas de la crise).

- Les procédures de saisie en cours de réalisation sont en hausse de 36% sur un an (1 170 864 unités contre 861 029 unités)

- Les saisies qui ont été menées à terme sont en hausse de 68% (152 654 unités contre 90 695 unités).

Les faillites personnelles ont quand à elles augmenté de 14% entre le S12009 et le S1 2010 (voir cet article)

4) L'Europe n'a pas réussi à restaurer la confiance sur les dettes souveraines des pays les plus fragiles de l'U.E.

Les taux des emprunts à 10 ans en Grèce, en Irlande, en Espagne et au Portugal sont déjà quasiment revenus à leurs plus hauts de début mai comme le montrent les graphiques en lien.

Le grand plan de sauvetage Européen, annoncé à coup de centaines de milliards ne semble pas avoir beaucoup convaincu les marchés, les quelques mesurettes de rigueur adoptées ici et là non plus.

5) Le revenu disponible des ménages, hors transferts sociaux, ne se relève quasiment pas.

Source du graphique : FED St Louis.

revenuUS.jpg

Le principal élément qui a permis aux revenus des ménages US de rebondir est la forte hausse des transferts sociaux, elle même permise par les divers plans de relance et la fuite en avant budgétaire des USA : L'état distribue de l'argent aux ménages pour qu'ils consomment un peu, en empruntant pour cela largement au dessus de ses moyens.

Vu les pressions croissantes existant sur les dettes souveraines et les finances publiques, cette manne artificielle ne devrait pas durer très longtemps.

Pour la sortie de crise de 2002, il avait fallu aux états des déficits publics de 2 à 5%  du PIB pour relancer une croissance artificielle pendant quelques années. Cette fois, des déficits sans précédent de 8 à 12% ne permettent même plus d'obtenir une vraie reprise (même artificielle).

Un drogué a besoin de doses toujours plus fortes pour un effet de moins en moins grand, jusqu'à ce que les doses arrivent à un niveau tel que sa survie soit en jeu.

Il en va de même pour le keynésianisme et la fuite en avant dans la dette !


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