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Qui veut la peau des AMAP ?

Par Pierremoysan

Relai d'un article de Laurent Vilette paru dans les Infos du Pays d'Auge le 14 mai dernier :
va t'il bientôt falloir acheter ses légumes en clandestinité pour permettre aux petits producteurs de vivre?


CONSOMMATION — L’Etat lance des contrôles qui inquiètent le milieu associatif
Qui veut la peau des AMAP ?

Alerte dans les AMAP. Obéissant à une directive nationale, les inspecteurs de la Direction des services vétérinaires du Calvados veulent imposer à ces associations de distributions de fruits et légumes bio, produits localement, les mêmes normes que pour les points de vente commerciaux. Première contrôlée : l’AMAP des Paniers de la Dives

Les AMAP ont le vent en poupe. Ces organisations de consommateurs qui se rassemblent pour commander fruits, légumes et produits laitiers directement aux producteurs, sans passer par la case « distribution », font en effet de plus en plus d’adeptes en France.

Une AMAP, cela signifie littéralement Association pour le maintien d’une agriculture paysanne. Au-delà de la fourniture de denrées alimentaires de qualité à un prix compétitif, elles sont aussi destinées à favoriser l’agriculture paysanne et biologique qui, hors du champ associatif, a dû mal à subsister face à l’agro-industrie. Le principe est aussi de créer un lien direct entre les paysans et les consommateurs, qui s’engagent à acheter la production de l’agriculteur à un prix équitable et en payant par avance… Pour le producteur, les commandes d’avance permettent de mieux planifier le travail et de recevoir une juste rémunération de son labeur, les risques de récolte étant partagés avec les consommateurs ; quant au consommateur, avec ce système, il permet le développement de l’agriculture bio de proximité tout en bénéficiant de légumes frais et de saison.

Tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes…

Sauf que l’Etat a décidé de mettre son grain de sel dans le système.

Ainsi à Giberville, l’AMAP des Paniers de la Dives vient de faire l’objet d’un contrôle des services vétérinaires (DSV) qui créée l’émotion dans le milieu associatif, d’autant que le 21 mai, c’est l’AMAP de Courseulles-sur-Mer qui recevra la visite de la Répression des fraudes : « L’inspecteur considère que le local de l’AMAP est un point de vente collectif et doit être déclaré à la DSV comme tout local commercial.

En conséquence, il impose des mises aux normes : surfaces facilement désinfectables, installation d’une climatisation, confinement des aliments, etc. »

Des travaux que ne peuvent évidemment pas entreprendre les AMAP, les distributions se déroulant généralement chez des particuliers.

Directive nationale

Reste alors LA grande question : en agissant ainsi, qui veut la peau des AMAP ? « Apparemment, il s’agirait d’une directive nationale donnée aux DSV de contrôler les AMAP », explique Caroline Paris, l’animatrice du Groupement des agriculteursbiologiques du Calvados (GAB 14). Dans un message d’alerte diffusé aux membres, Thierry Berthaux, de l’AMAP Les Paniers de la Dives, va plus loin, estimant que ce contrôle est la

   

conséquence « d’une interprétation » d’un règlement européen : « A mon avis, cela ressemble fort à une offensive de ceux qui supportent mal la concurrence de l’agriculture paysanne et le développement des AMAP.

La plupart des locaux des AMAP ne sont pas aux normes des industries agro-alimentaires et on comprend pourquoi. Compte tenu de la difficulté pour trouver des locaux pour les distributionsde produits, l’application de ce règlement signerait la fin des AMAP ».

Domaine privé

Du côté des défenseurs de l’agriculture bio et paysanne, la riposte s’organise : « la plupart des AMAP du Calvados distribuent des fruits et des légumes, plus rarement de la viande et des oeufs, et les producteurs font très attention aux règlements sanitaires.

Ainsi, lorsqu’il y a distribution de viande, le producteur vient avec une vitrine réfrigérée. Quant aux légumes, ils ne sont pas plus maltraités dans les AMAP que sur les marchés, lorsqu’ils sont laissés des heures au vent et en plein soleil », rappelle Caroline Paris. « La DSV veut appliquer des règles du même type que pour les ventes de produits à la ferme, mais elle oublie que nous sommes un système associatif, pas commercial. »

D’ailleurs, pour Thierry Berthaux, « le cadre associatif doit permettre d’échapper à ce règlement, car la vente se produit dans le cadre de l’association. C’est donc du domaine privé et est assimilable à un échange entre deux membres de l’association ».

Au « GAB 14 », des contacts sont d’ores et déjà pris avec les autres groupements de France, notamment celles du sud de la France, ou les AMAP sont plus nombreuses et plus anciennes, pour voir comment elles ont fait face à ces règlements. Mais on peut tout de même s’interroger sur les vraies motivations d’un Etat qui, dans le même temps, ne trouve rien à redire à la vente de fruits et légumes de provenances « exotiques », gorgés d’engrais et de pesticides, aux aliments irradiés (dans le langage industriel, on dit « ionisés », cela fait moins peur aux consommateurs), aux « camemberts » fabriqués on ne sait où avec du lait déshydraté importé de pays à bas coûts, aux préparations culinaires à base de graisses végétales hydrogénées, de colorants, de conservateurs et autres « poudres de perlimpinpin »… bref, autant de choses vendues dans des magasins aux normes, donc certainement bien meilleures pour la santé publique que les légumes bio produits et achetés au plus près de leur lieu de consommation !

Laurent VILLETTE


NB.Après avoir pris quelques renseignements, seule la visite de l'AMAP de Courseulles serait à l'initiative de la DSV dans le cadre du programme national de contrôle de ce genre de systèmes de distribution. La visite de celle des Paniers de la Dive serait quant à elle à l'initiative de l'AMAP elle même suite à des doutes sur un problème vétérinaire.


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