Magazine Cyclisme

Tour de France 2010 : Analyse d’une étape dantesque sur le pavés

Publié le 07 juillet 2010 par Julien Holtz

Il faisait beau, il faisait chaud, le pavé était sec, pas de boue, mais une immense nervosité du peloton qui s’est traduite par une vitesse moyenne record (44km/h) et … des chutes sur les pavés. La 3ème étape du Tour 2010 a fourni son quota de spectacle et pas forcément avec les résultats que les spécialistes avaient prédits. C’est le charme d’une course de vélo, c’est le charme d’une course avec des secteurs pavés, c’est tout simplement le charme du Tour de France … ce petit supplément d’âme qui fait du macadam le terrain des plus belles aventures sportives.
 
Le secteur de Sars-et-Rosières : un catalyseur explosif !
Comment aborde-t-on des secteurs pavés dans le peloton ? Le peloton roule à vive allure depuis des dizaines de kilomètres dans l’optique de tendre au maximum l’élastique, éviter que ça frotte à l’entrée des secteurs pavés. Les équipiers des prétendants à la victoire constituent une file indienne de 2 à 5/6 coureurs de leur équipe (on peut retrouver ainsi 4 files en tête du groupe) et c’est à celui qui roulera le plus vite. Les files dépassées se rabattent et se rangent dans les roues. C’est une façon pour les équipiers de remontent et protéger leurs leaders.
A l’entrée du secteur pavé, les plus forts sont devant, c’est la sélection naturelle. Et, de manière un peu métaphorique, comme à Monaco en formule 1, sauf cas de panne mécanique ou incident de course, l’ordre établi restera le même jusqu’à la sortie du secteur ; seuls vont varier les écarts.
Et lors de cette 3ème étape du Tour de France 2010, le secteur de Sars-et-Rosières a été le détonateur, une vraie poudrière (pour faire référence au déclenchement de la Guerre de 14 – 18). A la faveur de un léger virage sur la gauche avec une maison positionnée sur le flanc droit du chemin pavé, une image quasiment subliminale prise depuis la moto en tête du peloton attire mon attention : j’ai viens de voir un coureur virevolter en travers du chemin. Le duo Thierry Adam / Laurent Fignon n’en parle tout de suite, ils n’ont pas remarqué l’image. C’est un ralenti de l’hélicoptère qui les fait sursauter. On voit un coureur au maillot turquoise et jaune passer sous un autre dont le vélo part à droite et le corps s’étale et se recroqueville à gauche. C’est Frank Schleck qui vient de quitter la course. Le bilan médical annoncera 3 traits de fracture de la clavicule.

http://www.letour.fr/PHOTOS/TDF/2010/300/es/ET3_GAL14.JPG

Pertes et profits pour Andy Schleck
Le duo familial vient d’être brisé par un coup du sort. Et quel coup du sort : Je n’ai pas vu dans la presse ou à la télévision de déclaration sur les cause de la chute de Frank, j’ai la certitude que c’est la maladresse d’un Astana qui l’a fait chuter. Andy se retrouve donc orphelin de son frère pour la suite des pavés, et va vite apprendre que ce sera pour la suite du Tour. En termes de business, Andy Schleck en 2 jours de folie, est passé par pertes et profits :
-    2ème étape : impliqué dans les multiples chutes de la cote de Stockeue, il passe quelques secondes sur le bord de la route, hébété comme s’il doutait de reprendre la route. A cette occasion il perd beaucoup de temps et se retrouvé très distancé. Avec la décision de Cancellara de se relever et le boulot de Jens Voigt pour ramener les frères Schleck, il rentrera in extremis dans le peloton avant l’arrivée.
-    3ème étape : Double jeu entre la chute de Franck Schleck et les écarts qu’Andy a réalisés grâce de nouveau à l’intervention de Fabian Cancellara qui a roulé fort notamment aussi pour reprendre son maillot jaune à Chavanel. Un bon coup pour Andy et Cadel Evans
Et dans le lot, c’est Lance Armstrong le perdant …

http://www.letour.fr/PHOTOS/TDF/2010/300/es/ET3_GAL10.JPG

La chance a choisi son camp : Crevaisons pour Lance Armstrong et Sylvain Chavanel
Sur cette étape, comme dans les grandes classiques de printemps comportant des secteurs pavés (Tour des Flandres, Paris-Roubaix), la chance est un paramètre majeur sinon le paramètre principal. En effet avoir les bonnes jambes, la condition physique ne suffit pas. Il faut éviter toute sortie de fait de course parasite qui ferait perdre du temps : crevaison, saut de chaine, bris mécanique, chute …
Hélas, Lance Armstrong avait beau préparer consciencieusement cette étape ; hélas, Chavanel avait beau arborer fièrement son maillot jaune et revendiquer des qualités de spécialiste de classiques ; le destin en a décidé autrement. Les forçats du pavé en ont bavé. 1 crevaison pour Armstrong, Brajkovic lui a donné sa roue avant et Popovitch alors en tête de son paquet s’est relevé pour l’attendre. 2 crevaisons et une gène liée à la chute de Schleck pour Chavanel qui finira les jambes lourdes, attardé au point de perdre son maillot de rétrograder dans le top ten du classement.
On voyait qu’Armstrong était un peu gauche sur les pavés, manquant un peu de puissance, dodelinant de la tête et des épaules. Sur l’ensemble des secteurs, il n’a cessé de chercher son chemin entre le haut du pavé et les accotements en terre et poussière. C’est surement ce qui aura causé sa crevaison ! Et c’est là que le roule du coéquipier intervient : primo donner sa roue (c’est Brajkovic qui s’y est collé), deuxio rouler pour limiter les écarts et éventuellement revenir sur des groupes devant qui seraient « rattrapables » (c’est Yaroslav Popovitch qui s’y est collé). Au bout du compte Popo’ a fatigué et Armstrong l’a déposé ! Il est rentré tout seul sur un petit groupe qui les devançait mais a du accuser à l’arrivée un débours de plus de 2 minutes.
Armstrong reconnaissait sur son twitter que la roue tourne : « Well, that's the way the ball bounces. Bad luck indeed. Keep my head up and move on »
Hushovd le plus rapide
Le plus rapide de tous à l’arrivée de l’étape était un habitué des pavés. Régulièrement bien classé dans les classiques printemps, le champion de Norvège étaient le plus puissant du groupe d’Andy Schleck. Cancellara n’a pu lui contester la victoire car c’est lui qui a fourni l’essentiel de l’effort de guerre pour créer l’écart de temps suffisant pour reconquérir le maillot jaune.


Retour à La Une de Logo Paperblog