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De l'autorité et de l'insoumission.

Publié le 06 juin 2010 par Paulpujol

  Cette personne devait être un général ou un colonel d’armée, nous ne savions pas très bien, en tout cas c’était le chef hiérarchique de cette base militaire du sud du pays.

  Il était entouré de ses trois assesseurs, également des gradés, mais situé certainement en dessous dans cette même hiérarchie.

  Ils avaient fait venir ce tout jeune homme, qui avait à peine vingt deux ans, et ils se trouvaient tous là dans cette pièce, pour réaliser à leurs yeux un acte solennel et officiel.

  Le jeune homme était arrivé il y a peu de temps, et il avait refusé d’obéir à tout ordre, il avait naturellement décliné l’uniforme, le coiffeur et tout le système de conformité qui était imposé. Mais il y avait un souci, car dans ce pays et à cette époque, cela était obligatoire et cela faisait force de loi.

  On était totalement conscient de ces éléments, cependant il était hors de question de porter tel ou tel habit, ainsi que de prendre une arme et d’en apprendre son fonctionnement. Tout cela avait été décliné sans agressivité d’aucune sorte, mais avec une grande fermeté.

  Naturellement cette attitude ne pouvait être tolérée, et le jeune homme se trouva emprisonné, ce qui restait logique dans ce système établi. S’il y a des règles, il y a des sanctions pour ceux qui dérogent à ces mêmes règles, aussi il n’y eu pas de surprise quand cela arriva.

  Mais cette personne avait une raison personnelle, privée, et elle devait sortir rapidement de cet emprisonnement. Aussi la décision fut prise de cesser de s’alimenter ; en fait, le jeune homme refusait toute collaboration, même la plus minime. Il faut bien comprendre que cela se réalisa sans aucune tension, sans frictions, simplement, il disait « non merci » à tout ce qu’on lui présenté.

  Même à un statut officiel «  d’objecteur de conscience », c’était la case attribué aux personnes comme lui, et cela aussi fut refusé.

  Bien évidemment, ce comportement ne pouvait être toléré, dans ce lieu de discipline et de soumission.

  On mit donc cette personne en isolement, mais cela ne posa aucun problème. Le jeune homme était serein, tranquille, et les autres personnes ne montraient en fait que de la gêne ; mais pas une seule fois de la violence ou de l’énervement ne s’exprima.

  Cela durait depuis une semaine ou deux déjà, et pour la hiérarchie c’était intolérable.

  Alors ils firent venir cette personne dans le bureau du plus haut gradé de ce lieu militaire.

Ils étaient tous là, avec aussi un simple soldat qui avait escorté le jeune homme jusqu’ici. Le haut gradé pris alors la parole, il expliqua le pourquoi de cette réunion, c’était une démarche officielle prévue dans les cas de désobéissance caractérisée.

  Il nous dit, qu’il allait nous demander par trois fois de se soumettre aux ordres, c’était la procédure, et les trois autres gradés subalternes servaient de témoins, afin de valider l’exactitude de la dite procédure.

  Nous l’écoutions sans dire un mot, une fois sa présentation faite ; il prononça, comme au théâtre, trois fois son injonction, il est évident que nous ne répondîmes même pas, seul le silence suivi ses demandes répétés.

  Il nous regarda, puis s’adressa aux trois autres individus, il dit « messieurs, vous être témoins ? Nous sommes tous d’accord ». Nous trouvions cette mise en scène un peu ridicule, mais toutes ces personnes semblaient y tenir énormément.

  Le chef s’adressa au jeune homme alors de manière moins officielle, et moins procédurale ; il indiqua que cette décision d’insoumission nous suivrait toute notre vie, nous empêchant d’accéder à certaine fonctions, par exemple administratives. Il parla aussi du jeûne entamé, et indiqua qu’il pouvait y avoirs des séquelles physiques importantes et invalidantes.

  Ce n’est pas qu’il était prévenant, ayant le souci de votre santé ; il cherchait juste à faire peur, ses réflexions étaient plutôt des sortes de menaces, des mises en garde concernant un sombre avenir.

  Le jeune homme pris alors la parole, et demanda au général d’armée s’il se rendait compte de ce qu’il disait, de la violence insensée de ses propos. La conclusion de cette expression fût « monsieur, sincèrement je préfère être à ma place, plutôt qu’à la vôtre ».

  Un silence gêné s’installa, on s’entendait presque respirer ; puis un geste fût fait vers le simple soldat pour qu’il nous fasse sortir et nous ramène en cellule.

  Toue la société se présente comme une succession d’institutions qui essaient d’asservir l’homme. Le but de ces mécanismes est de rendre l’homme conforme aux attentes de cette société; il faut être soumis à la religion, à la morale sociale, à l’armée, au politique, soumis au schéma qui s’étant aussi dans le domaine privé.

  Ce très jeune homme était confronté, comme d’autres, à toutes ces pressions extérieures, religieuses, privées, administratives ou autres….Pour vivre en communauté, il est nécessaire d’avoir des règles et des lois ; sinon l’anarchie est là et chacun vit selon son plaisir et son désir. Par contre quand ses règles de vie commune, s’étendent à notre manière de voir la vie, quand elles veulent nous contraindre à penser de telle ou telle façon, là le chaos est dans le monde.  Il s’en suit que chacun choisit un camp, chrétien, bouddhiste, français ou allemand ; chacun choisit sa case de conformité, et le désordre court, la fragmentation de la société se met en place.

  Les hommes se brutalisent, s’entretuent, le frère contre le frère, le fils contre le père, ne voyons-nous pas toute cette folie ?

  Il nous faut absolument et totalement être libre, cela ne veut pas dire «  faire ce qui me plaît », car « ce qui me plaît » est le conditionnement que la société m’a inculqué, n’est-ce pas ?

  Etre libre, c’est être totalement seul, insoumis, et responsable de l’état du monde.

  Etre insoumis, totalement insoumis, c’est être hors du monde des hommes.

  Celui qui demeure seul, entier, est imperturbable comme un roc ou une montagne.

  Alors véritablement, un autre mouvement naît dans l’esprit, un mouvement sans fin, insondable.

  Paul Pujol, texte écrit le 1 juin 2010.


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