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L’homme à la laisse d’or

Publié le 12 juillet 2010 par Ruminances

Posté par lediazec le 12 juillet 2010

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En direct depuis l'Elysée, Nicolas Sarkozy reçoit David Pujadas. L'homme à la laisse d'or, va tenter dans son style bien domestique, à une heure de grande écoute, de poser les questions qui ne fâchent pas. Celles qui rassurent cette partie de l'opinion totalement abrutie par le Mondial de foot en Afrique du Sud et par le Tour de France cycliste, mais qui se pose cependant des questions d'ordre moral sur la conduite de la politique du pays par l'équipe dirigeante. Pujadas va interroger un président de la République qui - une fois n'est pas coutume - aurait aimé se trouver ailleurs plutôt que devant les caméras du service public - qu'il domine de la tête et des épaules - pour démêler la pelote de nœuds qui lui tord les boyaux depuis que l'affaire Woerth-Bettencourt s'est installée sur la place publique, faisant hurler de colère une opinion ébranlée, voire écœuré, par ce qu'il convient de nommer un scandale d'État.

Dans son style onctueux, Pujadas va écrémer les parties grasses du repas pour ne conserver que la Taillefine du sujet. Le cholestérol est affaire de dosage. Si le temps le permet, la messe sera célébrée dans le jardin du palais présidentiel, afin de donner à l'événement un caractère champêtre et, pourquoi pas, bon enfant.

Cette intervention, dit-on en coulisse, n'est pas de la seule volonté du chef de l'État. En effet, plusieurs gros légumes de l'UMP, parmi lesquels Copé et Raffarin en personne, asphyxiés par les attaques dont ils font régulièrement l'objet, voyant que le feu se propage très vite à tous les étages, ont poussé l'hyper-président à être ce qu'il dit être et à se montrer à la fenêtre avec son costume de pompier pour tenter de circonscrire les foyers menacés. Le grondement de la plèbe inquiète et un vent de panique incite certains rats à quitter le navire, armes et bagages sous les bras. Pas très chaud au départ pour aller faire le beau, comme il aimait tant à le faire il n'y a pas longtemps, il a fini par accepter ce rendez-vous avec le pays pour – dans la mesure du possible – essayer de limiter la casse.

Après le soldat Woerth qu'il faut sauver coûte que coûte, le soldat Pujadas jamais égaré, ayant fait affiner une dialectique de la complaisance par une armée spécialisée en réécriture, va poser les questions qui donneront du lest au National Président pour respirer un brin à l'approche de Morzine-Avoriaz, ascension de 13,6 kms avec pente de 6,1%. Comme dans le Tour de France, en politique aussi, les favoris ont besoin de poisson-pilote pour les guider dans l'effort.

La fatigue des dernières étapes l'ayant épuisé, l'agité du bocal n'en peut plus. Il est au bord de l'implosion et son entourage se démène pour lui donner une allure présentable ce soir à 20 h 15. Va-t-il se tenir ? Va t-il retenir la leçon de maintien que lui donne le député UMP Claude Goasguen avant son intervention ?…

Pourtant, malgré tout, la route lui est ouverte. Car avant d'arriver au plat de résistance, les affaires qui salissent son image, mettant à mal sa forfanterie naturelle, il nous entretiendra sur les retraites, de la démission des deux sous-ministres, de la crise économique, de la nomination des présidents de l'audiovisuel, de l'équipe de France de football. Très bien, ça, l'équipe de France de foot. Excellent sujet et superbe question : « comment en sommes-nous arrivés là ? » Il faut des sanctions !, est-il capable de glapir.

Puisque nous savons déjà de quoi il va nous entretenir, quels sont ses artifices et ses manières, livrons-nous à un exercice salutaire : coupons la chaine de télé et regardons autre chose. Et, pourquoi pas, lire un livre ?

En ce moment, je relis, en version originale, « l'agonie du christianisme » de Miguel de Unamuno.


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