Voici la suite de notre tour d'Europe des élections d ce premier semestre 2010. Aujourd'hui, la Hongrie.
1/ Les socialistes étaient au pouvoir depuis huit ans : ils n'ont pas surmonté les affaires de corruption et surtout les difficultés économiques, avec l'aide du FMI décidée fin novembre 2008 (voir ici). Dès lors, la droite était assurée de revenir au pouvoir à l'occasion de ces législatives qui ont eu lieu les 9 et 23 avril.
2/ Et le raz de marée fut sans commune mesure. Le Fidesz, le parti de centre droit, s'est ainsi assuré une majorité des deux-tiers, lui permettant ainsi de pouvoir réformer, si besoin était, la constitution : une telle domination n'avait jamais été connue depuis 1990. Victor Orban, son leader, s'est avancé en faveur d'une politique de relance et de baisse d'impôts, à l'encontre de l'austérité des socialistes. Ainsi, à la différence de ce qui s'est passé en Tchéquie (voir ici), il n'y a pas eu d'effet "crise grecque" sur les élections hongroises. Peut-être parce que l'austérité est venue plus tôt (la Hongrie n'appartient pas à l'euro) ou que la solidarité européenne n'a pas été aussi nette qu'espérée.
3/ Les autres résultats sont intéressants : si les socialistes conservent de justesse la deuxième place, signe de leur effondrement, le parti "Jobbik" les talonne Ce dernier parti, nationaliste (au minimum), s'est fait connaître par ses outrances anti tziganes et slovaques. A noter enfin l'émergence d'un parti écologiste, le LMP (La politique peut être différente) avec 8 % des voix. Sur le Jobbik, lire par exemple ici.
4/ Il s'agit donc d'un net basculement à droite, avec un renouveau nationaliste qui a immédiatement eu des effets. Les réformes constitutionnelles attendues avaient trait la liberté de la presse, mais aussi à la loi sur la double nationalité. Dès le 26 mai, le parlement hongrois votait une loi attribuant la nationalité aux personnes hongroises vivant à l'étranger, ce qui a immédiatement suscité la colère des Slovaques (voir ici). Une importante minorité hongroise vit au sud de la Slovaquie (voir billet ici). Mais il n'y a pas que là, puisqu'il en existe en Roumanie, mais aussi en Serbie dans la Voïvodine (voir ici).
5/ On peut donc s'interroger sur les gages donnés par le Fidesz aux nationalistes, même s'ils s'en défendent, d'autant qu'ils n'ont pas besoin de leur appoint au parlement. Peut-être s'agit-il de désamorcer une opposition de droite (un peu comme l'avaient fait en leur temps les conservateurs autrichiens avec le FPÖ). Voir ici.
6/ Il reste que la crise économique et les déceptions ramènent sur le devant de la scène la remise en question du traité de Versailles (ou, en l'espèce, du traité de Trianon). Au-delà, c'est un vrai populisme qui apparaît au grand jour (voir ici).
réf:
- sur les élections hongroises : ici et ici.
- mon billet sur l'analyse géopolitique de la Hongrie.
O. Kempf