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Les Misters de Paris-partie 1

Publié le 21 juillet 2010 par Ruminances

Posté par clarky le 21 juillet 2010

Les Misters de Paris-partie 1
Je me souviens, c'était le mois de la terre qui crève sous le soleil, les vieux fous du coin appelaient ça l'enfer du décor. L'affaire avait fait grand bruit dans ce no man's land balayé par le hurlement des cigales et la lente agonie des arbres torturés par le feu tombant du ciel. Tout avait commencé quand la vieille folle avait perdu la boule. Me semble bien qu'elle se faisait appeler la Liliane. Ici, quand une vieille peau se tanne, les charognards ne sont jamais très loin…

On les avait vu rappliquer sans trop y prêter attention au début, faut dire que dans ces contrées reculées, les histoires des uns s'évaporent dans les nausées des autres. Mais la vieille canaille avait un sacré bas de laine. Entre nous, on déconnait en la surnommant la reine Magot, c'était pas Chéreau payé. Une tête patibulaire, mais presque, dans le coin et débutait la chevauchée fantastique. Tous se massaient en loucedé derrière les volets entrebâilles et affûtaient l'esgourde, mais étant donné que les trois quarts d'entre nous étions sourds comme des pots, c'était à celui qui aurait le plus d'imagination. Seul Pierrot, dit le fou, pouvait rivaliser d'ingéniosité quand il s'agissait d'infiltrer les lignes ennemies. Faut dire que ledit Pierrot était à bout de souffle depuis qu'il avait vu la fille de la Liliane. Il avait bien tenté de savoir deux ou trois choses d'elle mais, vu qu'il était pas sorti de la cuisse de Jupiter, son seul luxe abordable était la grande goulue de la RN 13, et la RN 13 était connue pour être le terminus de l'amour. Pierrot y avait chopé le chantre mou et s'était mis à déblatérer du Proust. Nous, on était tellement à la masse qu'on pensait qu'il s'agissait d'une connerie genre versets sataniques ou fièvre du samedi soir, parce que l'autre se grisait dès qu'il voyait une queue de cheval ! Tu m'étonnes qu'il la ramène avec Proust.

Enfin bon, Pierrot sur ce coup, était notre seul sésame. Putain, tu lui disais ouvre-toi qu'il comprenait, de traviole, couvre-toi et filait fissa récupérer son anorak. Alors on l'avait drivé, entre bourrins on se comprenait. Malgré tout, cet atrophié du bulbe voyait des juments vertes partout, à lui tout seul c'était un tiercé dans le désordre ! Faut bien vous l'avouer maintenant, le Pierrot était notre David Vincent local. Aussitôt qu'un envahisseur pointait le bout de son nasal, y'avait puéril en la demeure.

A 6h45 ce matin là, la Franc-Comtoise, de ce qui me servait de cuisine, avait décidé de me les briser langoureusement. Bloquée qu'elle était la garce, une sorte de sciatique paralysante de l'horlogerie m'avait dit un de mes comparses encore plus mal en point que ma tocante en bois. Dans ces conditions de l'extrême, fallait lâcher du lest. C'est en sortant, furibard, pour aller faire pleurer le colosse dans la rosée encore présente, que je l'ai vu. Foutre bleu, qui c'est celui-là, qu'est ce qu'il veut, qu'est ce qu'il a, il a une drôle de tête ce mec là ! résonnait dans ce qui était censé être mon cerveau ! Il s'avançait, nonchalamment, vers moi faisant mine de ne pas prêter attention à ma dégaine. Mon cul ouais, où t'as vu qu'on remarque pas un type qu'a son froc au niveau des chaussettes et la queue en pleine séance d'oxygénation. Il ne me tendit pas la main ( l'hygiène de l'assassin je me suis dit ) et c'est tant mieux vu que je les avais déjà occupées à parfaire mon affaire de moeurs intimes.

“Bonjour mon brave, pourriez-vous m'indiquer l'accès le plus commode pour rejoindre la petite maison dans la prairie “ . Oh pute vierge, j'avais rien compris à sa façon de débiter. Je sais toujours pas si c'était l'accent, ou alors ma surdité qui avait conquis une nouvelle terre inconnue de ma monotonie. La journée venait de débuter et l'ami Ricoré avait une drôle de tronche…


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